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  Vol. 297 No. 24, 27 juin 2007 TABLE OF CONTENTS
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Henri Julien Félix Rousseau dit le Douanier Rousseau (21 mai 1844-2 septembre 1910)

Jean Gavaudan, MD

Peintre proche de notre époque contemporaine, on a beaucoup dit et écrit sur Henri Rousseau qui reste le plus célèbre représentant des peintres naïfs.

Famille modeste, commis d'avocat à Angers, engagé presque volontaire dans l'armée (en fait, il avait légèrement pioché dans la caisse de son employeur), il quitte la grande muette en 1868 lors de la mort de son père et part pour Paris. Une vie au début tourmenté, soulignée par le nom de son épouse, Clémence Boitard, comme si ce chemin tortueux de sa jeunesse ne lui avait pas suffi. Sept enfants avec Clémence, un seul vivant à l'âge adulte. Après la guerre de 1870, il devient commis de deuxième classe à l'Octroi de Paris, c'est-à-dire à la douane de la ville de Paris. Barrière d'Octroi qui persistera longtemps entre les villes et qui permettait de taxer les citoyens, la taxe à la valeur ajoutée n'existant pas sous ce nom et la TVA sociale encore moins. Il en tire son surnom, le douanier et pour tous il sera connu comme le douanier Rousseau. Peintre autodidacte et naïf. Un bref passage comme copiste au Louvre qui ne le marque pas dans son œuvre et en 1886, il parvient par absence de jury de sélection à entrer au Salon des Indépendants.

Petit à petit sa notoriété s'accroît et on le voit chaque année au Salon des Indépendants. En 1891, il y expose son premier "tableau de jungle": Surpris! Progression d'un tigre dans une brousse luxuriante. Paysages qu'il affectionnera toute sa vie, luxuriance des paysages, épaisseur des feuillages, secret des bois, cachette dans les feuilles. Lorsque ses personnages émergent, ils sortent d'une grotte de verdure, les animaux passent furtivement, surpris par le regard de l'observateur. Très peu de perspective dans ses tableaux, en fait une technique qu'il ne maîtrise pas, des visages sans expression. On a souvent le sentiment que tout est figé chez Henri Rousseau dans un océan de verdure où le paysage et les objets sont plus vivants que les personnages ou les animaux. Il suit les progrès de la science, à sa façon, naïve, en introduisant dirigeables comme dans ce tableau, le ballon, poteaux télégraphiques, ponts métalliques, la tour Eiffel. De petites cartes postales colorées qui nous montrent l'évolution de la vie, mais d'une vie où les objets sont animés et l'homme passe. Certains ont bien dit que le temps ne passait pas, mais que nous passions. Chez Rousseau, nous ne passons pas, mais les objets s'animent et le temps reste figé. Peut-être y-a-t-il finalement un angoisse du temps qui passe chez Henri Rousseau. Sous sa brosse, il préfère le figer comme un éternel. N'avait-il aucune angoisse ? Certains ont raconté qu'il avait peur de ce qu'il peignait, notamment les scènes de jungle au point d'ouvrir la fenêtre pour respirer, n'est-ce pas une phobie que nous cachait Rousseau ?

La vie le rattrape pourtant lorsqu'en 1888, sa femme, Clémence, décède, le laissant dans une difficile situation financière qui s'aggrave lorsqu'il veut vivre de sa peinture. Il donne alors des cours de violon, (ce n'est pas Ingres, mais quand même quel éclectisme chez cet homme !) et écrit plusieurs pièces de théâtre. En 1899, il se remarie avec Joséphine Noury et parvient petit à petit à se faire reconnaître et estimer par des peintres avant-gardistes tels que Derain ou Matisse. Il connaît des poètes, des peintres dont le jeune Picasso, mais meurt en 1910 à l'hôpital Necker à Paris d'une gangrène. Il avait été soldat et douanier, il avait su éviter deux guerres. Ce n'était quand même pas mal!

Pour ceux qui se demandent pourquoi Rousseau a inventé ce style à la fois si naïf et si coloré qui influencé tous les peintres naïfs, peut-être serait-on tenté de répondre, par manque de technique. Mais ce raccourci serait cruel, car il y a chez ce peintre une notion de la couleur qui a fait l'admiration des « fauves » (les peintres cette fois-ci). Rousseau était un homme simple, il a fixé sur la toile les choses telles qu'il les voyait. Après tout, le monde pouvait bien s'arrêter, Rousseau était peu concerné. Entre 1870 et 1914, la vie valsait pourtant, mais cet homme solitaire ne l'a vue qu'au travers d'illustrations et de livres. Son monde à lui était le Jardin des Plantes, il n'a pas connu Port-Saïd, Rangoon et Bombay, sa jungle s'ouvrait devant un tigre aussi surpris que lui. Un naïf dans un monde qui l'était de moins en moins.







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