Contexte La thrombose veineuse est une complication courante chez
les personnes atteintes d'un cancer. Elle entraîne une morbidité
supplémentaire et compromet la qualité de vie.
Objectif Identifier les patients cancéreux qui ont une
augmentation du risque de thrombose, en évaluant différents
sites tumoraux, la présence de métastases et le portage
éventuel d'une mutation prothrombotique.
Plan expérimental, cadre et patients Vaste étude
cas-témoins (étude MEGA, Multiple Environmental and Genetic
Assessment of risk factors for venous thrombosis) réalisée
aux Pays-Bas dans 6 centres médicaux spécialisés dans
l'anticoagulation: étude de population effectuée sur 3220
patients successifs, âgés de 18 à 70 ans, ayant fait une
première thrombose veineuse profonde des membres inférieurs ou
une embolie pulmonaire entre le 1er mars 1999 et le 31 mai 2002 et
sur 2131 témoins (partenaires des patients). Un questionnaire sur les
facteurs de risque acquis de thrombose veineuse était rempli par les
participants. Trois mois après l'arrêt du traitement
anticoagulant, l'ensemble des patients et des témoins était
interrogé, un prélèvement sanguin était
effectué et l'ADN isolé afin de rechercher les mutations 20210 A
de la prothrombine et facteur V Leiden.
Principal critère de jugement Risque de thrombose
veineuse.
Résultats Le risque global de thrombose veineuse était
multiplié par 7 chez les patients ayant une affection maligne (odds
ratio [OR]: 6,7; intervalle de confiance [IC] à 95 %: 5,2-8,6) par
comparaison avec les personnes n'en ayant pas. C'est chez les patients
atteints d'une hémopathie maligne que le risque de thrombose veineuse
était le plus élevé après ajustement sur
l'âge et le sexe (OR ajusté: 28,0; IC à 95 %: 4,0-199,7),
puis chez ceux atteints d'un cancer du poumon et ceux atteints d'un cancer
gastro-intestinal. Le risque de thrombose veineuse était plus
élevé dans les premiers mois suivant le diagnostic de cancer (OR
ajusté: 53,5; IC à 95 %: 8,6-334,3). Les patients ayant des
métastases avaient un risque plus élevé que ceux qui n'en
avaient pas (OR ajusté: 19,8; IC à 95 %: 2,6-149,1). Les
patients cancéreux porteurs de la mutation facteur V Leiden avaient un
risque multiplié par 12 par rapport aux individus n'ayant ni cancer ni
mutation (OR ajusté: 12,1; IC à 95 %: 1,6-88,1). Des
résultats similaires ont été trouvés par calcul
indirect pour la mutation 20210 A de la prothrombine chez les patients
atteints d'un cancer.
Conclusions Les patients atteints d'un cancer ont un risque
nettement augmenté de thrombose veineuse, particulièrement dans
les premiers mois suivant le diagnostic et lorsqu'ils ont des
métastases. Les porteurs d'une mutation facteur V Leiden ou d'une
mutation 20210 A de la prothrombine semblent avoir un risque encore plus
élevé.
JAMA. 2005;293:715-722.