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  Vol. 299 No. 6, 13 février 2008 TABLE OF CONTENTS
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PAGES DU PRATICIEN
Traitement médical du cancer du testicule avancé

Darren R. Feldman, MD; George J. Bosl, MD; Joel Sheinfeld, MD; Robert J. Motzer, MD

JAMA. 2008;299(6):672-684 www.jama.com


RÉSUMÉ

Contexte Le traitement médical des tumeurs germinales testiculaires à un stade avancé a évolué au cours des 30 dernières années, avec une survie à long terme aujourd’hui atteinte chez la majorité des patients. Les cliniciens doivent se familiariser avec les schémas thérapeutiques disponibles pour ce cancer, ainsi qu’avec leurs effets indésirables.

Objectif Passer en revue les traitements utilisés dans les tumeurs germinales testiculaires avancées et leurs complications à court et long terme.

Acquisition des données Une recherche a été effectuée dans toute la littérature de langue anglaise (de 1966 à octobre 2007) sur la base de données MEDLINE, en utilisant les termes néoplasies, cellule germinale, ou néoplasies embryonnaire ou testiculaire, avec une limitation aux humains, au traitement médicamenteux, aux complications et à la mortalité. Une recherche a également été effectuée dans le registre Cochrane des essais cliniques contrôlés (jusqu’en octobre 2007), à l’aide des termes cancer testiculaire ou tumeurs germinales. Les bibliographies ont été revues pour extraire d’autres articles pertinents. Cent quatre vingt six articles ont été sélectionnés sur la base de leur pertinence par rapport au traitement du cancer testiculaire avancé, aux complications associées, et aux rechutes tardives, en privilégiant les études contrôlées randomisées.

Synthèse des données Le traitement des tumeurs germinales testiculaires avancées par une association chimiothérapeutique incluant le cisplatine est basé sur la stratification des risques (pronostic favorable, intermédiaire ou péjoratif) du patient en fonction des caractéristiques cliniques avant traitement de valeur pronostique. Des études cliniques ont démontré qu’environ 90 % des patients classifiés comme ayant un bon pronostic obtiennent une rémission complète durable avec 4 cycles d’étoposide et de cisplatine ou 3 cycles de cisplatine, étoposide et bléomycine. Des réponses complètes sont obtenues moins fréquemment chez les patients avec tumeurs germinales de pronostic intermédiaire et défavorable, chez lesquels 4 cycles de chimiothérapie par bléomycine, étoposide et cisplatine restent le traitement de référence. Les protocoles de deuxième et troisième lignes, incluant la chimiothérapie à forte dose, présentent également un potentiel curatif. Les toxicités chroniques associées au traitement incluent les maladies cardiovasculaires, la stérilité, et les malignités secondaires. Des rechutes tardives peuvent également survenir.

Conclusions Les études cliniques ont permis l’élaboration de recommandations thérapeutiques fondées sur les preuves pour le cancer du testicule avancé, basées sur une stratification des risques. Les cliniciens doivent se familiariser avec les complications potentielles de ces traitements.


Le cancer du testicule est le diagnostic de cancer le plus répandu chez les hommes de 15 à 35 ans, avec environ 8 000 cas dépistés chaque année aux États-Unis.1 La majorité (95 %) des néoplasies testiculaires sont des tumeurs germinales (TG), les autres formes (tumeurs des cordons sexuels et/ou du stroma, lymphomes) étant plus rares. Les tumeurs germinales peuvent également être extra-gonadiques, et siéger notamment au niveau du médiastin et du rétropéritoine.

Des progrès considérables ont été réalisés dans le traitement médical du cancer testiculaire avancé, avec une augmentation substantielle des taux de guérison, d’environ 25 % au milieu des années 1970 à près de 80 % aujourd’hui.2 Ce taux de guérison est le plus élevé parmi toutes les tumeurs solides, et l’amélioration de la survie est essentiellement liée à l’efficacité de la chimiothérapie.3

Il est important que la communauté des médecins connaisse bien cette affection maligne, dans la mesure où les patients sont susceptibles de se présenter initialement chez des praticiens très divers, et où les retards de prise en charge sont associés à une extension de la maladie induisant un traitement plus intensif et des taux de guérison inférieurs.4 En outre, la toxicité immédiate et à long terme du traitement nécessite souvent une prise en charge par des médecins de diverses disciplines. Cet article passe en revue les traitements fondés sur les preuves actuellement disponibles dans les TG testiculaires avancées, ainsi que leurs toxicités chroniques et aiguës potentielles. La prise en charge des cancers du testicule au stade précoce (I-IIA) a été revue précédemment.5-7


