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Lorsque n'être pas supérieur peut n'être pas suffisant
Farhood Farjah, MD, MPH;
David R. Flum, MD, MPH
DANS CE NUMERO DU JAMA, VAN RULER ET COLLABORATEURS rapportent les
résultats d'un essai multicentrique randomisé comparant deux
stratégies de prise en charge opératoire de patients ayant une
péritonite sévère. Bien que cette étude n'ait pas
montré de bénéfice statistiquement significatif de la
stratégie utilisant une répétition à la demande de
la laparotomie par rapport à une répétition
programmée de la laparotomie en termes de mortalité ou de
morbidité majeure, il y a eu moins de ré-interventions, moins de
jours en hôpital et en unité de soins intensifs et des
coûts inférieurs en faveur de l'approche ré-intervention
à la demande. Les auteurs suggèrent que l'approche à la
demande peut être préférable chez les patients ayant une
péritonite sévère.
Le schéma de cet essai avait été guidé par des
travaux antérieurs suggérant de meilleurs résultats avec
la stratégie la
demande.2-5
Les auteurs ont donc émis l'hypothèse que le pourcentage
d'événements indésirables dans le groupe à la
demande serait inférieur de 16 % par rapport au groupe
ré-intervention programmée. Cette hypothèse de
supériorité (affirmant que la stratégie à la
demande est une meilleure stratégie) peut être
évaluée à l'aide de deux méthodes
(évaluation unilatérale ou bilatérale) en se basant sur
des suppositions statistiques sur la façon d'évaluer la
variabilité. La décision d'accepter ou de rejeter une
hypothèse de supériorité soit pour la laparotomie
à la demande soit pour la laparotomie programmée est prise
à l'aide d'un schéma utilisant un test bilatéral.
Inversement, un schéma unilatéral permettra seulement aux
investigateurs d'accepter ou de rejeter une hypothèse de
supériorité pour la stratégie à la demande.
Cette étude a utilisé un test unilatéral avec un
résultat non significatif, laissant trois scénarios possibles
pour expliquer cette observation: (1) les différences de 8%
observées en faveur de la stratégie à la demande
représentent la véritable différence pour les
critères entre l'approche à la demande et l'approche
programmée, mais l'étude n'avait pas assez de participants pour
distinguer cette différence de 8% par rapport au hasard seul (manque de
puissance); (2) les efficacités des stratégies à la
demande et programmée sont essentiellement équivalentes, et la
différence de 8% observée dans cette étude est due
à une variabilité aléatoire; ou (3) l'efficacité
de l'approche à la demande est en fait inférieure à la
stratégie programmée.
L'examen de l'intervalle de confiance pour la différence du risque
pour le critère principal (–5% à 20%) montre comment les
trois scénarios sont possibles car l'approche à la demande peut
avoir un risque supérieur de 5%, équivalent ou un risque
inférieur à 20% pour les événements
indésirables par rapport à la stratégie
programmée. Avec une évaluation unilatérale, l'absence de
preuve soutenant la supériorité n'a pas établi
d'équivalence (connue aussi sous le nom de non
infériorité) car la possibilité d'une
infériorité ne pouvait pas être exclue.
Plusieurs articles ont discuté le rationnel, la conduite
appropriée et le rapport des essais de non
infériorité.6-9
Le développement de cette méthodologie a émergé en
réponse aux questions auxquelles font face les agences de
régulation évaluant les nouveaux agents pharmaceutiques
proposant de nouveaux avantages par rapport à un traitement de
référence, tels qu'une meilleure tolérance,
tolérabilité, praticabilité et des coûts
inférieurs. L'approbation d'un nouvel agent serait seulement
appropriée si le nouveau médicament était aussi efficace
que le traitement de référence. La démonstration d'une
différence zéro dans les résultats entre des traitements
en compétition est impossible car des échantillons infiniment
larges seraient nécessaires. Au lieu de cela, la différence
acceptable la plus grande en faveur d'un traitement de référence
par rapport à un nouveau traitement (appelé la marge de non
infériorité) est désigné a priori puis
évalué. Le choix de cette référence est mieux
guidé lorsqu'on dispose des résultats d'une méta-analyse
d'essais randomisés antérieurs sur un traitement de
référence par rapport à un placebo et un jugement
d'expertise clinique sur la diminution maximale en efficacité
permissible pour montrer des avantages associés à la non
efficacité d'un nouveau traitement (comme la diminution des
coûts).
Les essais de non infériorité menés chez des patients
chirurgicaux et dans un contexte chirurgical posent de véritables
problèmes. Par exemple, la marge de non infériorité entre
une autre stratégie et une stratégie chirurgicale de
référence sera mieux guidée par des études
descriptives et une opinion d'expert—chacun étant sujet à
des sources variables de biais. En raison des contraintes éthiques et
pratiques, les essais contre placebo sur les interventions chirurgicales sont
rares, et donc le calcul d'une marge raisonnable de non
infériorité est difficile.
Un autre problème est que les essais de non
infériorité demandent généralement des
échantillons plus larges que les essais de supériorité.
Par exemple, si van Ruler et collaborateurs avaient conçu un essai de
non infériorité sur la répétition à la
demande de la laparotomie par rapport à une répétition
programmée, 2250 patients auraient été nécessaires
plutôt que les 231 patients qui ont été en fait
recrutés (taille de l'échantillon se basant sur une marge de non
infériorité de 5%, unilatéral de 0.05, puissance
de 80%, pas de sorties d'étude et un taux d'événements
indésirables de 65% dans le groupe ré-intervention
programmée). Bien qu'il existe des exemples d'essais réussis de
non infériorité en
chirurgie,10-12
l'incidence relativement basse de certains pathologies chirurgicales (dont la
péritonite sévère) rend la conduite de ces essais peu
réalisable en raison du besoin d'accumuler un nombre suffisant de
patients dans un délai de temps très court, dans un nombre
raisonnable de centres et avec un soutien financier de plus en plus
limité au niveau fédéral.
Les données de l'essai de supériorité bien
conçu et bien mené de van Ruler et
collaborateurs1
permettent d'apporter des informations pour le schéma des études
futures destinées à établir la supériorité,
l'infériorité ou la non infériorité des
ré-interventions de laparotomie à la demande par rapport
à celles programmées. Alors que les résultats
négatifs de cet essai de supériorité peuvent ne pas
être suffisants pour éliminer une autre interprétation,
ces résultats sont compatibles avec la notion qu'une approche utilisant
une nouvelle laparotomie à la demande peut améliorer le
pronostic et épargner les ressources sanitaires.
Affiliations des auteurs: Department of Surgery, University of
Washington, Seattle. Le Dr Flum est rédacteur associé,
JAMA.
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ARTICLES EN RAPPORT
JAMA. 2007;298:837.
Texte Complet
Comparaison entre ré-intervention par laparotomie programmée vs à la demande chez les patients ayant une péritonite sévère. Un essai randomisé.
Oddeke van Ruler, Cecilia W. Mahler, Kimberly R. Boer, E. Ascelijn Reuland, Hein G. Gooszen, Brent C. Opmeer, Peter W. de Graaf, Bas Lamme, Michael F. Gerhards, E. Philip Steller, J. W. Olivier van Till, Corianne J. A. M. de Borgie, Dirk J. Gouma, Johannes B. Reitsma, Marja A. Boermeester, et the Dutch Peritonitis Study Group
JAMA. 2007;298:865-874.
Résumé
| Texte Complet
Moment de la ré-intervention des patients atteints de péritonite grave
E. Patchen Dellinger
JAMA. 2007;298:923-924.
Texte Complet
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