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  Vol. 296 No. 10, 13 Septembre 2006 TABLE OF CONTENTS
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Prescription différée pour le traitement de l'otite moyenne aiguë

Une étude contrôlée randomisée

David M. Spiro, MD, MPH; Khoon-Yen Tay, MD; Donald H. Arnold, MD, MPH; James D. Dziura, PhD; Mark D. Baker, MD; Eugene D. Shapiro, MD


RÉSUMÉ

Contexte L'otite moyenne aiguë (OMA) est la première cause de prescription antibiotique chez l'enfant. Les précédentes études ayant évalué une prescription antibiotique différée, pour laquelle il était demandé aux parents de n'utiliser l'ordonnance qu'en l'absence d'amélioration ou en cas d'aggravation dans les 48 heures, excluaient les enfants avec OMA de forme sévère. Aucune de ces études n'a été menée dans un service d'urgences.

Objectifs Déterminer si le traitement de l'OMA par antibiothérapie différée réduit significativement l'utilisation d'antibiotiques comparé à une prescription classique, et évaluer les effets de cette intervention sur les symptômes cliniques et les événements indésirables liés aux antibiotiques.

Schéma, cadre et patients Étude contrôlée randomisée menée entre le 12 juillet 2004 et le 11 juillet 2005. Des enfants avec OMA, âgés de 6 mois à 12 ans, reçus dans un service d'urgences, ont été randomisés pour recevoir une prescription différée ou une prescription classique. Tous les patients ont reçu de l'ibuprofène et des gouttes auriculaires analgésiques à utiliser chez eux. Un assistant de recherche clinique, aveugle à l'assignation, a effectué des entretiens téléphoniques structurés 4 à 6 jours, 11 à 14 jours, et 30 à 40 jours après l'inclusion pour évaluer les résultats cliniques.

Principaux critères d'évaluation Exécution de la prescription antibiotique et évolution clinique.

Résultats Dans l'ensemble, 283 patients ont été randomisés dans le groupe de prescription différée (n = 138) ou dans le groupe de prescription classique (n = 145). Un nombre significativement supérieur de patients du groupe de prescription différée n'a pas exécuté la prescription antibiotique (62 % vs 13 %; p < 0,001). Aucune différence intergroupe statistiquement significative n'a été observée dans la fréquence de fièvre, d'otalgie, ou de consultations médicales non prévues. Dans le groupe de prescription différée, la fièvre (risque relatif [RR] 2,95; intervalle de confiance ([IC] à 95 %, 1,75-4,99; p < 0,001) et l'otalgie (RR, 1,62; IC 95 %, 1,26-2,03; p < 0,001) étaient toutes deux associées à l'exécution de la prescription.

Conclusion La méthode d'antibiothérapie différée a substantiellement réduit l'utilisation superflue d'antibiotiques chez des enfants avec OMA consultant dans un service d'urgences. Elle pourrait donc constituer une alternative à l'utilisation systématique d'antibactériens dans le traitement de cette population.

JAMA. 2006;296:1235-1241.


L'otite moyenne aiguë (OMA) est la cause la plus fréquente de prescription antibiotique chez l'enfant.1,2 Le traitement de l'OMA représente un nombre estimé de 15 millions de prescriptions antibiotiques rédigées chaque année aux États-Unis.3 L'OMA non traitée a un taux élevé de résolution spontanée, avec des taux similaires de complications lorsque les antibiotiques sont prescrits ou différés.4-7 La résistance aux antibiotiques est un problème de santé publique majeur dans le monde, qui est associé à leur utilisation très répandue.8-10

Deux études randomisées ont évalué une méthode de prise en charge de l'OMA avec usage facultatif d'antibiotique.11,12 L'une de ces études évaluait spécifiquement les enfants avec OMA non sévère;11 l'autre excluait les enfants avec forte fièvre et prescrivait des doses d'antibiotique sous-optimales comparé à celles actuellement pratiquées aux États-Unis.12 Ces deux études ont utilisé des échantillons de convenance et ont été effectuées en cabinets privés où les parents connaissaient le clinicien; aucune ne prescrivait d'antalgique local pour le traitement de l'otalgie.

