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  Vol. 296 No. 1, 5 Juillet 2006 TABLE OF CONTENTS
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Élévation des transaminases chez des adultes sains recevant 4 grammes par jour d'acétaminophène

Un essai contrôlé randomisé

Paul B. Watkins, MD; Neil Kaplowitz, MD; John T. Slattery, PhD; Connie R. Colonese, MS; Salvatore V. Colucci, MS; Paul W. Stewart, PhD; Stephen C. Harris, MD


RÉSUMÉ

Contexte Au cours d'un essai clinique portant sur une nouvelle association hydrocodone/acétaminophène, une forte incidence d'augmentation des transaminases sériques (ALAT) a été observée.

Objectifs Caractériser l'incidence et l'amplitude des élévations d'ALAT chez des participants sains recevant 4 g par jour d'acétaminophène, seul ou en association avec des opioïdes définis, par rapport à des participants sous placebo.

Schéma, cadre et participants: Étude longitudinale randomisée en simple aveugle, contrôlée contre placebo, de 5 traitements, en groupes parallèles, avec régime alimentaire contrôlé (repas fournis), réalisée en milieu hospitalier et incluant 145 adultes sains répartis dans deux unités de pharmacologie clinique américaines.

Intervention Chaque participant recevait un placebo (n = 39), une des trois combinaisons acétaminophène/opioïde (n = 80), ou de l'acétaminophène en monothérapie (n = 26). Chaque traitement actif incluait 4 g par jour d'acétaminophène, correspondant à la posologie quotidienne maximale recommandée. La durée de traitement projetée était de 14 jours.

Principaux critères de mesure Biochimie hépatique et concentrations minimales d'acétaminophène, mesurées quotidiennement pendant 8 jours, puis à 1 ou 2 jours d'intervalle.

Résultats Aucun des 39 participants recevant un placebo ne présentait de pic des ALAT de plus de 3 fois la limite supérieure de la normale, à la différence des participants des 4 groupes de traitement avec acétaminophène, y compris ceux du groupe acétaminophène seul, qui présentaient une incidence de 31 % à 44 %. Comparé au placebo, le traitement par acétaminophène était associé à un pic médian des ALAT visiblement supérieur (ratio des médianes, 2,78; intervalle de confiance à 95 %, 1,47-4,09; p < 0,001). Les concentrations minimales d'acétaminophène ne dépassaient le seuil thérapeutique chez aucun des participants et, après arrêt du traitement actif, diminuaient souvent jusqu'à des niveaux indétectables avant la résolution des élévations d'ALAT.

Conclusions L'initiation répétée de doses quotidiennes de 4 g d'acétaminophène chez les adultes sains est associée à une élévation des taux d'ALAT qui ne semble pas majorée par un traitement concomitant par opioïde. Les antécédents d'usage d'acétaminophène doivent être pris en compte dans le diagnostic différentiel des élévations des transaminases sériques, même en l'absence de concentrations mesurables de la substance dans le sérum.

JAMA. 2006 ; 296 : 87-93.


L' acétaminophène fait partie des analgésiques en vente libre les plus fréquemment utilisés. Dans le traitement des douleurs modérées à sévères, les médecins prescrivent souvent des préparations associant opioïde et acétaminophène. Ces préparations ont démontré un bénéfice dans le soulagement de la douleur et sont considérées comme dénuées de risque dans la limite des doses recommandées.

Au cours des premières phases de développement d'un nouveau produit d'association contenant de l'hydrocodone et de l'acétaminophène, nous avons observé une incidence étonnamment forte d'élévations des taux d'alanine aminotransférase (ALAT) sérique chez les participants recevant le produit d'association à des doses totales quotidiennes contenant 4 g par jour d'acétaminophène, soit la limite supérieure de la posologie recommandée (Purdue Pharma L.P., données disponibles sur demande auprès des auteurs). L'étude a été interrompue précocement en raison de la fréquence et de l'amplitude des élévations d'ALAT dans les groupes de traitement actif comparés au groupe placebo.