GÉNÉRALITÉS

Histologie et génétique des tumeurs germinales

Les tumeurs germinales (TG) sont des affections malignes qui se développent à partir des cellules germinales primordiales, cellules précurseurs des spermatozoïdes. Avec la transformation néoplasique, ces cellules prennent diverses formes histologiques, reflétant leurs vastes capacités de différentiation. Les tumeurs germinales se caractérisent par la présence de copies surnuméraires du chromosome 12p, le plus souvent acquises par le biais d’un isochromosome (i12p).8,9 Plusieurs gènes candidats ont été localisés en 12p et pourraient avoir un rôle majeur dans la pathogenèse des TG.10 En outre, 10 % à 20 % des séminomes pourraient abriter des mutations activantes au niveau du gène c-KIT.11-14 Les tumeurs germinales présentent également souvent un contenu en ADN triploïde ou hypotétraploïde, suggérant que d’autres aberrations génétiques jouent un rôle dans leur pathogenèse.

Les tumeurs germinales se divisent généralement en 2 groupes, les tumeurs séminomateuses et non-séminomateuses ; environ 50 % des cas se répartissent dans chaque catégorie. La quasi-totalité des séminomes sont curables par orchidectomie, avec ou sans radiothérapie ; ces cancers ne nécessitent qu’occasionnellement une chimiothérapie. Les tumeurs non-séminomateuses se composent de plusieurs types histologiques (carcinome embryonnaire, tumeur vitelline, choriocarcinome, tératome), chacun présentant un stade différent de la différentiation embryonnaire ou extra-embryonnaire, avec différents profils de marqueurs tumoraux. Le tératome, composé de 2 couches embryonnaires ou plus, ne présente pas de potentiel métastatique ; il peut cependant parfois évoluer en affection maligne de type somatique (sarcome) et prendre une forme agressive. Les TG non séminomateuses sont moins radiosensibles que les séminomes, et lorsqu’elles sont métastatiques, nécessitent souvent une chimiothérapie associée à la chirurgie.

Historique des traitements et stratification par groupe de risque

L’introduction du cisplatine au milieu des années 1970 a constitué une avancée majeure dans la chimiothérapie des TG testiculaires. Une étude marquante, rapportée en 1977, a utilisé un protocole combinant cisplatine, vinblastine et bléomycine au cours de 4 cycles, suivis de 21 mois de traitement d’entretien par vinblastine.3 Le taux de réponse complète a connu une augmentation historique avec l’utilisation de ce protocole associé à la chirurgie, en passant de 25 % à plus de 80 %.3 Ce taux de réponse complète élevé était associé à des effets toxiques moyennement sévères ; les études suivantes ont donc cherché à réduire la toxicité et la durée du traitement sans en compromettre l’efficacité. Les changements apportés incluaient l’élimination du traitement d’entretien, la substitution de l’étoposide par la vinblastine, et la suppression ou la réduction de la dose de bléomycine.

À la fin des années 1980, les investigateurs ont réalisé que certaines caractéristiques cliniques et tumorales pouvaient prédire la probabilité de réponse aux protocoles chimiothérapeutiques standard. Divers algorithmes ont été développés pour stratifier les patients dans des groupes de « bon » ou « mauvais » pronostic, et ont été intégrés dans des études cliniques afin de tester les stratégies thérapeutiques dans des populations de patients spécifiques. Cependant, les différences entre les algorithmes ne permettaient pas de comparer les résultats des études. La formation du groupe IGCCCG (International Germ Cell Cancer Collaborative Group) a alors permis l’élaboration d’un système de classification universel.2 Dans ce système, les patients sont répartis dans des groupes de pronostic favorable, intermédiaire, et péjoratif, en fonction des réponses prédites à la combinaison chimiothérapeutique à base de cisplatine, selon l’histologie, le site primitif de la tumeur, les sites métastasiques, et l’élévation des marqueurs tumoraux sériques (TABLEAU 1).2


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Tableau 1. Taux de survie à cinq ans sans progression et de survie globale pour les patients avec tumeurs germinales métastatiques basés sur la classification pronostique de l’International Germ Cell Cancer Collaborative Group