Nous avons effectué une étude contrôlée randomisée avec une série consécutive d'enfants recevant un diagnostic d'OMA dans un service d'urgences pédiatriques, sur une période d'un an, en utilisant des recommandations diagnostiques basées sur les preuves.13 Les objectifs de cette étude étaient de déterminer si le traitement de l'OMA par prescription différée réduisait significativement l'usage d'antibiotique comparé à une prescription classique dans ce contexte, et d'évaluer les effets de cette intervention sur les symptômes cliniques et les événements indésirables liés aux antibiotiques.


MÉTHODES

Patients

Les participants ont été recrutés du 12 juillet 2004 au 11 juillet 2005, dans un échantillon consécutif d'enfants avec un diagnostic d'OMA, reçus au service des urgences pédiatriques du Yale-New Haven Hospital de New Haven (Connecticut). Tous les médecins traitants du service ont accepté de recruter des patients pour l'étude.

Les enfants âgés de 6 mois à 12 ans qui recevaient un diagnostic d'OMA étaient éligibles pour cette étude. Afin de reproduire la pratique clinique courante, le diagnostic d'OMA était posé selon la décision du clinicien. Les recommandations basées sur les preuves les plus récentes pour le diagnostic d'OMA ont été revues individuellement avec tous les cliniciens; ces critères diagnostiques ont ensuite été affichés dans le service des urgences pédiatriques pendant toute la durée de l'étude.13 Les enfants étaient exclus en présence de l'un des critères suivants: (1) une infection bactérienne intercurrente additionnelle, comme la pneumonie, était diagnostiquée ou suspectée; (2) le patient semblait « en état d'infection toxique » selon l'avis du médecin; (3) le patient était hospitalisé; (4) le patient était immunodéprimé; (5) le patient avait été traité par antibiotique au cours des 7 jours précédents; (6) le patient avait eu une myringotomie ou présentait une perforation tympanique; (7) l'accès aux soins médicaux était incertain, et l'accès au téléphone inexistant; (8) la langue maternelle du parent ou du tuteur n'était ni l'anglais ni l'espagnol; ou (9) le patient avait déjà été recruté. L'étude a été approuvée par le comité d'éthique de l'université Yale.

Évaluation initiale

Les parents des enfants ayant reçu un diagnostic d'OMA ont été invités à participer à l'étude. Après obtention du consentement éclairé écrit, il était demandé au parent (ou au tuteur) de remplir un questionnaire relatif aux symptômes associés et de désigner l'adulte qui serait « le plus susceptible de décider d'exécuter ou non la prescription ». Les cliniciens ont classifié la race/ethnicité des participants dans les catégories Afro-Américain, Caucasien, Hispanique, ou autre. La race et l'ethnicité étaient déterminées pour décrire la population, qui était plus hétérogène que dans les études précédentes.

Randomisation

Des dossiers numérotés contenant les formulaires d'inclusion, une feuille d'ordonnance unique, et des instructions de sortie ont été utilisés séquentiellement pour les patients recrutés dans l'étude. L'attribution d'une prescription différée ou classique était déterminée par randomisation assistée par ordinateur (True Epistat, Version 5.3; Epistat Services, Richardson, Texas). Les instructions de sortie des prescriptions différées et classiques étaient mises sous enveloppes scellées opaques, elles-mêmes placées dans des dossiers numérotés, assignés aléatoirement. La désignation du groupe n'était révélée au clinicien et au parent qu'après l'inclusion, par ouverture des enveloppes dans l'ordre successif des dossiers.