Dans la mesure où aucune élévation d'ALAT n'avait été généralement rapportée chez les adultes recevant les doses recommandées d'acétaminophène, il a été suggéré que les opioïdes pouvaient augmenter la susceptibilité à la toxicité hépatique de cette substance.

Notre étude a donc été conçue pour étudier l'hépatotoxicité chez des participants recevant de l'acétaminophène en monothérapie, des associations opioïde/acétaminophène, ou un placebo.


MÉTHODES

Dans cette étude (longitudinale, bicentrique, randomisée, en simple aveugle [participants aveugles au traitement attribué], contrôlée contre placebo, de 5 traitements en groupes parallèles), les participants éligibles étaient des volontaires sains (hommes et femmes) sans potentiel de procréation, issus de tout groupe ethnique ou racial, et âgés de 18 à 45 ans. Les participants étaient déclarés sains sur la base de leurs antécédents médicaux, d'un examen physique, de leurs résultats d'électrocardiogramme et d'analyses biologiques cliniques (avec résultats négatifs aux analyses d'urine, de l'antigène de surface du virus de l'hépatite B et des anticorps anti-VHC). Aucun participant n'est entré dans l'étude avec un traitement concomitant. La race/ethnicité était auto-rapportée et le pays d'origine n'était pas consigné.


Figure 1
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Figure 1.. Distribution des patients de l'étude.


Le protocole de l'étude a été approuvé par le comité d'éthique de chaque centre. Les participants ont donné leur consentement éclairé écrit avant d'entrer dans l'étude et ont été accueillis dans l'un des 2 centres de recherche clinique pendant toute la durée de l'essai.

Les participants recevaient 1 des 5 régimes thérapeutiques (définis dans le paragraphe suivant), toutes les 6 heures, par voie orale, pendant une durée maximale de 14 jours (56 doses), selon un schéma de randomisation au rapport de 1:1:1:1:1,5. L'attribution du traitement était effectuée selon un schéma de randomisation généré centralement, avec une taille de bloc de 11 participants (Figure 1).

Description des différents traitements

Traitement 1: Percocet, 2 comprimés (7,5 mg d'oxycodone/500 mg d'acétaminophène; produit du commerce; numéro de lot, 320481NV) plus 2 comprimés placebo (numéro de lot, CB26-06).

Traitement 2: Dilaudid, 2 comprimés (2 mg d'hydromorphone; produit du commerce; numéro de lot, 03DLT21004), Tylenol Extra Fort, 2 caplets (500 mg d'acétaminophène; produit du commerce; numéro de lot, EDA041).

Traitement 3: Deux comprimés de morphine (15 mg; produit du commerce; numéro de lot, 356926A), Tylenol Extra Fort, 2 caplets (500 mg d'acétaminophène; produit du commerce; numéro de lot, EDA041).

Traitement 4: Deux comprimés placebo (numéro de lot, CB26-06), Tylenol Extra Fort, 2 caplets (500 mg d'acétaminophène; produit du commerce; numéro de lot, EDA041).

Traitement 5: Deux comprimés placebo (numéro de lot, CB26-06) plus 2 comprimés placebo (numéro de lot, CB-2003-01).

La biochimie hépatique de routine (bilirubine, aspartate aminotransférase [ASAT], ALAT, phosphatases alcalines) et l'alpha-glutathion S-transférase (GST alpha), marqueur d'atteinte hépatocellulaire, étaient mesurés quotidiennement jusqu'au 8ème jour. Par la suite, les valeurs biochimiques étaient mesurées à des jours alternés ou quotidiennement chez les participants présentant des élévations (>1 fois la limite supérieure de la normale [LSN]). Le protocole requérait un arrêt du traitement pour tout participant ayant des concentrations d'ALAT ou d'ASAT supérieures à 120 U/L (3 x LSN).

Les évaluations de l'étude incluaient les événements indésirables, les tests biologiques, les signes vitaux, et la pharmacocinétique. Les évaluations de fin d'étude incluaient des analyses biologiques, des examens physiques et les signes vitaux.

