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  Vol. 298 No. 17, 7 novembre 2007 TABLE OF CONTENTS
  Rencontres Cliniques: Conferences entre Patients et Medecins
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LES PAGES DU PRATICIEN
Un homme de 63 ans avec de multiples facteurs de risque cardiovasculaires et une mauvaise observance des plans de traitement

Thomas Bodenheimer, MD, Intervenant


RÉSUMÉ

Monsieur P. présente de longue date une hypertension, une obésité et un diabète sucré, et a souffert d'événements cardiovasculaires menaçant le pronostic vital. Monsieur P. reçoit une prise en charge clinique fondée sur les preuves, mais présente une mauvaise observance thérapeutique et reste à risque considérable de développer de futurs événements cardiovasculaires fatals. La pratique de la médecine factuelle doit s'effectuer en 5 étapes: la recherche des preuves, l'assimilation des données par les cliniciens, l'utilisation des preuves par les cliniciens à chaque consultation pour chaque patient, leur transmission aux patients dans un langage compréhensible, et l'aide à leur intégration dans la vie des patients. Cependant, les études démontrent que les cliniciens n'utilisent pas les preuves à chaque consultation, que les patients sont susceptibles de mal comprendre ce qui s'est passé pendant la visite, et que les cliniciens ne contribuent pas toujours efficacement à l'intégration des données dans la vie des patients. Ces défaillances reflètent les difficultés rencontrées par les cliniciens qui doivent simultanément traiter de multiples problèmes, fournir des informations suffisantes, et engager une prise de décision participative, en l'espace d'une brève consultation clinique.

JAMA. 2007;298(17):2048-2056


DR DELBANCO: Monsieur P. est un homme d'affaires retraité de 63 ans, qui a été obèse la plus grande partie de sa vie, a de l'hypertension et une hyperlipidémie depuis au moins 20 ans, et a reçu un diagnostic de diabète il y a environ 10 ans. Il est marié et a de nombreux enfants et petits enfants. Il bénéficie d'une assurance privée et est suivi dans des services de soins primaires hospitaliers à Boston.

Selon Monsieur P. et sa famille, il a présenté une mauvaise observance aux divers régimes thérapeutiques proposés pendant plus de 20 ans. En 1988, un AVC suspecté d'origine hypertensive ne lui a laissé aucune séquelle. En 1996, il a été hospitalisé pour une cellulite du pied. En 1998, il s'est présenté à l'hôpital avec un angor accéléré qui a nécessité un pontage aorto-coronarien. Il n'a plus souffert de douleur thoracique depuis. La même année, Monsieur P. a eu une embolie pulmonaire, dont il s'est remis sans incident. Il a présenté des douleurs rachidiennes intermittentes. Il souffre actuellement d'une douleur invalidante de la hanche, associée à de l'arthrose, et doit subir la mise en place d'une prothèse de hanche au cours des prochaines semaines. Il présente une dysfonction érectile sévère depuis environ 8 ans. Diverses modifications de ses traitements et un essai de sildénafil n'ont pas amélioré sa fonction sexuelle.

Monsieur P. a été un grand fumeur, mais il a arrêté en 1982. Aujourd'hui, il fume occasionnellement des cigares. Il boit peu ou pas d'alcool, tout au plus 2 bières dans la journée. Il a longtemps très peu pratiqué d'exercice, mais comme il le dira par la suite, a été physiquement plus actif au cours des 2 dernières années. Il présente une lourde histoire familiale d'obésité, de cardiopathie artério-scléreuse et d'hypertension. De nombreux médicaments lui ont été prescrits, incluant l'allopurinol, l'aspirine, l'aténolol, l'atorvastatine, l'amlodipine, le furosémide, le glyburide, l'insuline, l'ibuprofène, le lisinopril, et la metformine.

Lors d'un récent examen, sa pression artérielle était de 162/94 mm Hg en décubitus au repos, avec un large brassard. Son pouls, de 60/mn, était régulier; il n'était pas tachypnéique. Il pesait 120 kg pour 1,78 m; au cours des 10 dernières années, son poids a varié de 111 kg à 127 kg. Il présente une rétinopathie diabétique non proliférante minime, mais pas de rétinopathie hypertensive.

Aucune anomalie cardiaque ou signes d'insuffisance cardiaque congestive n'étaient observés. Les poumons étaient clairs, et l'examen de l'abdomen ne révélait qu'une obésité abdominale. Les chevilles présentaient 2 oedèmes avec signe du godet positif; les pouls périphériques étaient pleins. Le patient avait une sensibilité à la hanche et une démarche antalgique lors de l'utilisation d'une canne. Les résultats d'examen neurologique étaient normaux, sans signe de déficit résiduel consécutif à son AVC.

Lors de récentes analyses biologiques, son contrôle glycémique était bon, avec un taux d'hémoglobine glyquée de 5,7%. Ses taux de créatinine et d'azote uréique sanguin étaient normaux, mais il présentait une microalbuminurie et une fréquente glycosurie. Son taux calculé de LDL (low-density lipoprotein)-cholestérol était de 46 mg/dL (1,19 mmol/L), et son taux d'acide urique de 6,4 mg/dL. Sa fonction thyroïdienne était normale, ainsi que ses résultats de tests de la fonction hépatique, ses taux de calcium sanguin et sa numération formule sanguine.