Intervention

Tous les participants ont reçu une prescription écrite d'antibiotique, choisi et dosé par le clinicien. La prescription devait expirer (ne pouvait plus être exécutée) 3 jours après la visite de l'enfant au service des urgences. Les participants randomisés dans le groupe de prescription différée ont reçu des instructions écrites et orales pour « ne pas exécuter la prescription antibiotique, sauf en l'absence d'amélioration de l'état de l'enfant ou en cas d'aggravation, 48 heures (2 jours) après la visite du jour ». Les parents des enfants randomisés dans le groupe de prescription classique ont reçu des instructions écrites et orales du clinicien pour « exécuter la prescription et administrer les antibiotiques à l'enfant après la visite du jour ». Tous les participants ont également reçu des flacons d'ibuprofène en suspension (100 mg/5 ml) et des gouttes auriculaires analgésiques (chaque millilitre contenant 54 mg d'antipyrétique/14 mg de benzocaïne). Le traitement de la douleur associée à l'OMA est préconisé dans les recommandations actuelles,13 et l'utilisation de gouttes auriculaires est le traitement de référence dans ce service d'urgences. Les instructions relatives à l'utilisation de l'ibuprofène (10 mg/kg par dose toutes les 4-6 heures en fonction de la douleur ou de la fièvre) et des gouttes auriculaires (4 gouttes dans l'oreille affectée toutes les 2 heures en fonction de la douleur) étaient inscrites sur les formulaires de sortie et ont été revues oralement avec chaque parent. Un compte rendu de visite a été adressé par fax aux médecins en soins primaires, qui devaient être contactés par les participants en cas de persistance ou d'aggravation des symptômes. Les données démographiques des enfants qui ont été exclus, de ceux qui étaient éligibles mais dont les parents ont refusé de participer, et de ceux qui n'ont pas été inclus par décision du clinicien, ont été classifiées sans identificateur individuel.

Résultats

Deux assistants de recherche expérimentés, aveugles à l'assignation, ont effectué des entretiens téléphoniques structurés et standardisés avec le parent ou le tuteur, 4 à 6 jours, 11 à 14 jours, et 30 à 40 jours après l'inclusion. Les parents indisponibles dans le délai spécifié étaient interrogés à la période d'évaluation suivante.

Le critère d'évaluation primaire était la proportion de chaque groupe à exécuter la prescription antibiotique. Il était défini par l'exécution de la prescription par un parent dans les 3 jours du recrutement, et était déterminé par la réponse à cette question à l'entretien de 4-6 jours. Les critères d'évaluation secondaires incluaient l'évolution clinique de la maladie, les effets indésirables des traitements, le nombre de jours d'absence à l'école ou au travail, les consultations non prévues, et l'aisance des parents face à la prise en charge de l'OMA sans antibiotique pour les épisodes futurs. Pour le suivi de 30-40 jours, seuls les deux derniers critères étaient évalués. Après le 1er mars 2005, au moment de l'inclusion, il a été demandé à tous les parents d'indiquer le nom et l'adresse de la pharmacie où ils iraient présenter la prescription. Quatre jours minimum après l'inclusion, l'assistant de recherche a appelé ces pharmacies pour vérifier si la prescription avait été ou non exécutée.

Taille de l'échantillon et analyse statistique

Pour détecter une différence d'au moins 15 % dans l'absence d'otalgie au suivi de 4-6 jours (prescription classique = 85 %; prescription différée = 70 %), avec un risque d'erreur {alpha} bilatéral de 5 % et une puissance statistique de 90 %, chaque groupe devait avoir un minimum de 120 patients, selon les résultats de 2 études précédentes (Power and Precision, version 2.0.37, Biostat Inc, Englewood, New Jersey).12,14 Nous avons sélectionné cette variable parce que la taille d'échantillon nécessaire pour notre critère primaire aurait induit un manque de puissance pour des critères secondaires comme l'otalgie. La taille d'échantillon calculée fournissait une puissance plus que suffisante (> 90 %) pour détecter une différence intergroupe aussi faible que 10 % dans les proportions de prescriptions exécutées.

Les tests {chi}2 et de Student ont été utilisés pour les comparaisons simples des différences intergroupes dans les variables catégoriques et continues respectivement. Les différences dans les moyennes et les risques relatifs sont présentées avec des intervalles de confiance (IC) à 95 % pour résumer les comparaisons intergroupes. Une régression logistique a été utilisée pour évaluer les critères dichotomiques, avec ajustement pour la race/ethnicité, le statut d'assurance maladie, et les symptômes initiaux, ainsi que pour identifier les variables associées à l'exécution de la prescription dans le groupe d'antibiothérapie différée. Les risques relatifs ajustés ont été obtenus par régression logistique en utilisant la méthode décrite par Zhang et Yu.15 Pour tous les tests de signification, une valeur de p bilatérale < 0,05 était considérée comme statistiquement significative. Les analyses ont été réalisées avec le logiciel SAS, version 9.1 (SAS Institute Inc, Cary, Caroline du Nord).