Pharmacocinétique

Les concentrations plasmatiques d'acétaminophène étaient mesurées quotidiennement chez tous les participants au creux d'activité du matin, ainsi que sur un intervalle unique entre deux doses de 6 heures, le troisième jour du traitement (48-54 heures sous traitement). La série temporelle de concentrations d'acétaminophène des participants a été utilisée pour estimer l'aire sous la courbe (48-54 heures), la concentration maximale (48-54 heures), et le temps nécessaire pour atteindre la concentration maximale (48-54 heures), par des méthodes non compartimentales utilisant le logiciel validé de pharmacocinétique WinNonLin (Pharsight Corp., Mountain View, Californie).

Régime alimentaire

Le régime alimentaire des participants se composait uniquement de plats complets préparés standardisés, servis pour le petit déjeuner, le déjeuner, le dîner et en collation nocturne. Les participants n'avaient pas accès à des aliments ou à des boissons autres que ceux fournis. Les calendriers alimentaires n'ont pas été recueillis.

Analyse statistique

L'analyse de l'impact des opioïdes sur le risque d'hépatotoxicité de l'acétaminophène a été effectuée sur une base en intention de traiter modifiée et axée sur des valeurs longitudinales d'ALAT, d'ASAT et de bilirubine totale, fournies par un laboratoire central. Un seuil bilatéral de p < 0,05 était considéré comme significatif. Toutes les analyses ont été effectuées à l'aide du logiciel statistique SAS (SAS Institute Inc., Cary, Caroline du Nord).

Des méthodes descriptives et déductives ont été appliquées aux paramètres résumés: (1) LabMax (pic post-traitement de chaque participant); (2) LabRatio (ratio du pic sur valeur initiale); (3) LabTmax (temps d'obtention du pic observé); (4) indicateurs binaires de LabMax > K, avec K = 1, 2, 3, 5 ou 8 LSN pour l'ALAT et l'ASAT, et K = 1 ou 1,5 pour la bilirubine totale.

Après transformation logarithmique, les valeurs LabMax et LabRatio ont été analysées au moyen d'un modèle d'analyse de covariance, avec le traitement, le centre et la valeur prétraitement (jour 1) en effets fixes. Les résultats des modèles ajustés ont été utilisés pour obtenir des estimations statistiques non biaisées (avec intervalles de confiance), par exponentialisation des moyennes des moindres carrés (et de leur seuil de confiance à 95 %).

Les modèles des LabRatio et LabMax ont également été utilisés pour tester l'hypothèse nulle supposant que la réponse moyenne (échelle log) à l'acétaminophène est invariante dans l'administration concomitante des opioïdes étudiés. Plus globalement, ces modèles ont permis de tester toutes les comparaisons appariées entre les 5 régimes thérapeutiques. Les analyses des pics incluaient le calcul des intervalles de confiance pour la différence entre les moyennes arithmétiques de chaque traitement. En complément de ces analyses basées sur un modèle, des analyses de sensibilité reposant sur des méthodes non paramétriques ont été réalisées. Des procédures diagnostiques, des analyses secondaires et des analyses exploratrices ont également été effectuées.

En outre, des modèles de régression linéaire multivariés ont été utilisés pour étudier la valeur prédictive des variables indépendantes incluant le traitement, la valeur initiale d'ALAT, l'indice de masse corporelle (calculé par le poids en kilogrammes divisé par le carré de la taille en mètres), la race/ethnicité, le centre, les autres mesures initiales et démographiques, ainsi que les interactions entre ces facteurs. L'analyse en composantes principales a été utilisée pour étudier les relations entre les variables de l'étude.

Les estimations des élévations d'ALAT ont été obtenues par classification des résultats obtenus pour chaque traitement (élévations > 1 x, > 2 x, > 3 x, > 5 x, et > 8 x LSN). Pour finir, un test de Fisher a été appliqué à l'estimation de l'association entre le régime thérapeutique et l'élévation d'ALAT.


RÉSULTATS

Sur les 343 participants pré évalués, 147 ont été randomisés. Deux participants randomisés ont reçu une dose unique du traitement de l'étude le 1er jour, avant d'être exclus en raison de résultats positifs aux tests d'urine. Les 145 participants restants constituaient la population en intention de traiter modifiée.