Monsieur P.: SON POINT DE VUE

La plupart des médecins casent 5 rendez-vous dans 1 heure. Mais ce n'est pas faisable, alors on est obligé de rester là à attendre indéfiniment. Et je n'aime pas ça. Je sais que beaucoup de gens sont toujours en retard. Moi c'est l'inverse. Ce n'est pas grave d'attendre quelques minutes, mais quand les minutes se transforment en une heure d'attente, ma pression artérielle monte. Ensuite, quand il la prend, elle atteint des sommets. Pour moi, c'est de la faute des médecins. Mais j'imagine que c'est dans leur nature d'être comme cela.

J'ai du mal à faire les choses comme il faut. J'essaie de faire de mon mieux. Ce que je préfère, c'est manger. Je ne bois pas, je ne fume pas, mais je mange. C'est comme si je faisais un festin 5 soirs par semaine. Ça ressemble à ça. Dans ma famille, j'ai appris que lorsqu'il y a 13 bouches à nourrir, on doit manger tout ce qu'il y a dans l'assiette. Mais ce n'est plus vrai aujourd'hui. Je me dois de repousser mon assiette.

Je me suis mis à la gymnastique parce que mon médecin me disait que je devais perdre du poids. La gym s'est révélée être une bonne chose. J'y ai rencontré des gens, et c'est devenu une habitude quotidienne, une bonne habitude. J'y suis allé pendant toute une année. J'ai perdu 27 kg, et je n'avais plus de pilules. Et puis en janvier, il y a un an, j'ai commencé à avoir des problèmes de hanche. Je ne pouvais plus faire d'exercice ni marcher. Je ne pouvais plus aller à la gym. Et comme je n'allais plus à la gym, je me suis mis à manger davantage, et j'ai arrêté de perdre du poids. Je suis redevenu comme j'étais avant. Alors j'espère qu'après mon opération, je pourrai y retourner. C'était très important, la gym.


Mme P.: SON POINT DE VUE

Il a vu beaucoup de médecins tout au long de notre vie commune. En premier lieu, je pense que les médecins doivent regarder les patients, les regarder dans les yeux quand ils leur parlent. Ils sont souvent débordés, et je peux le comprendre. On attend parfois 45 minutes, pour ne rester que 10 minutes dans le cabinet. On aimerait qu'ils nous regardent et prennent le temps de nous dire: « Est-ce que tout va bien? »


Dr Z.: SON POINT DE VUE

Il vient généralement me voir seul, et on passe quelques minutes ensemble. C'est assez difficile de l'amener à parler vraiment, surtout quand je suis absorbé à essayer de comprendre ce qui s'est passé depuis la dernière fois où je l'ai vu. Il manque des rendez-vous de temps en temps. Je ne suis jamais vraiment convaincu qu'il prend ses médicaments, même si je suis plus confiant depuis que sa femme est plus impliquée dans ses soins. Je ne sais vraiment pas ce qu'il connaît de sa maladie. Il ne me répond que par une phrase ou par monosyllabe. Et je ne sais jamais vraiment ce qui se passe dans sa tête.

Cela faisait longtemps que je lui disais, « Vous devez faire de l'exercice. Vous devez manger moins. Faites ceci, faites cela. » J'ai essayé tout ce qui concerne la nutrition et la modification du comportement, la ritournelle habituelle de l'interniste, sans jamais vraiment de succès. Et subitement, il s'est mis à la gymnastique. Il a perdu du poids. Sa pression artérielle s'est abaissée. Il avait un meilleur équilibre glycémique et lipidique, et j'ai été converti. C'est très rare de voir cela chez les patients.

Il déteste m'attendre. Il a calculé de venir tôt le matin, pour le premier rendez-vous. Mais il ne compte pas vraiment sur moi là-dessus. Cela se lit sur son visage. Quand je lui présente mes excuses, il me répond: « Ça va. » J'entends le « Ça va », et je sais que ce n'est vraiment pas le cas.

Ce n'est pas un patient qui refuse les choses en disant: « Pourquoi devrais-je faire cela? » ou « Dois-je vraiment faire cela? ». Quand il a une réaction de rejet, je pense qu'il agit sans m'en parler. C'est une forme de résistance silencieuse, et il doit probablement se dire « Mon médecin est fou de me faire avaler tous ces trucs. Je ne suis pas sûr d'en avoir besoin. Je vais bien. » Mais finalement, je pense qu'il prend beaucoup des choses que je lui prescris, et qu'il est probablement indisposé par certaines, par périodes. En ce moment, sa pression artérielle est élevée, et je suis sûr que c'est parce qu'il prend trop d'AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens). Il a augmenté sa dose tout seul, et il n'a pas pu m'en parler ou a pensé qu'il ne devait pas le faire.

C'est terriblement difficile de jongler avec plusieurs médicaments. C'est peut-être plus difficile lorsqu'ils sont nombreux qu'en nombre restreint, parce qu'il faut mettre au point un système. Aujourd'hui, sa femme représente clairement ce système. Je ne pense pas qu'il sache vraiment quels nombres de médicaments il prend au total, mais il sait si les choses vont mal ou bien. Si je lui demandais d'énumérer ses médicaments, il se tournerait vers sa femme pour avoir son aide.