L'analyse en intention de traiter primaire incluait tous les patients recrutés. Pour évaluer l'hypothèse implicite de données manquantes au hasard, nous avons effectué une analyse de sensibilité en pire cas, dans laquelle nous avons supposé que les parents de tous les enfants du groupe de prescription différée ayant des données d'évaluation manquantes avaient exécuté la prescription, et que les parents des enfants ayant des données d'évaluation manquantes dans le groupe de prescription classique n'avaient pas exécuté leur prescription.


RÉSULTATS

Participants

Pendant la période de recrutement, 776 patients ont reçu un diagnostic d'OMA (Figure); sur ce total, 283 ont été randomisés, dont 138 dans le groupe de prescription différée (PD) et 145 dans le groupe de prescription classique (PC). Sur les 308 patients n'ayant pas répondu aux critères d'inclusion, 27 % avaient été traités par antibiotique dans les 7 jours précédents, 16 % avaient une perforation tympanique, 19 % étaient suspectés d'avoir une maladie bactérienne intercurrente, 7 % présentaient une apparence infectieuse toxique ou étaient hospitalisés, 4 % avaient eu une myringotomie, et 27 % étaient exclus pour l'un des autres motifs d'exclusion. Les patients ne répondant pas aux critères d'inclusion comparé à tous les patients inclus, étaient plus jeunes (âge médian = 2,3 ans vs 3,2 ans), avec un pourcentage supérieur de Caucasiens (26 % vs 11 %), mais étaient comparables en matière de sexe et de couverture médicale. Cent quatre-vingt-cinq patients ont refusé de participer ou n'ont pas été inclus par décision du médecin traitant. Leur âge, sexe, race/ethnicité et couverture médicale étaient similaires à ceux des patients recrutés.


Figure 1
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Figure.. Recrutement, randomisation, suivi, et analyse des données pour les participants de l'étude.


Pour un petit nombre de patients inclus, variant de 6 à 24 par période de suivi, l'entretien n'a pas été effectué parce que l'assistant de recherche n'a pas pu contacter le parent dans le délai spécifié. Cependant, la grande majorité des patients a effectué au moins 1 entretien de suivi (PD = 98 %; PC = 94 %). Le nombre de parents ayant effectué les entretiens de chaque période de suivi était supérieur dans le groupe de prescription différée. Cependant, cette différence n'était statistiquement significative qu'au suivi de 30 à 40 jours (p = 0,009).

Les variables démographiques et les symptômes initiaux des 2 groupes étaient similaires (Tableau 1). Aucune différence statistiquement significative n'était observée dans le type de soins primaires, le nombre d'enfants vivant dans la maison, ou l'âge moyen du parent ayant effectué les entretiens.


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Tableau 1.. Caractéristiques initiales des participants.


L'otite moyenne aiguë était unilatérale chez 83 % des enfants du groupe de prescription différée et chez 85 % des enfants du groupe de prescription classique (p = 0,68). Dans l'ensemble, 54 % de tous les patients et 51 % des patients de plus de 2 ans ont reçu une prescription pour une cure de 10 jours d'antibiotique. La durée moyenne de l'antibiothérapie prescrite n'était pas significativement différente entre les 2 groupes. L'amoxicilline était prescrite pour la plupart des patients (PD = 91 % vs PC = 93 %; p = 0,91). La majorité des enfants de moins de 2 ans des deux groupes ont reçu une ordonnance d'amoxicilline (80-90 mg/kg par jour), conformément aux recommandations actuelles.13

Critère d'évaluation primaire

Les prescriptions n'ont pas été exécutées pour 62 % et 13 % des patients des groupes PD et PC respectivement (p < 0,001; Tableau 2). L'ajustement sur l'origine ethnique, le statut d'assurance médicale, et les symptômes initiaux n'ont pas fortement modifié les résultats. Pour l'analyse de sensibilité en pire cas, respectivement 59 % et 20 % des parents des groupes PD et PC n'ont pas exécuté la prescription (p < 0,001). Pour les enfants âgés de moins de 2 ans, 47 % des participants n'ont pas exécuté la prescription dans le groupe d'antibiothérapie différée contre 5 % dans le groupe de prescription classique (p < 0,001). La vérification de l'exécution de la prescription a été effectuée pour 28 % de la population étudiée. Sur les déclarations vérifiées, les pharmacies enregistrées à l'inclusion ont confirmé tous les cas où les parents avaient rapporté ne pas avoir exécuté la prescription, et 90 % des cas où les parents avaient rapporté avoir exécuté la prescription.