Les groupes de traitement formés par les 145 participants de la population en intention de traiter modifiée étaient similaires en caractéristiques démographiques (Tableau 1).


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Tableau 1.. Caractéristiques de la population de l'étude par groupe de traitement*.


Aucune différence significative dans l'amplitude et l'incidence des élévations d'ALAT n'a été détectée dans les groupes recevant les combinaisons de traitement actif. Aucune différence statistiquement significative n'a été observée dans les log pic ALAT des différents groupes de traitement actif. En revanche, la réponse moyenne au placebo était statistiquement significativement différente par rapport à celle de chacun des traitements actifs. L'hypothèse nulle supposant que les traitements actifs ne différent pas du placebo a été rejetée (p < 0,001). Dans les analyses exploratrices, l'exposition à un quelconque des traitements avec acétaminophène était le meilleur facteur prédictif de réponse élevée d'ALAT.

Seul 1 des 39 participants (3 %) sous placebo a présenté des taux d'ALAT supérieurs à 2 fois la LSN à un moment donné de l'étude, et aucun des participants sous placebo n'a présenté de taux d'ALAT supérieur à 3 fois la LSN (Tableau 2). En revanche, dans chacun des 4 groupes de traitement actif, plus de 19 % des participants ont présenté des taux d'ALAT supérieurs à 5 fois la LSN. Un profil similaire d'élévations d'ALAT avec le traitement était observé lorsque les pics ALAT des participants se normalisaient autour de leur valeur initiale (Tableau 3). Seul 1 des 39 (3 %) participants recevant un placebo a présenté un pic ALAT supérieur à 5 fois la valeur initiale, tandis que 29 sur 106 (27 %) participants des groupes de traitement actif ont présenté des pics ALAT de plus de 8 fois la valeur initiale.


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Tableau 2.. Incidence des pics d'alanine aminotransférase par multioples de la limite supérieure de la normale*.



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Tableau 3.. Incidence des pics d'alanine aminotransférase par multiples de la valeur initiale d'alanine aminotransférase des participants*.


Les valeurs d'ALAT individuelles des participants et moyennes des groupes au cours du temps sont présentées en Figure 2 pour le groupe placebo, le groupe de traitement par acétaminophène seul, et pour les 3 groupes composites de traitement par opioïde/acétaminophène. Les profils temporels des élévations d'ALAT étaient similaires dans tous les groupes de traitement actif, y compris le groupe acétaminophène seul. Il n'a été observé aucune élévation d'ALAT de plus de 3 fois la LSN (120 U/L) avant le jour 3 dans chacun des groupes de traitement. Après arrêt de l'administration de doses en raison d'élévations d'ALAT de plus de 3 fois la LSN, les taux d'ALAT ont continué d'augmenter pendant 0 à 4 jours (médiane, 2 jours) et se sont maintenus à plus de 3 fois la LSN pendant 1 à 11 jours (médiane, 6,5 jours). Le taux le plus élevé était de 636 U/L ({approx} 16 x LSN) et a été observé chez un participant recevant de l'hydromorphone associé à l'acétaminophène. Dans le groupe acétaminophène seul, le taux d'ALAT le plus élevé observé était de 575 U/L ({approx} 14 x LSN).


Figure 2
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Figure 2.. Alanine transférase sérique versus temps dans l'étude.


Le Tableau 4 présente les estimations statistiques des différences dans les pics ALAT entre les traitements. Les résultats montrent une élévation statistiquement significative du pic ALAT médian dans les groupes de traitement combinant opioïde et acétaminophène ou de traitement par acétaminophène seul par rapport au groupe placebo. Les pics ALAT médians pour les traitements actifs étaient de 2,57 à 3,08 fois supérieurs à ceux du placebo. En revanche, il n'a pas été observé de différence statistiquement significative entre les groupes de traitement actif. Ces résultats ont été étayés par des résultats comparables obtenus dans une analyse non paramétrique.


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Tableau 4.. Comparaison entre traitements du pic d'alanine aminotransférase (LabMax pour l'alanine aminotransférase).