Pendant un moment, il voyait une infirmière de notre équipe, et c'était utile. Mais il n'a jamais vraiment adhéré. Il voulait voir le médecin. Je pense que c'était sa manière d'être socialisé, et celle dont il voulait se comporter. Je n'ai jamais réussi à faire très bien fonctionner le travail d'équipe. Mais nous verrons ce que nous réservera l'avenir.


AU CARREFOUR: QUESTIONS AU DR BODENHEIMER

La prise en charge de Monsieur P. a-t-elle suivi les principes de la médecine factuelle? En quoi ces principes sont-ils liés à son évolution? Si les patients ne bénéficient pas suffisamment de ce type de prise en charge, qui est responsable? Comment les soins primaires peuvent-ils intégrer la médecine factuelle dans la vie des patients? Comment les consultations de soins primaires peuventelles améliorer leur prise en charge des patients ayant des facteurs de risques cardiovasculaires? Comment peut-on aider Monsieur P. à aller mieux?

DR BODENHEIMER: Pendant ses 10 années de suivi de Monsieur P., le Dr Z. a utilisé des recommandations fondées sur les preuves.1-3 Il s'est appliqué à lui donner des conseils de régime et d'exercice, et lui a prescrit les médicaments adéquats. Cependant, Monsieur P. a eu de sérieux problèmes avant d'aller consulter le Dr Z., avec une histoire de tabagisme, d'hypertension, un profil lipidique défavorable, et un AVC survenu à la quarantaine. Dans la mesure où la prévention primaire avait échoué, le Dr Z. devait redresser la situation en pratiquant une prévention secondaire.

Monsieur P. a été traité sur la base de la médecine factuelle, mais cette pratique semble avoir échoué dans son cas. Les consultations effectuées en 2001, 2003, 2004 et 2006 révélaient une pression artérielle non contrôlée. Son indice de masse corporelle tournait autour de 38, bien au-dessus du seuil d'obésité de 30. Entre 2004 et 2006, son taux de HbA1c fluctuait entre 5 % et 8,8 %. Son taux de cholestérol total est passé de 132 mg/dL (3,42 mmol/L) en 2004 à 256 mg/dL (6,63 mmol/L) en 2005, avec un abaissement à 118 mg/dL (3,06 mmol/L) en 2006. Alors que Monsieur P. était traité conformément aux preuves, la médecine factuelle ne lui pas été véritablement profitable.

Pourquoi la médecine factuelle échoue-t-elle souvent?

L'expérience de Monsieur P. n'est pas unique. Des études nationales montrent que les recommandées fondées sur les preuves relatives à la réduction des facteurs de risques cardiovasculaires, qui ont fait l'objet de recherches bien menées et ont été largement diffusées aux médecins du pays, aboutissent souvent à un échec. Soixante-cinq pour cent des hypertendus ont un mauvais contrôle de la pression artérielle,4 62 % des patients avec des taux de LDL-cholestérol élevés n'atteignent pas les objectifs lipidiques,5 et 63 % des diabétiques présentent un taux de HbA1c supérieur à 7 %.6

Pour de nombreux cliniciens, la médecine factuelle consiste en 2 étapes: la recherche des preuves et l'assimilation des preuves par les cliniciens. Cependant, pour que les patients puissent en tirer un bénéfice, il est nécessaire que les cliniciens appliquent les preuves aux multiples visites, que les patients comprennent les recommandations, et qu'ils les intègrent dans leur vie.

La pratique de la médecine factuelle doit consister en une procédure de 5 étapes:

- Étape 1: La recherche des preuves.

- Étape 2: Les cliniciens assimilent les données.

- Étape 3: Les cliniciens utilisent ces données à chaque visite pour chaque patient.

- Étape 4: Les cliniciens veillent à ce que les patients comprennent les données.

- Étape 5: Les cliniciens aident et encouragent les patients à intégrer les données dans leur vie.

Une fois ces étapes franchies, la responsabilité devient du domaine du patient. Cependant, si nous cliniciens, nous arrêtons après l'étape 2 sans procéder à la totalité des 5 étapes, alors nous sommes défaillants, ou trahis -de même que nos patients- par le système dans lequel nous pratiquons.

Quelles sont les performances du système de santé américain aux Étapes 3, 4 et 5?

Étape 3. Les cliniciens n'utilisent pas les données de la science à chaque visite et pour chaque patient. Dans de nombreux cas, les résultats intermédiaires insatisfaisants des patients avec diabète, hypertension, et hyperlipidémie, sont associés à la non-application systématique des principes de la médecine factuelle par les médecins. Dans une évaluation nationale de la performance des médecins sur 439 indicateurs de procédure pour 30 troubles médicaux plus soins préventifs, les patients ne recevaient que 55 % des soins recommandés.7 Tandis que les critères d'évaluation concernent tant les actions des médecins que des patients, les indicateurs de procédure sont plus étroitement associés au travail des médecins.

