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  Vol. 298 No. 5, 1 août 2007 TABLE OF CONTENTS
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Interventions pour des symptômes dépressifs chez les adolescents ayant survécu à la guerre et aux déplacements dans le nord de l'Ouganda

Un essai randomisé, contrôlé

Paul Bolton, MBBS; Judith Bass, PhD; Theresa Betancourt, ScD; Liesbeth Speelman, MA; Grace Onyango, MA; Kathleen F. Clougherty, MSW; Richard Neugebauer, PhD; Laura Murray, PhD; Helen Verdeli, PhD


RÉSUMÉ

Contexte De précédents travaux qualitatifs sur des personnes déplacées dans le conflit touchant le nord de l'Ouganda, ont montré des troubles mentaux et psychosociaux importants.

Objectif Evaluer l'impact des interventions localement réalisables sur les symptômes dépressifs, d'anxiété, et de troubles de la conduite chez les adolescents qui ont survécu à la guerre et aux déplacements dans le nord de l'Ouganda.

Schéma, environnement et participants Un essai randomisé, contrôlé, conduit de mai 2005 à décembre 2005 chez 314 adolescents (âgés de 14-17 ans) provenant de deux camps pour personnes intérieurement déplacées dans le nord de l'Ouganda.

Interventions Des outils de sélection, développés localement, ont servi à évaluer l'efficacité des interventions à soulager les symptômes de la dépression et de l'anxiété, diminuer les troubles de la conduite, et apporter une amélioration fonctionnelle chez les sujets éligibles et aléatoirement affectés aux interventions (105, intervention psychothérapeutique [psychothérapie interpersonnelle de groupe]; 105, interventions centrées sur l'activité [jeux créatifs]; 104, groupe contrôle en liste d'attente [les individus attendent la fin de l'étude pour recevoir un traitement]). Les groupes d'intervention se réunissaient une fois par semaine pendant 16 semaines. Les participants et les contrôles ont été réévalués à la fin de l'étude.

Principaux critères d'évaluation Le critère primaire était la diminution du score (traduisant une amélioration) sur une échelle des symptômes de la dépression. Les critères secondaires étaient les scores sur les échelles des symptômes de l'anxiété et des troubles de la conduite et l'échelle fonctionnelle. La dépression, l'anxiété et les troubles de la conduite ont été évalués avec l'Acholi Psychosocial Assessment Instru¬ment, avec un score minimum de 32 comme limite inférieure de la significativité clinique des symptômes (score maximum possible, 105).

Résultats L'écart de la variation du score moyen ajusté des symptômes dépressifs entre la psychothérapie interpersonnelle de groupe et le contrôle était de 9.79 points (intervalle de confiance [IC] 95%, 1.66-17.93). Les filles recevant la psychothérapie interpersonnelle de groupe ont montré une amélioration considérable et significative des symptômes dépressifs par rapport aux contrôles (12.61 points; IC 95%, 2.09-23.14). L'amélioration n'était pas statistiquement significative chez les garçons (5.72 points; IC 95%, -1.86-13.30). Les jeux créatifs n'ont montré aucun effet sur la sévérité de la dépression (-2.51 points; IC 95%, -11.42-6.39). Aucune différence statistiquement significative n'a été observée pour l'anxiété quel que soit le groupe d'intervention. Aucune des deux interventions n'a permis d'améliorer les scores fonctionnels et des troubles de la conduite.

Conclusions Les deux interventions étaient localement réalisables. La psychothérapie interpersonnelle de groupe était efficace contre les symptômes dépressifs chez les adolescentes victimes de la guerre et des déplacements. D'autres interventions devraient être explorées pour aider les garçons présentant des symptômes dépressifs dans cette population.

Trial Registration clinicaltrials.gov Identifier: NCT00280319

JAMA. 2007;298(5):519-527


Le conflit touchant le nord de l'Ouganda demeure l'une des plus violentes et persistantes sources de crises humanitaires complexes dans le monde. Plus de 1.8 million d'individus, appartenant principalement à l'ethnie des Acholis, ont été déplacés à l'intérieur des frontières sur les 20 ans de conflit opposant le gouvernement de l'Ouganda à l'Armée de résistance du Seigneur.1 L'Armée de résistance du Seigneur a été accusée d'exactions, notamment de violence à grande échelle, viols, et l'enlèvement de plus de 25 000 enfants.1 Les populations locales affluent dans les camps pour personnes intérieurement déplacées où les risques pour leur santé et leur qualité de vie sont démultipliés.1 De précédentes recherches montrent que les enfants, victimes des conflits armés, sont soumis à des risques majorés de problèmes mentaux allant de difficultés d'adaptation à des dépressions et des problèmes d'anxiété, y compris des états de stress post-traumatiques.2-4 Des organisations gouvernementaux et non-gouvernementaux (ONG) prennent ces problèmes en charge, pourtant peu d'interventions ont fait l'objet d'évaluations rigoureuses de type essai randomisé, contrôlé (ERC), que ce soit en Ouganda ou ailleurs.4 Le peu d'ERC menés hors des sociétés occidentales, incluant des traitements non-médicamenteux ont donné des résultats mitigés.5-9 Ni les thérapies basées sur le témoignage5 ni le counseling et la résolution de problèmes en milieu clinique n'ont jusqu'à présent montré des bénéfices par rapport au contrôle. En revanche, des essais sur une thérapie comportementale et cognitive9, sur un programme de psychoéducation6, et un précédent essai dans le sud-ouest de l'Ouganda (que nous avons mené et portant sur une intervention également présentée dans cette article)8, ont tous montré des améliorations significatives des symptômes psychologiques étudiés. Ces essais ne s'intéressaient cependant qu'aux adultes. Des ERC pour des interventions s'adressant aux problèmes de santé mentale chez les enfants et les adolescents affectés par la guerre, sont également nécessaires. Le présent article décrit un ERC mené dans 2 camps de personnes déplacées intérieurement dans le nord de l'Ouganda. Nous avons voulu connaître l'efficacité d'une intervention thérapeutique (psychothérapie interpersonnelle de groupe, [PIT-G]) et d'une intervention centrée sur l'activité (jeux créatifs [JC]) à soulager les problèmes de santé mentale et les problèmes psychosociaux, résultants de la guerre et des déplacements chez les adolescents.