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Tableau 2.. Résultats cliniques en fonction de l'assignation*


Les patients du groupe PD dont les parents avaient exécuté la prescription ont rapporté qu'ils l'avaient fait pour cause de fièvre (60 %), d'otalgie (34 %), ou d'humeur grincheuse (6 %). Les patients de ce groupe dont les parents avaient exécuté la prescription étaient significativement plus susceptibles de rapporter une oreille douloureuse, de la fièvre ou des diarrhées que ceux dont les parents n'avaient pas exécuté la prescription (Tableau 3). Dans ce même groupe, au suivi de 4 à 6 jours, la fièvre (risque relatif [RR], 2,95; IC 95 %, 1,75-4,99; p < 0,001) et l'otalgie (RR, 1,62; IC 95 %, 1,26-2,03; p < 0,001) étaient associées à l'exécution de la prescription, mais pas le statut d'assurance maladie ni la race/ethnicité.


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Tableau 3.. Résultats cliniques dans le groupe de prescription différée 4 à 6 jours après l'inclusion.


Critères secondaires d'évaluation

Aucun événement indésirable grave n'a été rapporté chez les patients de cette étude. Sur les parents ayant rapporté une otalgie chez leur enfant, il y avait des différences statistiquement significatives mais mineures dans le nombre total de jours d'otalgie entre les groupes PD et PC, et à l'entretien de 4 à 6 jours uniquement (2,4 vs 2,0; p = 0,02) (Tableau 2). Les diarrhées étaient plus fréquemment rapportées dans le groupe de prescription classique, et cette différence était statistiquement significative (8 % vs 23 %; p < 0,001). Il n'y avait pas de différence statistiquement significative dans les fréquences de rash, d'otorrhée, ou de consultations non prévues, entre l'inclusion et les suivis à 4-6 jours et à 11-14 jours. Au suivi de 30-40 jours, les taux de consultation non prévue étaient similaires entre les groupes de prescription différée et classique (22 % vs 21 %; p = 0,85). Pour toutes ces consultations, le diagnostic le plus fréquent était l'otite moyenne (prescription différée = 61 %, prescription classique = 60 %; p = 0,85).

Il n'y avait pas de différence intergroupe statistiquement significative dans la volonté des parents de différer l'antibiothérapie pour les futures OMA. Dans le groupe de prescription différée, aux 3 entretiens, les parents n'ayant pas exécuté la prescription étaient fortement plus susceptibles d'indiquer qu'ils souhaitaient reporter l'antibiothérapie pour de futurs épisodes d'OMA, comparé à ceux ayant exécuté la prescription: suivi de 4-6 jours, 63 % vs 28 % (p < 0,001); suivi de 11-14 jours, 65 % vs 31 % (p < 0,001); suivi de 30-40 jours, 66 % vs 26 % (p < 0,001).


COMMENTAIRES

La prescription différée a réduit de 56 % l'utilisation d'antibiotique chez les enfants âgés de 6 mois à 12 ans avec un diagnostic d'OMA. Nous avons démontré que la prescription différée est une stratégie thérapeutique fructueuse dans l'OMA lorsque les patients n'ont pas une relation établie avec le clinicien. Dans les études ayant évalué une méthode de prescription différée, les parents connaissaient le médecin qui recommandait une prescription différée comme alternative à l'usage immédiat d'antibiotique.12,16,17 Notre étude est la première à recruter des patients dans un service d'urgences.