Étape 4. Les cliniciens manquent souvent d'informer les patients sur les données de la science. Une étude nationale de 2002 a trouvé que 55 % des patients diabétiques rapportaient recevoir une éducation sur le diabète.8 Dans une étude enregistrée sur bande magnétique audio de 336 consultations médicales avec 34 médecins, ces derniers consacraient une moyenne de 1,3 minute à informer les patients, bien qu'ils estimaient consacrer une moyenne de 8,9 minutes à cette activité. Quatrevingt-huit pour cent des informations étaient formulés en langage technique.9 Alors que les médecins attribuent fréquemment la non-observance du traitement au comportement du patient, une étude démontrait que 3 médecins sur 4 ne donnaient pas d'instructions claires aux patients sur la manière de prendre leur traitement.10,11 Les cliniciens pourraient également ne pas consacrer suffisamment de temps à traiter les préoccupations des patients. Dans une étude de 264 consultations de médecins de famille, enregistrées sur bande magnétique audio, les patients qui avaient commencé à parler de leur problème étaient interrompus après une moyenne de 23 secondes. Dans 25 % des visites, le médecin n'interrogeait jamais le patient sur ses préoccupations.12

Trois études indépendantes sont parvenues à des conclusions qui peuvent être résumées par la « règle du 50 % ». L'une a trouvé que 50 % des patients sortaient d'une consultation sans comprendre ce que leur avait dit le médecin.13 Dans la deuxième, lorsque des médecins demandaient aux patients de répéter les instructions du médecin, les patients répondaient de manière incorrecte dans 47 % des cas.14 Une troisième étude rapportait que 50 % des patients, lorsqu'il leur était demandé de dire comment ils devaient prendre un médicament prescrit, n'avaient pas compris le mode de prescription.15

Lorsqu'il a été demandé à Monsieur P. de dire quels médicaments il prenait, il a été incapable de le faire. Sa femme, en revanche, avait compris précisément les prescriptions. Pour les 90 millions d'adultes estimés ayant un niveau limité de connaissances médicales, les médecins doivent particulièrement veiller à rendre leurs conseils compréhensibles.16

Étape 5. Souvent, les médecins n'aident pas ni n'encouragent les patients à intégrer dans leur vie les recommandations fondées sur les preuves. Selon une étude de plus de 1 000 visites enregistrées sur cassette audio, incluant 124 médecins, les patients participaient aux décisions médicales dans seulement 9 % des cas.17

Alors que la moitié des patients interrogés préféraient laisser la décision finale à leur médecin, 96 % souhaitaient se voir offrir des choix et être interrogés sur leur opinion.18 Les patients sont plus susceptibles d'être des participants actifs à leur prise en charge lorsque leur médecin encourage cette participation.19

La relation participative entre le patient et le médecin est l'un des facteurs les plus favorisants de comportements sains.20,21 Dans une étude de 752 patients d'origines ethniques diverses, l'apport d'informations et la prise de décision participative étaient associés à une meilleure observance des traitements, du régime diététique et de l'exercice.22 Dans une étude d'intervention, les patients incités à participer plus activement à la visite clinique présentaient une réduction des taux moyens de HbA1c, qui passaient de 10,6 % à 9,1 %, tandis que ceux des témoins augmentaient de 10,3 % à 10,6 % (p < 0,01).23 Pour les patients diabétiques, des associations significatives sont observées entre la diffusion d'informations, la prise de décision participative, les comportements plus sains et l'amélioration des résultats.24-26 La relation participative entre le patient et le médecin se révèle le facteur le plus favorisant de l'observance thérapeutique. Plus la participation du patient est active, plus le niveau d'observance est élevé, et plus grandes sont les chances de voir le patient s'engager dans des comportements sains en termes de régime et d'exercice physique.11,27,28

Monsieur P. était apparemment en désaccord avec certaines décisions cliniques prises par le Dr Z., même si ces décisions étaient fondées sur les preuves. Monsieur P. a clairement déclaré que « L'un de [ses] objectifs est de [se] débarrasser de toutes [ses] pilules. » Il comprenait qu'il avait besoin des pilules, mais il n'en voulait pas; en conséquence, il ne les prenait pas régulièrement.

Pourquoi la médecine factuelle n'est-elle pas systématiquement intégrée dans la vie des patients?

Aux États-Unis, entre 62 % et 65 % des patients avec hypertension, hypercholestérolémie, et diabète ont un mauvais contrôle de ces désordres.4-6 S'agit-il d'un problème lié au patient, au médecin, ou au système de soins ? Ce problème ne peut pas être corrigé dans l'ignorance.

Le mauvais contrôle de la maladie ne peut pas être attribué aux patients si les médecins omettent - comme le suggère la précédente discussion - d'appliquer la médecine factuelle à chaque consultation de chaque patient,7 de diffuser les informations d'une manière compréhensible pour les patients,10-15 et de prendre les décisions en collaboration avec ceux qui préfèrent cette forme de prise de décision.17,19 S'il ne s'agit pas d'un problème lié au patient, ces défaillances sont-elles dues au médecin ou au système? De nombreux cliniciens travaillent dans une atmosphère d'urgence, saturée de demandes simultanées; plus le nombre de ces demandes est important dans les consultations des patients diabétiques, plus le contrôle glycémique est mauvais.29 Il est probable que ces problèmes liés au système soient des facteurs contributifs fréquents du mauvais contrôle de la maladie.