Encadré. Symptômes pour les syndromes décrits localement et les tâches/activités utilisées pour construire des échelles locales des symptômes de la dépression et de la déficience fonctionnelle

Syndromes de type dépression

Paraa

Réfléchit beaucoup, souhaiterait être seul(e), s'irrite facilement, se tient la tête, consomme de l'alcool, pense à la suicide, ne salue pas les gens, reste dans son coin, a pleins de préoccupations, n'arrive pas à penser clairement, ne fais pas confiance, se parle à lui/ellemême, insulte ses amis, désobéissant(e), faible, pleure constamment, perd souvent sa concentration à l'écoleb

Two Tarna

Réfléchit beaucoup, est tout le temps inquiet(e), ressent des douleurs corporelles, a l'impression que son cerveau ne fonctionne pas bien, se considère inutile, pense à la suicide, parle de ses problèmes, reste dans son coin, a des migraines, se sent triste, ne se soucie pas de vivre ou mourir, a des mauvaises pensées, n'a pas envie de parler, oublieux(se), faible, pleure constamment, ne s'intéresse plus à l'écoleb

Kumua

A des absences d'appétit, ressent des douleurs au coeur, se tient la joue en s'asseyant, ne dors pas la nuit, parle de ses problèmes, reste tout le temps étendu(e), a pleins de préoccupations, a des migraines, a froid, faible, n'a pas envie de parler, désobéissant(e).

Syndromes de type anxiété

Ma Lwor

S'accroche aux adultes, pense qu'il/elle n'a pas de futur, cours tout le temps, n'aime pas les bruits, a un rythme cardiaque élevé, a peur d'être seul(e), a des absences d'appétit, souhaiterait être seul(e), ne dort pas la nuit, consomme de l'alcool, ne salue pas les gens, pense que des gens le/la poursuivent.

Syndrome des comportements antisociaux et maladaptatifs

Kwo Maraco

Se bagarre, a un langage inapproprié, irrespectueux(e), se conduit mal, consomme de l'alcool, manque d'intérêt, fourbe, brutal(e), prends des drogues, désobéissant(e), ne s'intéresse plus à l'école.b

Jeux et tâches selon la fonction et le sexe

Filles

Chercher de l'eau, laver des vêtements, creuser, nettoyer les ustensiles de cuisine, jouer à la balle, balayer la maison, enduire le plancher de boue, faire à manger, dance traditionnelle

Garçons

Chercher de l'eau, creuser, jouer, balayer l'enceinte, jouer au foot.

a Combinés pour créer l'échelle composite de la dépression. L'échelle finale incluait 35 signes et symptômes.. Les 2 éléments associés à

b l'école n'ont pas été retenus pour les échelles finales car de nombreux élèves n'allaient pas à l'école.



METHODES

Site et population

Les participants sont des adolescents acholis âgés de 14 à 17 ans et vivant dans l'un des deux camps de personnes intérieurement déplacées, à proximité de la ville de Gulu, dans le nord de l'Ouganda. La population de chaque camp dépasse les 20 000 individus. Activité économique, vie sociale et culturelle y sont réduites au minimum même si les enfants ont plus ou moins accès à des écoles.

Evaluation des symptômes

Nous avons développé un outil d'évaluation, basé sur une précédente étude qualitative réalisée dans les deux camps (P.B, T.B, et L.S, données non-publiées, 2004). Dans cette étude, nous avions identifié 7 problèmes de santé mentale et psychosociaux majeurs, affectant les enfants et les adolescents, que ce soit de leur propre point de vue, des personnes qui s'occupent d'eux (mères ou autres parents adultes), ou d'autres personnes suffisamment informées. L'équipe de recherche et les personnels des ONG en ont sélectionné 5 pouvant faire l'objet des interventions que les ONG sont en mesure de mettre en place. Trois de ces syndromes, two tam, kumu, et par, de types dépressifs, ont été sélectionnés suite à l'observation dans un précédent essai randomisé que nous avons mené, qu'ils pouvaient faire l'objet d'un traitement fourni par l'un de nos partenaires (World Vision). Le 4ème syndrome local est le ma lwor, un syndrome de type anxiété, et le cinquième, le kwo ma-raco, une combinaison de comportements d'inadaptation et antisociaux (voir encadré). Les deux troubles restants, l'un se référant à un ensemble de réactions de stress post-traumatiques avec traits psychotiques, et l'autre à une peur légitime d'une attaque de l'Armée de résistance du Seigneur, n'ont pas fait l'objet d'enquêtes supplémentaires, l'équipe de recherche et les ONG partenaires ayant jugés qu'ils ne seraient pas affectés par les interventions déjà mises en place ou planifiées par les ONG, y compris les interventions évaluées dans cette étude.

Les problèmes d'alcoolisme et de violences sexuelles étaient fréquemment rapportés; des syndromes associés à la consommation d'alcool sont présents dans 3 de 5 syndromes locaux et l'agression sexuelle est un trait du syndrome comportemental ma lwor. Toutefois, notre but était d'étudier les effets des interventions sur les syndromes définis localement et les syndromes distincts se rapportant à ces troubles n'ont pas été identifiés dans l'étude qualitative. Il faut cependant noter que les individus manifestant de la psychose, états de stress post-traumatique, consommation de drogues et d'alcool, et traumatisme, n'ont pas été exclus de l'étude même si ces symptômes ne figurent pas parmi ceux, ciblés par l'étude.

De la même façon que lors d'une précédente étude, nous avons voulu savoir si des instruments existants correspondaient aux descriptions locales de ces 5 troubles. En absence d'instruments adéquats, nous avons développé un instrument consistant en un questionnaire sur tous les symptômes des 5 troubles locaux: le Acholi Psychosocial Assessment Instrument (APAI). Les répondants à l'APAI étaient interrogés sur la fréquence de chaque symptôme sur la semaine d'avant. Les réponses étaient portées sur une échelle de Likert à 4 réponses, allant de 0 (jamais) à 3 (tous le temps). Des questions supplémentaires portant sur la durée des symptômes, des données sociodémographiques, le temps déjà passé dans le camp, et si l'adolescent a déjà fait l'objet d'un enlèvement, ont été ajoutées. Etant donné la prédominance des syndromes de type dépression dans les données qualitatives et l'efficacité de la PTI-G à traiter les symptômes dépressifs ailleurs en Ouganda, l'introduction et l'évaluation de la PTI-G dans cette population semblait être pertinente. L'équipe de recherche et les ONG partenaires partageaient également la conviction qu'une des interventions disponibles, le JC, était potentiellement efficace pour résoudre ces même problèmes (ainsi que le syndrome comportementale kwo maraco). Par conséquent, nous avons pris les troubles dépressifs, two tam, kumu, et par (voir encadré) comme critères d'évaluation primaires. Du fait de leurs susceptibilités potentielles à la PTI-G et au JC, les mesures pour le syndrome d'anxiété (ma lwor) et le syndrome comportemental (kwo maraco) ont été retenues comme critères d'évaluation secondaires.