Les élévations d'ASAT étaient généralement inférieures à celles des ALAT, mais suivaient une évolution temporelle similaire. Les taux de GST alpha augmentaient en fonction des valeurs prétraitement chez les participants avec élévations d'ALAT, et avaient également un profil temporel similaire (données disponibles sur demande). Les pics d'ALAT et de GST alpha étaient fortement corrélés (coefficient de corrélation de Pearson = 0,89; données disponible sur demande). Il n'a pas été observé d'anomalies ou de tendances constantes dans la bilirubine totale ou les phosphatases alcalines, et tous les participants avec élévations d'ALAT étaient asymptomatiques. Toutes les élévations d'ALAT significatives se sont résolues après arrêt du traitement, à l'exception d'un cas dans le groupe morphine plus acétaminophène qui a été perdu de vue après le jour 19 (avec des ALAT de 194 le 18ème jour et de 168 le 19ème jour).

Afin de déterminer les caractéristiques des participants potentiellement associées à l'augmentation de susceptibilité aux élévations d'ALAT, des analyses exploratrices ont été effectuées à l'aide d'une régression linéaire multivariée pour le log pic ALAT. Les variables indépendantes définies pour le modèle final, par ordre de significativité statistique nominale décroissante, étaient le groupe de traitement, le log ALAT initiale, et la race/ethnicité. Les facteurs prédictifs potentiels rejetés incluaient les autres caractéristiques initiales et démographiques. Les résultats de l'analyse exploratrice en composantes principales concordaient avec ceux du modèle linéaire.

Sur tous les participants des groupes de traitement recevant de l'acétaminophène, le risque relatif de pic ALAT supérieur à 3 fois la LSN pour les Hispano-américains versus non Hispaniques était de 1,9 (intervalle de confiance à 95 %, 1,1-3,3).

L'AUC (aire sous la courbe) moyenne d'acétaminophène de 48 à 54 heures et la concentration maximale de 48 à 54 heures étaient comparables pour tous les traitements actifs, et s'échelonnaient respectivement de 39,0 à 47,2 µg·h/mL et de 12,6 à 16,7 µg/mL. Aucune différence n'a été détectée dans les concentrations minimales moyennes d'acétaminophène, les concentrations maximales ou l'aire sous la courbe, entre les participants présentant des élévations d'ALAT (>1 x LSN ou > 3 x LSN) et ceux sans élévation (données disponibles sur demande). Chez les participants présentant des élévations d'ALAT de plus de 3 fois la LSN pendant le traitement, les concentrations d'acétaminophène diminuaient rapidement après arrêt de l'administration de doses. En conséquence, l'acétaminophène était souvent indétectable alors que les niveaux d'ALAT restaient encore élevés. La Figure 3 présente l'évolution temporelle des concentrations d'acétaminophène, d'ALAT et d'ASAT chez les participants du groupe acétaminophène seul présentant l'élévation d'ALAT la plus importante.


Figure 3
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Figure 3.. Concentrations chez les participants randomisés dans le groupe acétaminophène seul ayant les pics d'alanine aminotransférase les plus élevés.



COMMENTAIRES

Dans cette étude de 5 groupes, en simple aveugle, randomisée, contrôlée contre placebo, nous avons trouvé que chacun des 3 traitements opioïde/acétaminophène produisait fréquemment des élévations d'ALAT. Nous avons été surpris d'observer que le traitement par acétaminophène seul, à la dose maximale recommandée de 4 g par jour, produisait également de fréquentes élévations d'ALAT. En effet, les élévations d'ALAT produites par le traitement par acétaminophène en monothérapie différaient très peu, en fréquence ou en amplitude, de celles produites par les associations thérapeutiques opioïde/acétaminophène. Ces données réfutent donc le rôle des opioïdes dans les élévations d'ALAT observées.