Les médecins peuvent ne pas utiliser les recommandations basées sur les preuves à chaque visite pour chaque patient,7 ne pas fournir les informations adéquates aux patients,10,15 et ne pas engager une prise de décision participative17,19 par manque de temps. Mme P. a confirmé que le manque de temps était un facteur intervenant dans la prise en charge de son mari: «...on attend parfois 45 minutes pour ne rester que 10 minutes dans le cabinet. » La durée moyenne d'une consultation de soins primaires par patient établi est de 16 à 18 minutes,30-32 et les tâches que ces médecins doivent accomplir ne cessent de croître. Ainsi, la prise en charge du diabète est aujourd'hui bien plus complexe et plus longue qu'il y a dix ans.33 Il a été estimé qu'un médecin aurait besoin de 7,4 heures par jour travaillé pour fournir tous les soins préventifs recommandés à un panel de patient typique,34 et 10,6 heures additionnelles par jour pour dispenser des soins chroniques de qualité élevée.35 Wagner a introduit le concept de « tyrannie de l'urgence ». Dans les visites comportant des problèmes multiples, les problèmes aigus supplantent la gestion des soins chroniques.36 Dans le cadre d'une consultation standard, l'administration systématique de soins conformes aux recommandations est hors de portée de la plupart des médecins de soins primaires.

En Angleterre, les centres de soins primaires avec des temps de consultation plus longs avaient des scores significativement meilleurs sur les indicateurs de qualité pour le diabète, l'asthme, et les coronaropathies, que ceux aux temps de consultation plus courts.37,38 Aux États-Unis, les consultation de soins primaires plus courtes dispensent moins de services préventifs et d'éducation sanitaire, et ont des scores inférieurs sur les critères relatifs à la satisfaction des patients et à la relation médecin-patient.39,40

Les médecins britanniques ne passent pas nécessairement plus de temps avec leurs patients (en moyenne 5-9 minutes prévues) que les médecins américains (10-20 minutes),40 mais les cabinets britanniques emploient des infirmières pour effectuer les activités de soins préventifs et chroniques, de nombreuses visites ne concernent que des renouvellements d'ordonnance, et les patients plus gravement malades peuvent être soignés à domicile. Deux études indépendantes ont trouvé que les patients sont moins actifs dans la recherche d'information lors des consultations durant moins de 18 minutes.41,42 La longueur de la consultation en cabinet est un facteur prédictif majeur de la participation du patient à la prise de décision clinique43; selon une étude, les visites doivent durer au moins 20 minutes pour impliquer effectivement les patients dans les décisions.44

En résumé, la consultation de 15 à 18 minutes et le manque subséquent de participation et d'éducation du patient pourraient constituer des raisons essentielles expliquant le mauvais contrôle de la maladie chez plus de 60 % des patients avec hypertension, hypercholestérolémie et diabète.

Intégration de la médecine factuelle dans la vie des patients

Un nouveau paradigme de soins des patients avec pathologies chroniques et facteurs de risque a fait l'objet d'un large consensus dans des établissements de santé des États-Unis et de nombreux autres pays: le modèle de soins chroniques.45 Ce modèle met en lumière le fait que les soins chroniques de qualité nécessitent une « équipe soignante préparée et proactive interagissant avec un patient motivé et informé. »

Le modèle de soins chroniques professe que dans ce contexte, l'une des tâches fondamentales de l'équipe soignante est le soutien à l'autogestion - ce que les professionnels de santé font pour aider et encourager les patients à devenir informés et motivés.46 L'Institute of Medicine définit le soutien à l'autogestion par « l'administration systématique d'interventions éducationnelle et de soutien pour renforcer les aptitudes des patients et leur confiance dans la gestion de leurs problèmes de santé, incluant une évaluation régulière des progrès et des problèmes, l'établissement d'objectifs, et le soutien à la résolution des problèmes.»47

Dans le soutien à l'autogestion, j'inclurais un certain nombre d'activités requérant d'une équipe qu'elle

- diffuse des informations,

- enseigne les savoirs spécifiques à la maladie,

- négocie une modification saine du comportement,

- renforce l'aptitude à résoudre les problèmes,

- apporte un soutien dans l'impact émotionnel lié à la maladie chronique,

- assure un suivi régulier et soutenu,

- encourage la participation active dans la prise en charge de la maladie.

Alors que ce modèle est axé sur le patient informé et motivé, la femme informée et motivée de Monsieur P. nous rappelle que pour de nombreux patients, la gestion des soins chroniques devrait être axée sur la famille informée et motivée. Monsieur P., qui posait rarement des questions à son médecin et qui, la plupart du temps, plaçait ses soins médicaux au bas de son échelle des priorités, se révélait être un patient passif et non informé. Cependant, il est devenu fortement actif et accompli dans la gestion de sa maladie par le biais de son programme d'exercice à la gym; pendant cette période, il a pu perdre énormément de poids et contrôler ses multiples facteurs de risque. Plus récemment, il a été confronté à un sérieux obstacle: sa douleur invalidante à la hanche. Les patients diabétiques qui ont une douleur chronique présentent plus de difficultés à suivre un régime diététique, à s'impliquer dans une activité physique, et à prendre régulièrement leurs médicaments.48 Ils peuvent en outre souffrir de dépression; les patients comme Monsieur P., qui ont perdu toute motivation, doivent être évalués pour rechercher une dépression potentielle.