Développement des instruments, fiabilité et validité

Les 3 troubles dépressifs locaux comportent des combinaisons variables (mais non-exhaustives) des symptômes majeurs de la dépression et des symptômes associés, décrits par le Diagnostic and Sta¬tistical Manual of Mental Disorders (4ème édition). De ce fait, nous avons développé une échelle locale pour les symptômes de la dépression, basée sur la somme des scores de chaque item constitutif des trois syndromes (35 signes et symptômes distincts). La fiabilité et validité de l'échelle ont été évaluées à partir d'un sous-échantillon (n=178) des adolescents ayant passé un entretien pour l'éligibilité à l'essai (N=667). Le coefficient {alpha} de Cronbach (coefficient de fiabilité interne) était de 0.92. Aucun professionnel en santé mentale connaissant suffisamment la culture locale n'étant disponible pour poser des diagnostics cliniques, nous avons fait appel à une méthode alternative pour déterminer la validité des critères de sélection. A partir de ce groupe, nous avions identifié les individus désignés par deux personnes s'occupant des jeunes comme ayant 2 des 3 syndromes de type dépressif (cas) et ceux désignés comme n'ayant aucun de ces syndromes (non-cas). Le score APAI (moyenne [DS]) était considérablement et significativement plus élevé pour les cas (45.3, [13.6]) que les non-cas (15.6, [11.2]), démontrant la validité concurrente. Le seuil d'éligibilité à l'essai,32 a été défini à partir de ces scores, à approximativement 1 DS en dessous de la moyenne des cas. Un sous-échantillon de convenance de 30 individus ont été de nouveau soumis à l'APAI après 3 à 5 jours. La fiabilité test-retest pour l'échelle des symptômes de la dépression était de 0.84.

Significativité clinique des scores d'échelles

Le seuil d'éligibilité à été déterminé en comparant les scores moyens de symptômes de la dépression pour les cas et les non-cas, comme décrit dans la section précédente. Le seuil de 32 (1 DS en dessous de la moyenne pour les cas) a été choisi comme une limite inférieure raisonnable pour admettre cliniquement la présence de symptômes (score maximum à l'échelle,105). Afin d'évaluer la significativité clinique de ce seuil selon une perspective clinique occidentale, les scores ont été comparés avec les résultats obtenus au Strengths and Difficulties Questionnaire,12 administré en même temps que l'APAI. Le Strengths and Difficulties Questionnaire, utilisé dans de nombreux contextes culturels, est un instrument permettant d'évaluer les troubles émotionnels et comportementaux de l'enfant.13-15 Il permet de déterminer la probabilité d'être en présence d'un cas (en se basant sur les scores)16 mais n'a pas été conçu pour établir des pronostics thérapeutiques.17 Nous avons comparés les scores APAI des individus montrant des résultats positifs au test d'éligibilité avec leurs scores au Strengths and Difficulties Questionnaire pour la sous-échelle des problèmes émotionnels (où un score de 7 à 10 indique la probabilité d'être en présence d'un cas)16 afin déterminer si l'APAI et le seuil adopté permettaient d'identifier les adolescents définis selon une mesure standard comme souffrants de problèmes mentaux majeurs (le Strengths and Difficulties Questionnaire).

Evaluation fonctionnelle

Nous avons également développé un outil local d'évaluation fonctionnelle, basé sur les données quantitatives, en utilisant une approche similaire à celle rapportée dans une autre étude. La mesure comporte deux échelles spécifiques à chaque sexe, et reflétant des activités jugées importants pour les enfants et les adolescents par les résidents jeunes et adultes des camps (voir encadré). La déficience était mesurée sur une échelle de Likert allant de 0 (pas de difficultés supplémentaires par rapport aux fille/garçons du même âge) à 4 (inaptitude fréquente). Un score fonctionnel global était constitué par la somme des scores individuels de chaque item, et allait de 0 à 36 pour les filles (9 activités), et de 0 à 20 pour les garçons (5 activités).

Eligibilité à l'étude, sélection, consentement et randomisation

La sélection et l'évaluation des valeurs initiales ont été menées pendant l'été 2005. Les interventions se sont toutes deux déroulées d'août 2005 à décembre 2005. Des évaluations pré- et post-interventions ont été menées et les variations pour l'échelle locale de symptômes de la dépression ont été calculées. Les calculs de taille d'échantillon ont été basés sur une variation attendue de 10 points entre n'importe lequel des groupes de traitements et le contrôle. Cent adolescents par groupe ont permis d'obtenir une puissance supérieure à 80% (P=0.05), en supposant les DS inférieures à 25 points. Des comparaisons directes entre les groupes d'interventions n'étaient pas pertinentes du fait de l'hétérogénéité en taille et de la répartition des sexes entre les groupes d'intervention. Par conséquent, l'étude n'était pas adaptée à des comparaisons intergroupes pour les interventions.

L'éligibilité à l'essai s'était fait en deux phases de sélection. Dans la phase 1, 10 enquêteurs responsables ont contacté des responsables locaux, des enseignants, des travailleurs sociaux et des adolescents afin d'établir une liste de jeunes, connus pour avoir au moins un des troubles locaux de type dépressif. Dans la phase 2, l'instrument était administré à ces jeunes par 20 interviewers formés. Des superviseurs assistaient à 10% des entretiens, évaluaient tous les questionnaires complétés, et visitaient tous les adolescents non-consultés pour confirmer leur indisponibilité ou leurs refus. Des interviewers ont été utilisés (au lieu de questionnaires auto-administrés) à cause des préoccupations sur le niveau d'alphabétisation des répondants, leurs scolarisations ayant été fréquemment interrompues par la guerre.