En dehors de l'acétaminophène, les causes éventuelles d'élévation des ALAT n'étaient pas claires. Afin de minimiser les sources externes de variabilité, tous les participants ont été placés, pendant l'étude, dans des unités de pharmacologie clinique, afin qu'ils partagent un même espace vital et reçoivent des repas préparés et standardisés. Des élévations d'ALAT précédemment observées chez des adultes sains recevant un placebo1 avaient été attribuées à des variations dans le régime alimentaire, plus particulièrement entre le régime standard et le régime à haute teneur calorique riche en apport glucidique.2 Cependant, dans la présente étude, le régime alimentaire constitue une explication peu probable des différences observées dans les élévations d'ALAT entre les groupes de traitement, du fait que tous les participants recevaient les mêmes repas. Il est également peu probable qu'un facteur infectieux ou environnemental soit responsable de ces élévations, compte tenu du nombre relativement restreint d'élévations observé dans le groupe placebo de comparaison. Enfin, l'élévation continue des ALAT pendant 1 à plusieurs jours suivant l'arrêt du traitement et leur rapide diminution subséquente s'accordent avec la toxicité hépatique observée après un surdosage chronique d'acétaminophène.3 Nous concluons donc que les élévations d'ALAT observées résultent du traitement par acétaminophène à la dose quotidienne de 4 g.

Aucune association entre la dose thérapeutique d'acétaminophène et les élévations d'ALAT n'a été rapportée précédemment. Plusieurs études4-8 ont mesuré l'ALAT sérique entre les 5ème et 30ème jours suivant l'initiation d'un traitement par acétaminophène et ont clairement établi que de très mineures, voire aucune, élévations d'ALAT étaient observées. Ces études ont inclus diverses populations de patients généralement âgées. Nous n'avons trouvé que 3 études publiées portant sur le traitement quotidien par acétaminophène de jeunes adultes sains, dans lesquelles l'ALAT sérique était contrôlée après 5 jours de traitement. Dans la première,9 l'ALAT était contrôlée << au moins bi-hebdomadairement >>, lors du traitement de 20 volontaires adultes sains par 4 g par jour d'acétaminophène. Un seul participant a présenté une élévation asymptomatique d'ALAT de plus de 4 fois la LSN et d'ASAT de plus de 15 fois la LSN au jour 16. Bien que les valeurs biologiques individuelles des autres participants n'aient pas été communiquées, certaines données dans le manuscrit semblaient indiquer une augmentation moyenne de l'ALAT entre le jour 4 et le jour 11, avec un pic à environ 1,5 fois la LSN. Dans la seconde étude,10 dans laquelle 15 participants sains recevaient quotidiennement 3,9 g d'acétaminophène pendant 7 jours, "des augmentations mineures des transaminases (moins de deux fois la normale) ont été observées (...)". Dans la troisième étude,11 20 hommes sains recevaient quotidiennement 4,0 g d'acétaminophène et l'ALAT sérique était contrôlée deux fois par semaine. Bien que ses variations aient été décrites comme "globalement (...) mineures", il a été noté que 2 participants présentaient une élévation dépassant 4 fois le niveau initial et qu'un autre était sorti de l'étude sur cette base (ALAT {approx} 4 x LSN). Ainsi, les données antérieures de la littérature soutiennent nos observations quant à la susceptibilité d'un sous-groupe d'adultes sains à présenter des élévations d'ALAT lors d'un traitement répété par 4 g par jour d'acétaminophène.

L'incidence des élévations d'ALAT observée dans notre étude d'adultes sains est supérieure à celle rapportée précédemment dans des études similaires.9-11 Cela pourrait notamment être lié à la proportion relativement élevée d'individus hispaniques dans notre étude, notre analyse exploratrice ayant suggéré que l'origine hispanique était associée à une susceptibilité accrue aux élévations d'ALAT. Des différences ethniques et raciales dans la pharmacocinétique de l'acétaminophène ont été rapportées,12,13 mais nous ne connaissons pas d'étude comparant les différences du métabolisme de l'acétaminophène entre les Hispaniques et d'autres ethnies. Il a été rapporté des niveaux initiaux d'ALAT plus élevés chez les Hispaniques que chez les Caucasiens,14 qui pourraient être liés à une incidence supérieure de stéatose hépatique chez les Hispaniques.15 Bien qu'une stéatose hépatique puisse rendre plus susceptible à des anomalies en présence d'acétaminophène, l'indice de masse corporelle, qui est typiquement élevé chez les patients avec stéatose hépatique, n'était pas corrélé avec les élévations d'ALAT dans cette étude. Il convient cependant de noter que l'indice de masse corporelle maximum chez les participants de cette étude était de 31, et qu'en conséquence tous les effets de cette variable peuvent ne pas avoir été perceptibles. Il semble néanmoins improbable que la stéatose hépatique ait une grande part de responsabilité dans la variation de susceptibilité observée dans notre population.