Nous avons trouvé que les taux d'otalgie n'étaient pas significativement différents entre les groupes, à la période de suivi de 4-6 jours comme à celle de 11-14 jours. Cependant, la moyenne des jours d'otalgie était légèrement supérieure (0,4 jour) dans le groupe de prescription différée au suivi de 4-6 jours, ce qui corrobore de précédentes données rapportant que l'utilisation immédiate d'un antibiotique réduisait la durée de l'otalgie.6,12,17 Cette différence peut avoir été minimisée par l'utilisation d'ibuprofène et d'une solution auriculaire antalgique. Ces médicaments sont efficaces dans le soulagement symptomatique des douleurs et des fièvres,18,19 et sont fortement préconisés dans les dernières recommandations.13 Les méta-analyses ont rapporté un nombre de 15 à 17 enfants avec OMA à traiter pour prévenir 1 cas d'otalgie, 2 à 7 jours après la première admission.5,20 Ce nombre de sujets à traiter est élevé compte tenu des effets indésirables potentiels associés aux antibiotiques. En outre, nous avons trouvé que le traitement antibiotique immédiat de l'OMA induisait des taux de diarrhées 2 à 3 fois supérieurs à ceux observés dans le groupe de prescription différée, ce qui s'accorde avec de précédentes études.7,21

Les patients du groupe de prescription différée dont les parents avaient exécuté la prescription étaient plus susceptibles de rapporter des douleurs auriculaires et des fièvres que ceux dont les parents n'avaient pas exécuté la prescription. Dans de précédentes études, la fièvre et l'otalgie ont été rapportées comme les premiers facteurs influençant la décision des parents dans l'exécution de la prescription antibiotique.12,16,17 Notre intention était de donner aux parents la possibilité d'exécuter la prescription, en se basant soit sur la gravité de la maladie soit sur la durée des symptômes, 48 heures après l'évaluation initiale. Bien que nos méthodes n'aient pas permis d'évaluer spécifiquement les taux de récidive ou de réinfection, la raison la plus fréquente des consultations ultérieures non prévues était l'OMA; cependant, la fréquence de ces visites était similaire dans les 2 groupes au suivi de 30 à 40 jours.

Cette étude présente plusieurs limites. Les parents ne pouvaient pas être aveugles à l'assignation, dans la mesure où le critère d'évaluation primaire était basé sur le choix du traitement effectué par eux. Les médecins recruteurs étaient aveugles à l'assignation jusqu'après l'inclusion du patient, et les enquêteurs étaient aveugles à l'assignation du groupe jusqu'à la fin de la période d'entretien. Le biais de non-réponse est négligeable, dans la mesure où le nombre de parents n'ayant pas répondu aux entretiens était très faible, et où les petites différences dans les taux d'abandons n'étaient pas significatives entre les groupes aux 2 premières périodes d'entretien, lors desquelles la majorité des résultats était déterminée. La plupart des parents disaient la vérité lorsqu'ils rapportaient avoir ou non exécuté la prescription, d'après nos vérifications de leurs déclarations auprès des pharmacies. Nos résultats pourraient ne pas être généralisables à toutes les structures de soins intensifs, du fait que cette étude était monocentrique et limitée à un service d'urgences urbain. Même si nous n'avons pas vérifié individuellement la réponse de chaque participant aux critères diagnostiques d'OMA, il est peu probable que cela ait pu produire un biais, compte tenu du fait que les participants étaient répartis par randomisation dans les groupes de traitement. Nous n'avons pas évalué la sévérité de l'OMA parce que cette procédure ne fait pas partie de la pratique clinique courante. Nous n'avons pas non plus quantifié l'utilisation des gouttes auriculaires analgésiques, ce qui peut avoir induit une sous-estimation de leur usage dans le groupe de prescription différée. Bien que de précédentes recommandations et une méta-analyse aient préconisé une antibiothérapie courte (5-7 jours) dans le traitement de l'OMA chez l'enfant de plus de 2 ans,22,23 la moitié de nos cliniciens prescrivait un traitement long (10 jours) pour cette tranche d'âge. Enfin, cette étude n'était pas assez puissante pour détecter les événements rares. Des études plus grandes pourraient démontrer des différences dans les taux de mastoïdite ou d'autres complications graves de l'OMA, entre les patients avec prescription différée et ceux avec antibiothérapie immédiate. Cependant, la fréquence des mastoïdites aux États-Unis est comparable à celle d'autres pays où les cliniciens ne prescrivent pas systématiquement des antibiotiques pour cette infection.24