Les répondants éligibles étaient âgés de 14 à 17 ans, devaient avoir des scores supérieurs à 32 sur l'échelle de symptômes de la dépression et supérieur à 0 sur l'échelle fonctionnelle, avoir eu des symptômes sur au moins un mois, et avoir résidé dans les camps le mois d'avant. Les critères d'exclusion comprenaient l'incapacité de passer l'entretien à cause d'une déficience cognitive ou physique, ou des pensées ou des comportements suicidaires sévères.

Le consentement éclairé n'était dans un premier temps requis que pour l'entretien de sélection. Les jeunes éligibles étaient ensuite affectés aléatoirement à un groupe d'étude. L'allocation aléatoire a été réalisée avec un outil logiciel en générant aléatoirement un nombre entre 1 et 400 pour chaque participant éligible, puis en les ordonnant en fonction de leurs numéros et affectant le premier tiers à la PTI-G, le second au JC et le dernier tiers au contrôle en liste d'attente. Chaque adolescent éligible était ensuite visité par un animateur (si affecté à la PTI-G ou au JC) ou d'autres personnels de l'ONG (si affecté au groupe contrôle) afin d'obtenir à nouveau son consentement éclairé pour, cette fois ci, participer à l'essai. Cette procédure consistait à informer chaque adolescent sur le groupe d'étude auquel il ou elle a été affecté(e). Les ONG partenaires ont préalablement accepté de fournir/maintenir de manière permanente toute intervention dont l'efficacité serait démontrée. Les individus affectés à la liste d'attente ont été informés qu'ils seraient les premiers à recevoir l'intervention dont (le cas échéant) l'efficacité serait démontrée.

Sur l'ensemble de l'échantillon (N=667), 300 ont rempli les critères d'inclusions, stratifiés en fonction de leurs camps et de leurs sexes, et randomisés dans les groupes d'études. Sur ces 300, 290 ont été recrutés dans l'étude. Sur les 10 restants, 1 participait déjà à un programme de JC dans un camp voisin, 4 n'ont pu être localisés, et 5 ont refusés de participer. Afin d'atteindre notre taille d'échantillon de départ (300), nous avions randomisé 38 individus supplémentaires dont les scores des symptômes de la dépression étaient compris entre 28 et 31 points. Cette tolérance vis à vis des critères d'éligibilité est acceptable si les répercussions sur la conception de l'étude sont minimes. Suite à l'accord des 14 premiers individus, les individus restant n'ont pas été approchés. Le taux de participation était de 96.8% (304 recrutés sur 314 sélectionnés; Figure).


Figure 1
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Figure.. Flux des participants


Evaluation post-intervention

L'instrument d'évaluation a été de nouveau administré à 282 (90%) des 314 participants initiaux un mois après la fin des deux interventions. Ceux qui conduisaient les entretiens les faisaient en insu de la situation du répondant par rapport à l'intervention.

Interventions

Les deux interventions consistaient chacun en des rencontres hebdomadaires de 1.5 à 2 heures, pendant 16 semaines. Celles-ci étaient précédées par 1 ou 2 entretiens individuels dans lequel l'intervention était expliquée et (dans le cas de la PTI-G) un plan de traitement élaboré par les animateurs. La psychothérapie interpersonnelle est une intervention brève et structurée, développée aux Etats-Unis pour une prise en charge ambulatoire de la dépression unipolaire, non-psychotique, avant d'être adaptée au traitement, individuel21 et en groupes,22 des adolescents dépressifs. La psychothérapie interpersonnelle part du principe que les épisodes dépressifs sont déclenchés par des difficultés dans 1 ou plusieurs des 4 thématiques interpersonnels: le deuil, les conflits interpersonnels, les transitions difficiles, et les déficits interpersonnels. Elle se focalise sur la diminution des symptômes dépressifs et repose sur l'identification des problèmes interpersonnels contribuant le plus à la dépression et sur l'assistance de l'individu à apprendre à maîtriser ces problèmes. Les traitements faisant appel à la PTI-G ont été pour la première fois menés en Afrique chez les adultes souffrant de dépression dans le sud-ouest de l'Ouganda. En se basant sur cette expérience et sur nos travaux qualitatifs préliminaires dans le nord de l'Ouganda (P.B, T.B et L.S, données non-publiées, 2004 [disponible sur demande auprès des auteurs]), l'accent mis par la PTI-G sur les déclencheurs interpersonnels et le développement de relations de groupes semblaient compatibles avec la culture Acholi

L'intervention PTI-G a été implémentée par World Vision Uganda. Il y avait 12 groupes PTI-G, dirigé chacun par un animateur ayant suivi une formation sur site de 2 semaines, dispensée par le l'université de Columbia (K.F.C). Un manuel de traitement, décrivant les stratégies et les techniques de la PTI-G a été adapté pour un usage local (K.F.C, H.V, et Myrna Weissman, PhD, Columbia University, New York State Psychiatric Institute, données non-publiées, 2006); Les groupes étaient formés de 6 à 8 adolescents ou adolescentes et un animateur du même sexe. Les animateurs étaient sous la supervision directe et hebdomadaire d'une équipe de World Vison Uganda disposant de précédentes expériences en PTI-G. Ces superviseurs étaient à leur tour supervisés par téléphone, et de façon hebdomadaire, par un formateur basé aux Etats-Unis, et étaient en contact hebdomadaire avec le personnel de formation. Les superviseurs en PTI-G fournissaient également des rapports écrits hebdomadaires, analysés et commentés avec l'équipe de formation pendant les réunions téléphoniques hebdomadaires, pour s'assurer de l'adhérence au modèle de traitement et de la protection des sujets humains.