Le fait que des élévations d'ALAT plus que mineures n'aient pas été rapportées dans des études impliquant des populations de patients traités par 4 g quotidiens d'acétaminophène est inexpliqué. Outre un effet possible de l'âge, nous suggérons qu'une histoire de traitement répété par acétaminophène pourrait réduire la probabilité d'élévations d'ALAT lors d'une médication ultérieure par cette substance. Un phénomène similaire a été rapporté avec la tacrine. Il a été observé que des patients ayant présenté des élévations d'ALAT au cours d'un traitement par tacrine avaient une réponse d'ALAT réduite lors de la réintroduction du médicament, même lorsque le traitement était initié plusieurs semaines après l'arrêt de la substance.16 Les mécanismes sous-jacents à cette "adaptation" durable ne sont pas connus,17 mais nous pensons qu'elle pourrait expliquer l'incidence réduite d'élévations d'ALAT dans les populations de patients par rapport aux participants sains de l'étude.

L'importance clinique des élévations d'ALAT observées dans notre étude est également peu claire. L'amplitude de ces augmentations et l'élévation concomitante d'ASAT et de GST alpha confirment l'origine hépatique de ces enzymes. Un taux d'ALAT de plus de 3 fois la LSN est typiquement considéré comme cliniquement significatif et, s'il est confirmé, justifie généralement de nouvelles recherches d'affection hépatique. En fait, il existe peu de substances approuvées connues pour produire une élévation d'ALAT avec une amplitude et une incidence comparables à celles observées dans cette étude (plus d'un tiers des participants traités par acétaminophène présentant des élévations d'ALAT > 3 x LSN). Dans d'autres contextes, la fréquence et l'amplitude des élévations que nous avons observées seraient considérées comme un signe de problèmes potentiels de tolérance hépatique. Cependant, l'acétaminophène dispose de données de tolérance nettement favorables dans la posologie recommandée, et l'innocuité du traitement chronique avec 4 g par jour a été confirmée.8,18-21

Nos observations illustrent donc l'existence d'une incertitude quant au potentiel des élévations des transaminases à prédire un risque d'affection hépatique grave dans certains cas. Nous pensons que les élévations d'ALAT observées se seraient dissipées si l'administration d'acétaminophène avait été poursuivie, mais cette question devra faire l'objet de futures études.

Une observation cliniquement importante était que les élévations d'ALAT survenaient en l'absence de concentrations plasmatiques d'acétaminophène normalement considérées comme hépatotoxiques. En effet, au temps d'obtention du pic des ALAT, les concentrations d'acétaminophène étaient fréquemment proches ou inférieures aux seuils de détection. Les concentrations plasmatiques d'acétaminophène pourraient donc avoir un intérêt limité dans la recherche d'une relation causale entre les élévations d'ALAT et les doses thérapeutiques.

Nous concluons que l'initiation, chez les adultes sains, d'un traitement par acétaminophène à la dose quotidienne maximale recommandée de 4 g, pendant 4 jours ou plus, génère fréquemment une augmentation des transaminases sériques, souvent persistante lorsque les concentrations de la substance ne sont plus détectables. Un antécédent d'usage répété d'acétaminophène doit donc être recherché lors de l'exploration d'élévations inexpliquées des transaminases sériques, observées dans la pratique clinique ou au cours d'essais cliniques.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Paul B. Watkins, MD, General Clinical Research Center, Campus Box 7600, Rm 3005 APCF, Chapel Hill, NC 27599-7600 (pbwatkins{at}med.unc.edu).