Cette étude contrôlée randomisée a démontré que la stratégie de prescription différée réduit significativement l'usage d'antibiotiques dans une population urbaine se présentant dans un service d'urgences, et qu'elle pourrait constituer une alternative au traitement courant de l'OMA par antibiothérapie. Les prescriptions différées restent controversées, dans la mesure où la majorité des pédiatres américains sont formés à prescrire systématiquement des antibiotiques dans cette pathologie, tout en pensant répondre à l'attente de nombreux parents. Une faible minorité de pédiatres adopte l'attentisme en pratique courante.25 La méthode de prescription différée pourrait permettre d'interrompre le cycle formé par la prescription d'antibiotique, l'attente d'une antibiothérapie immédiate exprimée par les parents, et les consultations répétées pour cette infection.26,27 Les risques générés par les antibiotiques, notamment les symptômes gastro-intestinaux, les réactions allergiques, et la résistance accélérée aux pathogènes bactériens,28,29 doivent être mis en balance avec leurs bénéfices dans le cas de cette pathologie, qui est le plus souvent spontanément résolutive.4 L'utilisation systématique de prescriptions différées pour le traitement de l'OMA minimiserait tant les coûts que les effets indésirables associés à l'antibiothérapie, et devrait réduire la pression sélective en faveur d'organismes résistant aux antibactériens communément utilisés.


Informations sur les auteurs

Correspondance: David M. Spiro, MD, MPH, Oregon Health and Science University, Mail Code: CDW-EM, 3181 SW Sam Jackson Park Rd, Portland, OR 97239-3098 (spirod{at}ohsu.edu).

Contributions des auteurs: en tant que principal investigateur de l'étude, le Dr Spiro a eu un accès complet à toutes les données de l'étude et accepte la responsabilité de l'intégrité des données et de l'exactitude de l'analyse des données.

Conception et schéma de l'étude: Spiro, Arnold, Baker, Shapiro.

Receuil des données: Tay.

Analyse et interprétation des données: Spiro, Tay, Dziura, Shapiro.

Rédaction du manuscrit: Spiro, Tay.

Revue critique: Spiro, Tay, Arnold, Dziura, Baker, Shapiro.

Analyse statistique: Spiro, Dziura, Shapiro.

Obtention du financement: Spiro, Dziura, Shapiro.

Aide administrative, technique et matérielle: Tay.

Supervision de l'étude: Spiro, Baker, Shapiro.

Liens financiers: aucun rapporté.

Financement/Soutien: ce travail a bénéficié d'un soutien partiel sous la forme d'une bourse AI01703 du National Institutes of Health, M01-RR00125 du General Clinical Research Center, Yale University School of Medicine, et des Friends of Yale-New Haven Children's Hospital, qui ont fourni le soutien matériel à cette recherche.

Rôle du sponsor: les organisations de financement n'ont joué aucun rôle dans le schéma, la conduite, l'analyse ou l'interprétation de cette recherche ou dans l'un ou l'autre des aspects liés à la préparation ou à l'approbation du manuscrit.

Remerciements: nous remercions John Leventhal, MD, Department of Pediatrics, Yale University School of Medicine, pour la revue soigneuse du manuscript. Le Dr Leventhal n'a reçu aucune compensation pour son assistance.

Affiliations des auteurs: Departments of Pediatrics (Drs Spiro, Tay, Dziura, Baker, et Shapiro), Epidemiology and Public Health (Dr Shapiro), et Medicine (Dr Dziura), Yale University School of Medicine, New Haven, Conn; Departments of Emergency Medicine and Pediatrics, Vanderbilt University School of Medicine, Nashville, Tenn (Dr Arnold). Le Dr Spiro travaille maintenant dans les Departments of Emergency Medicine and Pediatrics, Oregon Health and Science University, Portland.


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ARTICLE EN RAPPORT

Prescription différée – une approche raisonnable dans la prise en charge de l'otite moyenne aiguë
Paul Little
JAMA. 2006;296:1290-1291.
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