Le JC utilise un programme basé sur les jeux créatifs, développé par War Child Holland pour les jeunes affectés par la guerre. Il est fondé sur le renforcement de la résilience de l'enfant par l'expression, verbale ou non, de ce qu'il pense et de ce qu'il ressent, à travers des activités créatifs appropriées à son âge, comme la chanson, les jeux de rôles, la musique, le sport, jeux et les discussions. Chaque activité tend vers un objectif psychosocial précis et les activités sont choisies en fonction, à partir du manuel de War Child Holland. Par exemple, si le but est d'apprendre à faire confiance aux autres, les activités pourraient consister en des travaux collaboratifs. A la fin des activités, les animateurs dirigent des discussions sur l'idée qu'ont les participants et les animateurs de l'activité en tant que moyen d'apprentissage de la vie. Le JC a été affecté à 4 groupes (2 groupes par camp avec des représentants des deux sexes dans chaque groupe et 25-30 adolescents dans chaque groupe), conformément à sa mode de mise en œuvre. Deux personnes (un homme et une femme) venant de War Child Holland, animaient conjointement toutes les sessions de JC pour tous les groupes. La supervision était assurée de façon hebdomadaire ou bimensuelle par le spécialiste en soutien psychosocial de War Child Holland qui communiquait régulièrement les rapports de supervision avec le personnel de formation aux Etats-Unis. Ces rapports faisaient l'objet d'analyses et de discussions avec l'équipe de formation pendant les réunions téléphoniques bimensuelles afin de s'assurer de l'adhérence au modèle de traitement ainsi que de la protection des sujets humains. Lors de la mise en œuvre du JC dans certains pays, des programmes de War Child Holland ont étendu le modèle de base en incluant des éléments issus de l'approche thérapeutique dans les discussions post-activités, en tenant compte des possibilités locaux. L'équipe de War Child Holland dans le nord de l'Ouganda avait également prévu de faire pareil. Cependant, pour cette étude, la décision à été prise de n'utiliser que le modèle de JC standard où les discussions post-activités sont centrées sur le développement d'aptitudes. Ceci afin d'avoir une distinction maximale entre une intervention psychothérapeutique (PTI-G) et une intervention basée sur les activités de groupes (JC). Les participants pouvaient discuter de leurs problèmes avec les animateurs de JC, à l'issue des réunions, et cela a été le cas en quelques occasions avec des participants en état de détresse (une jeune femme qui a perdu son bébé, un jeune garçon qui a vécu dans le maquis avec les rebelles), mais ces discussions n'étaient pas systématiques à l'intervention.

L'intervention JC utilisée était semblable à celle, généralement utilisée par War Child Holland dans d'autres pays, à l'exception de deux points :1 l'inclusion d'adolescents aussi âgé que 17 ans (âge habituellement limité à 15 ans), et 2 la restriction de la participation, habituellement ouverte à tous les enfants, aux seuls adolescents manifestant des symptômes dépressifs.

Analyse

Les valeurs initiales des groupes d'étude ont été comparées en utilisant le test {chi}2 pour les données nominales et des tests t pour des données continues. Le critère d'évaluation primaire pour l'efficacité de l'intervention était la variation intra-individuelle du score sur l'échelle des symptômes de la dépression entre la valeur initiale et la valeur en post-intervention. Les critères d'évaluation secondaires étaient les scores des symptômes pour les syndromes comportementaux et d'anxiété locaux, et le score fonctionnel. Nous avons comparé séparément la variation intra-individuelle moyenne du score des symptômes et du score fonctionnel entre le groupe contrôle et chaque intervention.

Le logiciel de statistique Stata version 9.0 (STATACorp, College Station, Texas) à été utilisé pour les analyses descriptives et SAS version 9.1 (SAS Institute Inc, Cary, Caroline du Nord) pour les analyses groupées. Noua avons utilisé un modèle à effets aléatoires pour estimer l'effet des interventions sur la variation des scores, ajustant pour le regroupement à l'intérieur des groupes en surveillant les corrélations intragroupes et les variabilités inter-groupes.24 Les coefficients de régression et les valeurs P ont été déterminés pour des mesures continues. La significativité statistique était à P < 0.05, bilatérale et exprimée par un intervalle de confiance (IC) à 95%.

Les analyses sont présentées pour les échantillons en intention de traiter (n=314), qui comprend tous les individus éligibles pour l'essai, randomisés à un des groupes d'étude et approchés en vue de l'inclusion final, quelles qu'aient été leurs réponses. Pour les individus n'ayant pas été réévalués, leurs scores initiaux ont été pris comme scores post-interventions, montrant par conséquent l'absence de variations. Les analyses ont également été menées sur l'échantillon de patients ayant reçus le protocole (n=261), composés d'individus qui ont eu un entretien avant et après l'intervention et qui ont (pour les groupes d'interventions) assisté à toutes les sessions. Ceci à été fait pour déterminer si les résultats étaient sensiblement différents pour ceux qui ont complété le protocole et pour vérifier si notre méthode d'imputation pour ceux qui n'ont pas complété le protocole conduisait à une sous-estimation de la variance.L'étude a été approuvée par le comité de surveillance de l'Université de Boston et par le Conseil National Ougandais de la Science et de la Technologie à Kampala, Ouganda.


RÉSULTATS

Valeurs initiales

Sur 314 adolescents approchés pour le recrutement, 172 (55%) étaient du camp Awer et 142 (45%) d'Unyama. A l'initiation de l'étude, 180 (57%) étaient des filles, 211 (67%) étaient inscrits dans une école, et 131 (42%) ont fait état d'un enlèvement par l'Armée de résistance du Seigneur. La durée moyenne de séjour dans les camps était de 5.2 ans. Sauf une moyenne d'âge légèrement plus élevée chez les contrôles en liste d'attente, les 3 groupes d'études ne différaient pas de manière significative (Tableau 1). Le score à la sous-échelle des problèmes émotionnels pour le Strengths and Difficulties Ques¬tionnaire était de 8.1 et ne montrait aucune variation en fonction du sexe ni des groupes d'affectation; 256 (81.5%) avait un score égal ou supérieur à 7, la valeur seuil pour envisager un "cas". Les résultats ne sont pas ajustés pour l'âge, l'ajustement n'amenant aucune différence notable.