Contributions des auteurs: le Dr Watkins a eu un accès complet à toutes les données de l'étude et accepte la responsabilité de l'intégrité des données et de l'exactitude de l'analyse des données.

Conception et schéma de l'étude: Watkins, Kaplowitz, Slattery, Harris, Colonnese.

Recueil des données: Harris, Colonnese.

Analyse et interprétation des données: Watkins, Kaplowitz, Slattery, Colucci, Stewart, Harris, Colonnese.

Rédaction du manuscrit: Watkins, Colucci, Harris, Colonnese.

Revue critique du manuscrit: Watkins, Kaplowitz, Slattery, Colucci, Stewart, Harris, Colonnese.

Analyse statistique: Watkins, Colucci, Stewart, Harris, Colonnese.

Obtention du financement: Slattery, Harris.

Aide administrative, technique et matérielle: Colonnese.

Supervision de l'étude: Harris.

Liens financiers: les Drs Watkins, Kaplowitz et Slattery ont déclaré avoir travaillé comme consultants rémunérés pour Purdue Pharma L.P. au cours de la planification et de l'exécution de l'étude, mais n'ont pas été payés pour la préparation de cet article. Les fabricants du Tylenol, Dilaudid et Percocet sont McNeil, Knoll et Endo Labs, respectivement. Les Drs Watkins, Kaplowitz et Stewart ont déclaré n'avoir jamais eu de liens financiers avec ces compagnies. Le Dr Slattery a déclaré avoir travaillé comme consultant pour McNeil. La morphine est un médicament générique ayant plusieurs fabricants, nous n'avons pas inclus cette information qui peut être obtenue sur demande.

Analyse statistique indépendante: Paul Stewart, PhD, professeur de biostatistiques à l'Université de North Carolina School of Public Health, a eu accès à toutes les données utilisés pour les analyses primaires rapportées. Il a réalisé une vérification indépendante des calculs présentés lors de ces analyses primaires (c'est-à-dire, le test principal de l'hypothèse nulle avec absence de différence pour les traitements actifs avec les informatisations des trois tableaux de cet article qui comprenait l'ensemble des résultats principaux discutés dans l'abstract, dans la section résultats et dans la section commentaire de cet article). A la suite de cette vérification, des corrections mineures ont été faites concernant les résultats rapportés dans cet article. De plus, en se basant sur la revue des documents du protocole de l'étude et sur l'inventaire de toutes les données recueillies dans l'étude, le Dr Stewart a confirmé que l'ensemble des analyses présentées dans cet article étaient appropriées et suffisantes. Le Dr Stewart n'a pas été rétribué directement pour cette analyse; cependant avec les études en cours de l'UNC GCRC dans ce domaine, le comité scientifique consultatif du GCRC a été d'accord que le travail réalisé par le Dr Stewart devait être considéré comme faisant partie d'un travail financé par une bourse GCRC (RR000046).

Financement/Soutien: cette étude a été totalement financée par Purdue Pharma L.P. et a été menée par deux organisations sous contrat de recherche. Le contrôle et l'interprétation des données ont été partagés par tous les auteurs. Le travail du Dr Stewart a bénéficié du soutien d'une bourse du National Institutes of Health n° RR-000046.

Rôle du sponsor: le manuscrit soumis originalement a été revue de façon classique pour une publication chez Purdue Pharma, mais aucune modification n'a été suggérée.

Affiliations des auteurs: Department of Medicine, University of North Carolina, Chapel Hill (Dr Watkins); Keck School of Medicine, Department of Medicine, University of Southern California, Los Angeles (Dr Kaplowitz); Departments of Pharmacology and Medicine, University of Washington, Seattle (Dr Slattery); Boehringer-Ingelheim Pharmaceuticals, Inc, Ridgefield, Conn (Ms Colonese); Department of Clinical Pharmacology and Clinical Pharmacokinetics, Purdue Pharma L.P., Stamford, Conn (Mr Colucci and Dr Harris); Department of Biostatistics, University of North Carolina, Chapel Hill (Dr Stewart).


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ARTICLE EN RAPPORT

JAMA. 2006;296:9.
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