Comme le démontre le cas de Monsieur P., même si l'apport d'informations est optimal, comme c'est vraisemblablement le cas pour lui, il est insuffisant pour améliorer les résultats. Une revue sur l'éducation des patients diabétiques a démontré que dans 33 études sur 46, l'éducation améliorait les connaissances des patients sur leur maladie, mais elle n'améliorait effectivement le contrôle glycémique que dans 18 études sur 54.21 Seize études contrôlées randomisées sur l'éducation des patients sur l'hypertension ont trouvé que l'éducation seule n'est pas associée à des réduction de la pression artérielle.49 Une revue de 12 études sur l'asthme a conclu que l'éducation des patients seule n'améliorait pas les symptômes associés à l'asthme, pas plus qu'elle ne réduisait les visites aux urgences liées à cette maladie.50 L'éducation en elle-même n'augmente pas non plus le degré d'observance des patients aux médicaments prescrits.51

L'enseignement des savoirs spécifiques à la maladie pourrait être la composante la plus importante du soutien à l'autogestion. Ainsi, la surveillance à domicile de la glycémie ne semble pas en soi améliorer le contrôle glycémique chez les patients avec un diabète de type 2 sous traitement oral, et son efficacité est contestable chez ceux traités par insuline.52 Il n'est pas suffisant de mesurer, enregistrer et noter sa glycémie: il est nécessaire de comprendre le sens de ses valeurs et la manière d'ajuster le régime, l'exercice physique ou les doses thérapeutiques en fonction de ces valeurs. Les patients avec un diabète de type 2 qui apprennent à autoréguler leurs doses d'insuline sur la base des taux de glycémie à domicile ont un meilleur contrôle glycémique que ceux qui ne le font pas.53

L'adoption d'un comportement sain est une activité de soutien à l'autogestion toujours dépourvue de données concluantes. Certaines données de la littérature suggèrent un bénéfice si les patients choisissent un objectif et acceptent un plan d'action concret tendant vers cet objectif.54 Une revue de 92 études sur les comportements diététiques a conclu que l'établissement d'objectifs ou la planification d'action étaient associés à une consommation inférieure de graisses et supérieure de fruits et légumes.55 Une revue indépendante a trouvé 32 % de 28 études en faveur de l'établissement d'objectifs ou de la planification d'action pour l'adoption d'un régime et d'une activité physique.56 Les American Diabetes Association, American Association of Diabetes Educators, et American Heart Association recommandent l'établissement d'objectifs comme un élément contribuant à la réduction du risque cardiovasculaire.

Un suivi soutenu et régulier des comportements relatifs au mode de vie et au traitement est nécessaire dans le soutien à l'autogestion. Les patients diabétiques qui bénéficient d'un suivi régulier ont des taux de HbA1c plus favorables que ceux qui en sont dépourvus.57 Les bénéfices du soutien à l'autogestion pour les patients diabétiques diminuent au fil du temps en l'absence de suivi régulier, et le temps total consacré aux patients par les soignants est corrélé au contrôle glycémique.58 De même, le suivi régulier est nécessaire pour la prise en charge de l'hypertension,49 et des revues d'études sur des insuffisants cardiaques sortis de l'hôpital révèlent que le suivi effectué par des infirmières est associé à d'importantes réductions des réadmissions pour insuffisance cardiaque et, dans certains cas, à des réductions de la mortalité.59,60

La continuité des soins et la confiance accordée au médecin sont également des facteurs essentiels dans le soutien à l'autogestion. Une revue de 41 articles examinant l'association entre la continuité des soins et 81 critères de soins (incluant les critères de soins préventifs et chroniques, les taux d'hospitalisation, et la qualité de la relation médecin-patient) a trouvé que la continuité était associée à une amélioration des résultats dans 51 des 81 critères.61 La confiance accordée au médecin par le patient a été associée à une amélioration de l'observance au traitement, à des comportements plus favorables à la santé, et à une continuité des soins.62

Comment les consultations de soins primaires peuvent-elles dispenser un soutien à l'autogestion?

Si les soins primaires sont réellement axés sur une consultation de 15 à 18 minutes, comment est-il possible d'administrer les composantes du soutien à l'autogestion qui nécessitent du temps, notamment le suivi régulier et soutenu? Des visites supplémentaires avec des éducateurs sanitaires, des thérapeutes du comportement, et des pharmaciens pourraient certainement apporter une contribution. Cependant, comme l'a noté Monsieur P., de nombreux patients n'aiment pas rechercher des soins médicaux, tant parce qu'ils ont d'autres priorités dans la vie que parce que la plupart ne souhaitent pas passer leurs jours à recevoir des soins. Le meilleur moment pour aborder les patients est celui de leur consultation clinique régulière, en transformant la consultation de 15 minutes en une rencontre plus longue, afin de permettre aux patients comme Monsieur P. de bénéficier en même temps d'un soutien à l'autogestion, comme en un « point multiservices ».

Les équipes des centres de soins primaires plus importants comprennent généralement plusieurs professionnels de santé, notamment des infirmières, des éducateurs sanitaires, des pharmaciens, des travailleurs sociaux, des assistants médicaux, ainsi que des réceptionnistes. Le « tandem » est un sous-groupe de cette grande équipe. Il se compose d'un clinicien et d'une autre personne. L'autre personne serait idéalement une infirmière ou un éducateur sanitaire, mais dans la plupart des centres de soins primaires, l'autre moitié du tandem est plus susceptible d'être un assistant médical. Pour mener le soutien à l'autogestion, l'assistant médical nécessiterait une formation complémentaire portant sur l'enseignement des connaissances spécifiques à la maladie, sur le travail avec les patients sur les objectifs comportementaux et les plans d'action, et sur la réalisation d'un suivi régulier par téléphone ou par voie électronique.