Voir ce tableau:
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Tableau 1.. Caractéristiques de l'échantillon d'étude à l'initiation de l'essai (n = 314)


Participation

Sur les 105 adolescents affectés à la PTI-G, 91 ont participé à au moins 2 sessions (moyenne 14.1 sessions, DS=2.6), parmi lesquels 89 (86% de l'échantillon PTI-G total) ont eu une évaluation post-intervention. Sur les 105 adolescents affectés au JC, 84 ont participé à au moins 3 sessions (moyenne 10.4 sessions; DS=2.9), parmi lesquels 82 (83% de l'échantillon JC total) ont été réévalués. Quatre-vingt-dix individus en liste d'attente ont eu un entretien en post-intervention (87% des 104 en liste d'attente). Quatorze adolescents (13%) affectés à la PTI-G et 21 (20%) affectés au JC n'ont participé à aucune session. Les deux sous-groupes de non-participants avaient des scores de dépression moyens identiques à ceux des participants mais étaient généralement des filles, n'assistaient pas aux cours, et avaient vécu un enlèvement.

Variations de la sévérité des symptômes

L'ensemble des 3 groupes ont montré une diminution du score moyen des symptômes de la dépression entre l'initiation de l'étude et après l'intervention (Tableau 2). La baisse sur l'échelle des symptômes de la dépression était sensiblement et significativement plus importante pour le groupe PTI-G que pour le groupe contrôle. La différence ajustée de la baisse moyenne entre le groupe PTI-G et le groupe contrôle était de 9.79 points (IC 95%, 1.66-17.93) pour l'ensemble de l'échantillon en intention de traiter et de 10.71 points (IC 95%, 4.02-17.40) pour ceux qui ont complété le protocole (Tableau 2). Le groupe JC a démontré une faible baisse sur l'échelle des symptômes de la dépression, ne différant pas significativement du groupe contrôle. Le coefficient de corrélation intra-classe pour les scores à l'échelle de dépression était de 0.099. Les variances pour les critères d'évaluation pour l'échantillon en intention de traiter ne différaient que faiblement de celles des individus ayant complété le protocole (Tableau 2), indiquant que la méthode d'imputation n'influençait pas le risque d'erreur de type I. Nous avons également évalué les variations de scores de symptômes pour le trouble local d'anxiété (ma lwor) et les troubles de la conduite (kwo maraco) en tant que critères d'évaluation secondaires. L'écart ajusté de la diminution intra-individuelle moyenne pour le ma lwor entre le groupe PTI-G et le groupe contrôle était faible mais significative: 2.16 points (IC 95%, 0.84-3.48) alors que celle du kwo ma¬raco ne l'était pas: 0.74 points (IC 95%, -0.15-1.63). Le groupe JC avait montré une augmentation (0.2 points) et une diminution (0.4 points) non-significatives, respectivement pour ma lwor et kwo maraco.


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Tableau 2.. Efficacité des interventions par rapport au contrôle à réduire le score des symptômes de la dépression en intention de traiter et en protocole reçu.


Des analyses exploratoires ont été utilisées pour déterminer si l'efficacité de n'importe laquelle des deux interventions était affectée par le sexe, l'âge, un antécédent d'enlèvement, et la durée de séjour dans le camp. Au cours d'analyses stratifiées, la PTI-G s'était montrée très supérieure au groupe contrôle à réduire la sévérité des symptômes chez les filles, tandis que les résultats n'étaient pas statistiquement significatifs chez les garçons (Tableau 3). Cette effet était également observé pour l'échantillon d'individus ayant complété le protocole, où le score moyen chez les filles, pour le groupe PTI-G, était inférieur de 16.6 points (IC 95%, 9.93-22.13) au groupe contrôle et chez les garçons inférieur de 5.01 points (IC 95%, -1.89-11.90) au groupe contrôle. Aucune différence significative n'a été constatée pour les autres variables ou pour les analyses du groupe JC.


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Tableau 3.. Comparaison des interventions au contrôle pour la réduction du score de dépression dans l'échantillon en intention de traiter


Rétablissement et rémission

Le rétablissement était défini comme une réduction de 50% ou plus du score initial de sévérité des symptômes, et la rémission comme étant un score inférieur à un seuil prédéfini de 15.6 points (le score moyen des non-cas dans l'étude de validation). Parmi la liste d'attente, 14 individus (13.5%) remplissaient le critère de rétablissement et 9 sur le total, (8.9%) le critère de rémission. Chez les groupes JC et PTI-G, ces chiffres étaient respectivement de 13 (12.4%) et 39 (37.1%) pour le rétablissement, et de 7 sur le total (6.7%) et 30 sur le total (29.1%) pour la rémission. Chez le groupe PTI-G, 25 (42%) des filles et 14 (31%) des garçons ont remplis le critère de rétablissement tandis que 20 (33.9%) des filles et 10(22.7%) des garçons ont rempli le critère de rémission. Parmi les individus ayant complété le protocole, 14.6% et 7.3% des participants au JC et 42.7% et 34.5% des participants à la PTI-G ont rempli respectivement le critère de rétablissement et le critère de rémission.

Effets de la participation et de l'animateur de groupe

Le nombre participations aux sessions de PTI-G était associé à une diminution plus importante (β=1.3; P=0.001). Aucune association n'a pu être observée entre le nombre de participations aux sessions de JC et la variation des symptômes. L'efficacité de la PTI-G n'a pas montré de variation significative en fonction de l'animateur mais le nombre limité de groupes (12) a limité la puissance analytique. Les effets dus à l'animateur n'ont pu être analysés dans le groupe JC car les deux animateurs se sont occupés des 4 groupes.

Variations fonctionnelles

Les scores fonctionnels moyens intra-individuels ont diminué de façon identique dans les 3 groupes d'études, chez les filles et les garçons. Chez les individus du groupe contrôle, les filles ont connu une diminution moyenne de 1.9 point (IC 95%, -0.11à 3.97) sur leurs scores de déficience fonctionnelle, et les garçons ont connu une diminution moyenne de 0.8 point (IC 95%, -0.39 à 2.07). Ceci était similaire aux valeurs constatées pour les participants JC, avec une réduction moyenne de 1.3 point pour les filles (IC 95%, -0.73 à 3.23) et une réduction moyenne de 0.5 points pour les garçons (IC 95%, -0.69 à 1.66). Les participants PTI-G ont rapporté des réductions plus importantes mais la différence globale, comparée aux contrôles n'atteignait pas la significativité statistique. Parmi les filles du groupe PTI-G, la réduction moyenne était de 3.2 point (IC 95%, 1.51-4.87) tandis que le score moyen chez les garçons étaitde 1.3 points (IC 95%, -0.02 à 2.93).

