Thomas Lawrence (13 avril 1769 à Bristol-7 janvier 1830) est
né à Bristol sur la mer d'Irlande en 1769, trois jours
après la mort du grand peintre et graveur italien,
Canaletto.
Si ce dernier avait été catalogué paysagiste
vénitien, Thomas Lawrence allait être classé portraitiste.
Ce qui les réunit ? La finesse de leur peinture et la profusion des
détails, mais alors que Canaletto nous donne un aperçu des
paysages de son temps, Lawrence nous rendra l'âme des
personnalités de son siècle.
En 1787, alors que gronde en France un certain mécontentement et que
le Roi Louis forge et lime des clés et serrures, l'Angleterre vit au
rythme des scandales de John Wilkes. En mai, à la suite de son
emprisonnement, a lieu le Massacre du Champs de Saint-Georges (7 morts, 15
blessés). John Wilkes, plusieurs fois élu aux Communes,
était chaque fois invalidé par la majorité acquise au
roi. Il avait ainsi posé sa candidature dans onze circonscriptions ;
des meetings se tenaient en sa faveur. Des pamphlets violents étaient
écrits contre le roi, les Lettres de Junius. Emeutes et grèves
se produisent durant le printemps et l'été, le pain est cher,
les salaires sont bas.
Un climat de révolte secoue l'Europe.
C'est dans cette ambiance, que le jeune Lawrence se rend à Londres
en 1787. Il y est reçu par Joshua Reynolds, alors le premier
président de la Royal Academy, créée en 1768. Lawrence y
entre comme étudiant. Il remplacera J. Reynolds à la tête
de cette institution en 1820, devenant ainsi le peintre officiel de la cour
anglaise.
Thomas Lawrence se situe dans la grande veine des peintres anglais,
Gainsborough, Reynolds. Ce sont de grands portraitistes, reproduisant
fidèlement le caractère des personnages avec de nombreux
détails. La peinture est d'une grande finesse. Leurs portraits ont fait
l'admiration de leurs contemporains, et cette admiration est facilement
compréhensible quand on voit l'habileté, la noblesse, le
dynamisme, la puissance des tableaux de Lawrence, le tout baignant dans une
délicate et chaude harmonie.
Lawrence a peint bien entendu d'autres sujets, surtout d'ailleurs par
lassitude d'être constamment classé comme portraitiste. Son
tableau Satan et Belzébuth est parmi ses tentatives les plus
osées pour sortir de cette classification.
Mais, c'est réellement dans le portrait qu'il a excellé.
Il est d'ailleurs cocasse de constater que s'il a peint de nombreux
portraits de Caroline de Brunswick, dont il aurait été l'amant,
celle-ci devint la future princesse de Galles. Lawrence peignit son
époux, George Frédéric Auguste, futur roi de
Grande-Bretagne, sous le nom de George IV. Il aura donc peint les deux
époux tout en partageant épisodiquement le lit d'un de ses
modèles. Caroline avait un mois de moins que Thomas Lawrence.
Leur liaison n'empêcha d'ailleurs pas Lawrence d'être
nommé peintre de la Cour, (avant l'arrivée de George sur le
trône d'Angleterre), puis de devenir plus tard le président de la
Royal Academy jusqu'à sa mort en 1830.
Il est probable que Thomas Lawrence ne fut d'ailleurs pas le seul amant de
Caroline de Brunswick, car, peu après la célébration du
mariage, les deux époux s'étaient séparés d'un
commun accord. Après la séparation, la conduite de Caroline
donna encore plus lieu aux médisances et commentaires voire à
des débats scandaleux.
George IV, en tant que Prince de Galles, mena lui-aussi une vie de luxe et
de débauche. Si la liste de ses maîtresses fut longue, il finit
par épouser Marie Anne Fitzherbert, une catholique romaine. Leur union,
bien que connue, resta officiellement secrète, mais devant l'insistance
de son père, George III, et pour des raisons bassement
financières, le futur George IV acceptait enfin d'épouser
Caroline. On sait ce qu'il advint.
Leur mariage permit néanmoins la naissance d'une fille, Charlotte
Augusta de Galles, qui allait épouser le futur roi des Belges,
Léopold 1er.
Deux fois son mari lui intenta une accusation publique d'adultère
(1806 et 1820) et, en montant sur le trône, en 1820, il ne permit point
qu'elle partageât son titre ni qu'elle assistât au couronnement
qui eut lieu l'année suivante.
Elle mourut peu après ce dernier affront en 1821.
L'histoire a tendance à se répéter dans la famille
royale anglaise.
Mais, Lawrence poursuivit sa carrière, peu sensible au tumulte
crée par Caroline de Brunswick. Il restait sensible au fait que le
Prince de Galles aimait le luxe et les arts.
En 1811, George devenait officiellement Régent d'Angleterre.
En 1815, Thomas Lawrence devenait Sir Thomas Lawrence.
En 1816, Lawrence dans son portrait du prince de Galles, régent du
Royaume-Uni, mettait en valeur la diplomatie anglaise et la force de celle-ci.
Portrait officiel un peu lourd, aux symboles politiques chargés,
Lawrence y représente George la main sur une table offerte par Louis
XVIII et une lettre du Pape VII. L'Angleterre règne, organise la
diplomatie européenne et le fait savoir par ce tableau. George IV finit
par l'offrir au Pape Pie VII.
George IV finira alcoolique, atteint de goutte, sénile et
probablement, comme son père, atteint de porphyrie.
En 1818, Lawrence se rend à Aix-la-Chapelle pour peindre les
souverains et diplomates qui y sont réunis pour le troisième
congrès. Durant ce congrès, la Sainte-Alliance abrégeait
le temps de l'occupation de la France. La Sainte-Alliance, formée le 26
septembre 1815 par les quatre monarchies européennes victorieuses de la
France révolutionnaire, afin de maintenir la paix en Europe dans un
premier temps, puis de se protéger mutuellement d'éventuelles
révolutions, y admettait la France en 1818.
Lawrence part alors visiter Vienne et Rome. Il y est reçu par la
noblesse européenne et des marques de distinctions. Sa
réputation l'a précédé, sa visite la confirme.
A son retour, Thomas Lawrence connaît la consécration avec sa
nomination au titre de président de la Royal Academy. Il succède
à Joshua Reynold, Benjamin West et James Wyatt, il le restera
jusqu'à sa mort en 1830.
Lui le peintre de la monarchie anglaise ne verra pas le retour
précipité en Angleterre des Bourbons et l'arrivée sur le
trône de France du « roi des Français »,
Louis-Philippe. Un siècle d'histoire et de bouleversements
européens avait passé, le siècle reprenait sa marche.