Dans ce modèle, la consultation de 15 minutes avec le médecin serait prolongée par une rencontre post-consultation, lors de laquelle l'assistant médical passerait du temps avec le patient. À cette occasion, l'assistant médical entraîné s'assurerait que le patient a compris tout ce qui s'est passé pendant la consultation, l'éduquerait et complèterait ses connaissances spécifiques à la maladie, et engagerait le patient dans l'établissement d'objectifs comportementaux et dans des plans d'action. Entre les visites, l'assistant médical effectuerait des suivis par téléphone ou par voie électronique pour vérifier l'adhésion du patient aux objectifs comportementaux et au traitement. Certains centres de soins primaires américains ont institué certains éléments de ce modèle, bien qu'aucune étude n'ait encore été effectuée pour évaluer son efficacité; la généralisation de son adoption nécessiterait en outre une réforme du paiement des soins primaires afin de rembourser les activités de soutien à l'autogestion.63

Monsieur P. était-il un patient non observant?

À la question « Pourquoi un si grand nombre de vos patients hypertendus sont-ils mal contrôlés? », la moyenne de la communauté des médecins répond « Parce qu'ils sont non observants. »11 Si l'on pose la même question à un médecin universitaire, la réponse typique est « qu'ils sont non adhérents. » En fait, la définition de l'observance et de l'adhérence est la même,64,65 et ces deux concepts peuvent être contreproductifs.66 Les patients sont-ils non observants s'ils figurent parmi les 50 % qui ne comprennent pas ce qui s'est passé pendant la consultation? 13 Les patients sont-ils non observants s'ils ne sont pas impliqués dans les décisions relatives à leur prise en charge 16 et s'ils sont potentiellement en désaccord avec la prescription du médecin? Enfin, les patients sont-ils non adhérents à un programme d'exercice s'ils vivent dans un quartier présentant un taux d'homicide élevé, dépourvu d'infrastructures sportives?

Une approche valable consisterait à simplement constater que « Ce patient ne prend pas ses médicaments », et d'en rechercher les raisons. Est-ce une question de coût, de mésentente sur le traitement (le patient ne comprenant pas comment le médicament doit être pris15), d'effets indésirables, de manque de croyance que le médicament améliorera sa vie, ou du nombre excessif de pilules aux schémas d'administration complexes? Il est plus judicieux de résoudre le problème par des recherches plutôt qu'en apposant l'étiquette de non-observance.

La médecine factuelle s'accordait mal avec les objectifs de vie de Monsieur P. Il travaillait dur, aimait la vie, aimait manger, et détestait ses pilules. Pendant la plus grande partie de sa vie, il a choisi d'être un patient passif et non informé. Si son équipe soignante (1) s'était assurée qu'il comprenait les meilleures données de la science concernant la prise en charge de sa maladie et (2) avait travaillé en collaboration avec lui pour rechercher un terrain d'entente sur la manière d'équilibrer ses objectifs de vie avec les objectifs cliniques, alors la défaillance de Monsieur P. à intégrer les données de la science dans sa vie aurait relevé de sa responsabilité, de son choix. La plupart des cliniciens qualifieraient Monsieur P. de non-observant; l'autre solution consisterait à dire que ses priorités et la manière dont il a choisi de passer son temps diffèrent des objectifs de ses soignants. Pour Monsieur P., comme pour de nombreux patients diabétiques, le traitement de ses problèmes de santé pouvait nécessiter deux ou trois heures par jour.67 Le soutien à l'autogestion (diffusion d'informations, éducation, négociation de plans d'action pour encourager une modification du comportement réalisable, aide à la résolution des problèmes, traitement de la charge émotionnelle due à la maladie chronique, et administration d'un suivi régulier) aide et encourage les patients à faire converger les priorités de leur vie vers les objectifs de leur médecin. Cela fonctionne parfois, et d'autre fois non.

Ce qui est très étonnant dans le cas de Monsieur P., c'est que pour une quelconque raison, il s'est temporairement transformé d'un patient non informé et passif en un patient actif, lorsqu'il a embrassé l'activité physique en se mettant à la gymnastique; ce faisant, il a intégré la médecine factuelle dans sa vie et a amélioré son poids, sa pression artérielle, ainsi que ses taux de HbA1c et de cholestérol. L'histoire de Monsieur P. illustre le fait que le patient actif est un facteur majeur dans l'évolution des maladies chroniques. Déterminer ce qui l'a aidé à se motiver et essayer de le reproduire pourrait l'aider à retrouver une impression de contrôle sur sa maladie.


CONCLUSION

De nombreux patients n'obtiennent pas un contrôle adéquat de leurs facteurs de risque cardiovasculaires, notamment parce que les systèmes de soins dans lesquels une majorité de médecins exerce ne leur permettent pas de bénéficier du temps nécessaire pour pratiquer une médecine factuelle à chaque consultation et pour chaque patient, pour veiller à ce que les patients comprennent les données, et pour les aider et les encourager à les intégrer dans leur vie. Afin de remédier à cette situation, les centres de soins primaires doivent être rendus responsables de l'accomplissement de ces activités, et être remboursés adéquatement afin de pouvoir mettre en place des équipes soignantes à même de collaborer avec les médecins dans l'acquittement de cette charge.