Effet de l'ajustement de Dunnett

Proschan et Fullman ont recommandé l'ajustement de Dunnett pour les analyses statistiques de multiples comparaisons, pour atteindre les mêmes buts que l'ajustement de Bon-Ferroni. Même si leur article comporte plus de comparaisons que ce que nous avons mené dans la présente étude, nous avons néanmoins voulu analysé l'effet de cet ajustement. Nous n'avons observé aucune différence au niveau des données et en lui-même, le facteur d'ajustement n'était pas significatif.


COMMENTAIRES

Dans cette étude, la PTI-G (une intervention psychothérapeutique) apparaît plus efficace que la liste d'attente contrôle à réduire les symptômes dépressifs chez cette population d'adolescent. La significativité statistique de l'amélioration était limitée aux filles Le JC n'était pas supérieur à la liste d'attente. Ni la PTI-G ni le JC n'ont paru, d'après nos mesures, efficaces à soulager l'anxiété, les troubles de la conduite, et la déficience fonctionnelle chez les filles ou les garçons.

Les filles ont pu bénéficier d'une amélioration beaucoup plus sensible des symptômes de la dépression avec la PTI-G que les garçons. La différence n'était pas statistiquement significative chez les garçons par rapport au groupe contrôle, cependant l'étude n'a pas été conçu pour détecter les différences par rapport au sexe. De précédentes études de la PTI-G chez des adolescents dans des pays occidentaux ont inclus trop peu de garçons pour savoir si ces résultats reflètent d'autres situations. Il est possible que les garçons soient moins disposés à discuter de leurs problèmes émotionnels, en particulier dans un contexte de groupe. La différence de profil comorbide chez les garçons et les filles (les garçons sont plus affectés par la consommation de drogues et les symptômes post-traumatiques) pourrait également avoir affecté les effets la PTI-G, dont l'efficacité moindre chez les personnes souffrant à la fois de dépression et d'anxiétés à été montrée.26

L'absence d'amélioration chez le groupe JC pourrait s'expliquer par la population plus jeune (<15ans) que cette méthode est sensée cibler; notre population pouvant être, dans ce contexte et dans cette culture, plus proche d'une population adulte. Ceci pourrait également expliquer l'efficacité d'une intervention ciblant les adultes comme la PTI-G. L'absence d'efficacité chez le groupe JC était une surprise, en particulier parce que les animateurs avaient reçu de nombreux commentaires positifs de la part des participants, des adultes qui s'occupent d'eux et des enseignants. Il est probable que les participants aient voulu faire plaisir aux animateurs, ou faisaient référence à d'autres améliorations qui n'ont pas été identifiées dans nos mesures, ou à l'amélioration naturelle qui s'était produite dans le groupe de contrôle (qu'ils auraient pu attribués à l'effet de l'intervention). Quel que soit la raison, nous avons noté qu'une intervention basée sur l'activité n'a pas montré d'amélioration significative sur les critères évalués dans la présente étude.

L'absence d'amélioration fonctionnelle pour les deux interventions concorde avec les publications qui ont observées que la réduction des symptômes dépressifs ne se traduisait pas nécessairement par une amélioration fonctionnelle.27,28 Une autre explication pourrait être une amélioration fonctionnelle tardive, un résultat qui caractérise certains essais de psychothérapies interpersonnelles menés dans des pays industrialisés29; ou encore que l'absence d'amélioration démontre la limite de nos méthodes de mesure (voir la section sur les limites de l'étude).

Le groupe PTI-G a également montré une amélioration faible mais significative, des symptômes de l'anxiété, par rapport au contrôle, ce qui est en adéquation avec l'amélioration des symptômes de la dépression et la relation étroite existant entre la dépression et l'anxiété. Une telle amélioration était absente du groupe JC, et les symptômes de troubles de la conduite n'ont montré aucune amélioration dans aucun des deux groupes par rapport au contrôle. Le test de validité de l'APAI étant centré sur les syndromes dépressifs, et les participants à l'étude ayant été uniquement sélectionnés sur la base des symptômes de la dépression, nous n'accordons qu'une valeur suggestive à ces résultats. Des enquêtes plus poussées seront nécessaires.

Le processus d'obtention du consentement était différent des procédures standards d'ERC, où le consentement total précédait la randomisation. Notre approche était basée sur une précédente expérience parmi des populations de faible niveau d'éducation en Afrique Sub-saharienne, où le concept de randomisation est peu compris et peut conduire ceux qui sont affectés au groupe de contrôle à se retirer de l'étude. Nous avons préféré randomiser les participants potentiels après les entretiens de sélections, puis les informer de leur affectation au moment de demander de leur consentement. De cette manière, nous espérions réduire le nombre de refus et de rétractations; tant que celui-ci restait minimal, le biais de sélection ne n'était pas significatif. Seul 10 individus randomisés de cette manière n'ont pas participé. Sur ceux-ci, 5 avaient refusé. Tous les 10 ont été inclus dans les analyses en intention de traiter en supposant une absence de différence entre les deux évaluations.

Limites de l'étude

Bien que l'absence d'amélioration chez les groupes JC puisse suggérer des effets de groupe et d'animateur négligeables, nous ne pouvons pas tirer cette conclusion car les animateurs étaient les mêmes pour tous les groupes; mais également parce que les groupes sont plus larges et de composition mixte, ce qui contribuent toutes deux à réduire ces effets. Par conséquent, il nous est impossible de spéculer, en comparant avec le JC, ce qui pourrait expliquer l'efficacité de la PTI-G; que cela soit la psychothérapie, le fait de se réunir par petits groupes, ou l'attention non-spécifique de l'animateur.

L'absence d'amélioration fonctionnelle chez tous les groupes d'études pourrait être due, du moins en partie, aux limites de nos méthodes de mesure. Les items provenaient uniquement des données qualitatives et se limitaient aux seules activités que l'environnement permettait (un camp de personnes intérieurement déplacées). En résultat, les échelles fonctionnelle se limitaient uniquement à quelques items (9 pour les filles et 5 pour les garçons) et se concentraient sur les activités et les tâches, sans prendre en compte les autres types de fonctions sociales ou interpersonnelles ciblées par la PTI-G et le JC.