QUESTIONS ET COMMENTAIRES

DR DELBANCO: Pensez-vous que dans le futur, les ordinateurs pourraient être des membres de ces « tandems » et occuper une fonction quelconque? Qui va payer les acteurs des tandems? Devrions-nous recueillir ces fonds auprès des cardiologues, des gastroentérologues, ou auprès du Président Bush? Vous allez me dire qu'il n'y a pas de coût additionnel, mais permettez-moi d'en douter.

DR BODENHEIMER: Il y a beaucoup d'obstacles à la mise en place des tandems. L'un d'eux réside dans le fait qu'elle implique une modification de la description des professions, ce qui n'est pas simple. Elle implique des formations. Cependant, la raison pour laquelle ce projet de tandem n'est pas seulement une création de mon imagination, c'est que certaines personnes fonctionnent déjà dans une large mesure de cette manière.

Le système de soins de l'université de l'Utah, qui a recours à des assistants médicaux dans une fonction étendue, en constitue un exemple intéressant. Une autre organisation qui a en grande partie adopté ce type de restructuration de soins primaires est le Health Partners Medical Group dans le Minnesota. En fait, ils effectuent des préconsultations, des consultations, des suivis post-consultation, et des soins entre les visites.63

En ce qui concerne les coûts de ce modèle, je vais vous donner l'exemple du Neighborhood Healthcare, qui est un centre de santé communautaire de San Diego. En tant que centre médical agréé par l'État, il bénéficie d'un taux majoré pour les patients bénéficiaires du Medicaid. Selon le directeur médical, qui possède également un MBA (maîtrise en administration des affaires), si chaque médecin voit 1 patient Medicaid supplémentaire par jour à ce taux de paiement majoré, cela rembourserait les assistants médicaux supplémentaires nécessaires.63 Chaque centre de soins primaires doit étudier s'il y a matière à établir un modèle de type tandem; certains le pensent. Cependant, le problème est complexe. C'est un énorme défi.

Je pense que les ordinateurs pourraient effectuer certaines fonctions du soutien à l'autogestion dans de nombreuses situations. Probablement 50 % des visites aux médecins ne sont pas nécessaires. Elles sont inutiles pour le patient comme pour le médecin, et pourraient être effectuées par la voie électronique - qui est beaucoup plus rapide, beaucoup plus pratique pour le patient, et plus brève pour le médecin. Une grande partie du soutien à l'autogestion et du travail de suivi peut être effectuée par ordinateur. Mais certaines personnes ont réellement besoin d'une interaction en face à face. C'est certainement nécessaire parfois. Certaines personnes sont cependant très à l'aise pour faire les choses par ordinateur.

QUESTION: Votre modèle d'autogestion et de motivation du patient fonctionne-t-il sur l'ensemble du spectre des savoirs et de l'éducation des patients?

DR BODENHEIMER: Nous avons effectué une petite étude sur des plans d'action relatifs au changement de comportement dans 4 consultations d'hôpitaux publics et 4 cabinets privés.54 Nous avons appelé les patients une fois qu'ils ont élaboré des plans d'action avec leur médecin. Dans la mesure où les données étaient auto-rapportées, il ne s'agit pas d'une étude de référence. Le pourcentage de personnes parvenant à une réelle modification du comportement, sur la base d'un plan d'action élaboré en concertation avec leur médecin, était identique dans les hôpitaux publics et les cabinets privés. On pense toujours que les personnes de bas statut socioéconomique, avec un niveau inférieur de connaissances médicales, ne peuvent pas faire ce genre de choses. Mais elles le peuvent.

QUESTION: La discontinuité des soins perturbe les relations. Comment gérez-vous cela?

DR BODENHEIMER: Le problème de la continuité des soins, surtout dans un service universitaire, réside dans le fait que les médecins sont là un jour et sont ailleurs le lendemain. Pourrait-on créer une continuité avec un tandem que les patients considéreraient comme le pourvoyeur de cette continuité? Cela dépend beaucoup de la fonction de l'autre membre du tandem. Si c'est une infirmière, c'est parfait. Mais la plupart des centres de soins primaires ne peuvent s'offrir des infirmières, alors nous essayons différents membres du personnel soignant.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Thomas Bodenheimer, MD, Bldg 80-83, San Francisco General Hospital, 1001 Potrero Ave, San Francisco, CA 94110 (tbodenheimer{at}fcm.ucsf.edu).

Cette conférence a eu lieu lors des « Medicine Grand Rounds » du Beth Israel Deaconess Medical Center, Boston, Massachusetts, le 1er mars 2007.

Rencontres Cliniques du Beth Israel Deaconess Medical Center est produit et publié par Risa B. Burns, MD, Eileen E. Reynolds, MD, et Amy N. Ship, MD. Tom Delbanco, MD, est le rédacteur en chef de la série.

Rédacteur en chef de la section Rencontres Cliniques: Margaret A. Winker, MD, Rédactrice en chef adjoint.

Liens financiers: Aucun déclaré.

Financement/Soutien: Les Rencontres Cliniques ont été rendues possibles en partie grâce à une bourse de la Florence and Richard Koplow Charitable Foundation.

Rôle du sponsor: L'organisation ayant finance n'a pas participé au recueil, à l'analyse et à l'interprétation des données ni à la préparation, la revue ou l'approbation du manuscrit.

Autres contributions: Nous remercions le patient et sa femme pour avoir partagé leur histoire avec nous.

Affiliation de l'auteur: Le Dr Bodenheimer est professeur de médecine familiale et communautaire à l'Université de Californie, San Francisco.


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