Dans nos calculs de puissance, nous n'avions pas pris en compte l'analyse de groupe, ce qui pourrait avoir conduit à une sous-estimation de la taille d'échantillon nécessaire. Cependant, l'analyse du coefficient intra-classe suggère une variance minime apportée par le regroupement d'individus au sein des groupes d'intervention.

A notre connaissance, ceci est le premier ERC d'interventions psychosocial ou en santé mentale, réalisé chez des adolescents africains affectés par la guerre, et un des rares ERC sur les traitements psychologiques des symptômes dépressifs menés dans un pays en développement. Outre notre précédent essai sur la PTI-G mené dans le sud-ouest de l'Ouganda, des ERC ont été menés par Patel et al en Inde,7 Araya et al au Chili,6 et Igreja et al5 en Mozambique; tous ciblant des adultes. Deux de ces études ont fait appel à des psychothérapies individuelles et ont rapportés l'absence d'efficacité, tandis que deux études, basées sur des thérapies de groupe, ont observé la supériorité des traitements par rapport au contrôle. La présente étude conforte également le potentiel des thérapies de groupe.

Malgré les différences entre cette population d'étude et celle de notre précédente étude sur la PTI-G (différente culture, langage, et ethnicité; adultes vs adolescents; affectés par la guerre et déplacés vs non-déplacés et en temps de paix) il y a des similitudes dans les résultats. La PTI-G s'était montré réalisable dans les 2 cas, l'acceptation ayant été élevée, ainsi que la participation à travers la période d'intervention. Une amélioration significative globale des symptômes de la dépression, par rapport aux contrôles, était observable sur les deux sites, les femmes montrant une amélioration sensiblement plus importante que les hommes. L'importance de l'amélioration globale des symptômes était moindre dans cette étude par rapport aux adultes et l'amélioration fonctionnelle n'était pas significative. Bien que ceci puisse être dû aux limites de l'étude comme précédemment expliqué, cela pourrait également suggérer que la PTI-G est plus appropriée aux participants plus âgés, et plus appropriée pour les femmes quel que soit le classe d'âge. L'échec de la PTI-G et du JC à soulager les garçons de manière significative soulève la question sur la nécessité de disposer d'autres interventions pour assister les garçons affectés par la guerre à combattre les symptômes de la dépression. Dans la mesure où les interventions basées sur la psychothérapie de groupe ou basées sur l'activité se sont montrées inefficaces, d'autres formes de psychothérapies individuelles ou une méthode entièrement nouvelle d'intervention seraient appropriées comme objets des futurs essais.

Cette étude suggère que des interventions psychologiques efficaces peuvent être conduites dans des communautés de faibles niveau de vie, d'éducation, et en zone rurale (mêmes affectées par la guerre); il en va de même pour les essais permettant d'évaluer adéquatement ces interventions. Lorsque des programmes humanitaires ou thérapeutiques se basent sur la sévérité des symptômes pour leurs évaluations, les fluctuations normales de la sévérité dans le temps, ainsi que la régression vers la moyenne feront toujours observer une apparente amélioration quel que soit l'efficacité réelle de l'intervention. Pour une détermination précise de leurs efficacités, le recours à des études contrôlées est, de ce fait, indispensable.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Paul Bolton, MBBS, Center for Refugee and Disaster Response, Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, 615 N Wolfe St, Room E8646, Baltimore, MD, 21205 (pbolton{at}jhsph.edu).

Les affiliations des auteurs sont indiquées à la fin de cet article.

Contributions des auteurs: Le Dr Bolton a eu un accès complet à toutes les données de l'étude et accepte la responsabilité de l'intégrité des données et de l'exactitude de l'analyse des données.

Conception et schéma de l'étude: Bolton, Betancourt, Bass.

Recueil des données: Bolton, Bass, Betancourt.

Analyse et interprétation des données: Bolton, Bass, Betancourt, Clougherty, Neugebauer, Murray, Verdeli.

Rédaction du manuscrit: Bolton, Bass, Betancourt, Speelman, Onyango, Clougherty, Neugebauer, Murray, Verdeli.

Analyse statistique: Bass, Betancourt, Neugebauer.

Supervision de l'étude: Bolton, Betancourt, Speelman, Onyango, Clougherty, Murray, Verdeli.

Liens financiers: Aucun rapporté.

Financement/Soutien: Ce projet a été finance seulement par la World Vision and War Child Holland. Les contributions du Dr Neugebauer ont été financées par la Ruth and David Levine Foundation.

Rôle des sponsors: Les deux organisations ont également procuré un soutien matériel incluant le temps passé par le staff local pour mener et superviser les interventions et aider dans les aspects logistiques à la fois dans le schéma de l'étude et les interventions, et ont aidé à superviser les enquêteurs. Aucune organisation n'a été impliquée dans la prise en charge ou l'analyse des données mais a fait des suggestions quant à l'interprétation des résultats. Ce staff a aussi revu et approuvé le manuscrit.

Autre contributions: Nous désirons remercier le personnel, les dirigeants locaux et les communautés qui nous ont accueillis pour travailler avec eux. Par ailleurs, nous désirons remercier à la fois les organisations pour leur implication dans l'amélioration de l'impact de leurs efforts humanitaires. Les deux organisations ont déjà commence à utiliser les résultats de cette étude pour informer de leur programmes actuels dans le Nord de l'Ouganda. Bien que n'ayant pas financé l'étude directement la méthodologie décrite dans cet article a été développée avec l'aide de la US Agency for International Development's Torture Victims Fund.

Affiliations des auteurs: Applied Mental Health Research Group, Center for International Health and Development, Boston University School of Public Health, Boston, Massachusetts; Department of Mental Health, Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, Baltimore, Maryland; Department of Population and International Health, François-Xavier Bagnoud Center for Health and Human Rights, Harvard University School of Public Health, Boston, Massachusetts; War Child Holland, Gulu, Uganda,; World Vision Uganda, Kampla, Uganda; New York State Psychiatric Institute, Columbia University, New York, New York; Division of Epidemiology, New York State Psychiatric Institute, Columbia University College of Physicians and Surgeons, and Gertrude H. Sergievsky Center, Faculty of Medicine, College of Physicians and Surgeons, Columbia University, New York, New York; Teachers College, Columbia University; Dr Bolton est maintenant au Center for Refugee and Disaster Response, et le Dr Bass est maintenant au Department of Mental Health, Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, Baltimore, Maryland.


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