ACQUISITION DES DONNÉES

Stratégie de recherche

Une recherche sur MEDLINE a effectuée dans la littérature de langue anglaise (de 1966 à octobre 2007), en utilisant les termes MeSH néoplasies, cellule germinale, et néoplasies embryonnaire [MAJR] ou testiculaire [MAJR], avec les sous-titres traitement médicamenteux, complications et mortalité. Afin d’éviter toute omission d’études randomisées ou de rapports sur les rechutes tardives, nous avons également recherché les essais randomisés sous les termes MeSH néoplasies, cellule germinale et néoplasies embryonnaires ou testiculaires, et toutes les publications incluant les termes rechute tardive ou récidive tardive en association avec l’un de ces termes MeSH. Les articles ne se rapportant pas aux tumeurs germinales (néoplasies trophoblastiques gestationnelles, néoplasmes ovariens, tumeurs des cordons sexuels et/ou du stroma) ou aux êtres humains ont été exclus. Nous avons également effectué une recherche dans le Registre Central Cochrane des essais contrôlés, en utilisant les termes cancer testiculaire et tumeurs germinales. Les bibliographies des revues et des recommandations, ainsi que celles des études obtenues par la recherche, ont été utilisées pour identifier d’autres articles pertinents.

Sélection des études

Sur les 4 389 produits de cette recherche, les articles se rapportant aux métastases testiculaires d’autres tumeurs, au cancer du testicule localisé, à des études cliniques de phase 1, ainsi qu’à des éditoriaux, des commentaires, et des revues (sans données originales) ont été exclus. Les articles portant uniquement sur des femmes et des enfants ont également été exclus. De plus, les observations autres que celles décrivant une toxicité associée à la chimiothérapie ou des récidives tardives ont été exclues. La priorité était accordée aux études contrôlées randomisées et aux méta-analyses, mais les études cliniques de phase 2 et les grandes séries rétrospectives ont également été revues. Pour les études contrôlées randomisées, la qualité de l’étude était évaluée par l’échelle de Jadad.15 Les autres critères spécifiques de sélection ou d’exclusion des études sont présentés dans la FIGURE.


Figure 1
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Figure. Sélection des articles



SYNTHÈSE DES DONNÉES

Chimiothérapie dans la prise en charge initiale des TG métastatiques

TG de bon pronostic. Le groupe de bon pronostic comprend 60 % des patients avec TG métastatique, et présente un taux de survie à 5 ans sans progression et de survie globale de respectivement 88 % et 91 % (Tableau 1).2 Deux protocoles chimiothérapeutiques sont efficaces chez les patients avec une TG de bon pronostic : 4 cycles d’étoposide et cisplatine (EP) ou 3 cycles de bléomycine, étoposide et cisplatine (BEP). Les études randomisées menant à l’établissement de ces deux protocoles comme traitement de référence chez les patients avec un bon pronostic sont présentées dans le TABLEAU 2.16-27 Ces recommandations thérapeutiques s’appliquent tant aux patients avec un séminome qu’à ceux avec une tumeur non séminomateuse, la plupart des études randomisées incluant ces deux populations. Seule 1 étude publiée24 et 1 résumé28 ont évalué séparément les séminomes avancés et les non-séminomes (données résumées dans une analyse groupée29).


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Tableau 2. Études randomisées de différents protocoles de chimiothérapie de première ligne chez des patients avec tumeur germinale métastatique de bon pronostic


Tant les 3 cycles de BEP que les 4 cycles d’EP produisent des taux de réponse durable, variant de 81 % à 92 %, avec des profils de toxicité favorables (Tableau 2).16,17,19,20,22,23,25-27

Chez les patients avec un bon pronostic, 3 cycles de BEP démontrent une efficacité équivalente aux 4 cycles de BEP, avec une moindre toxicité.17 Les essais visant à réduire davantage la toxicité en administrant une chimiothérapie moins intensive que 3 cycles de BEP et 4 cycles d’EP ont été infructueux. Deux études substituant le cisplatine par du carboplatine potentiellement moins toxique dans ces protocoles ont démontré des taux inférieurs de survie sans récidive ; l’une d’elles montrait également un taux de survie globale inférieur.19,23 Des doses inférieures d’étoposide (360 mg/m² vs 500 mg/m² par cycle), de bléomycine (30 U vs 90 U par cycle), ou des deux, ont également démontré des taux de survie sans progression et globale inférieurs à ceux obtenus par l’administration des doses conventionnelles.26

Trois études ont comparé les protocoles BEP et EP chez des patients avec un bon pronostic, mais aucune n’était concluante. Dans la première, les patients étaient traités par 3 (au lieu de 4) cycles d’EP ou de BEP.20 Bien que les résultats aient été statistiquement inférieurs avec le protocole EP, l’utilisation de seulement 3 cycles d’EP ne permettait pas de tirer des conclusions définitives quant à l’efficacité des 4 cycles d’EP standard vs 3 cycles de BEP. La seconde étude22 démontrait un taux de réponse complète supérieur (95 % vs 87 %) avec 4 cycles de BEP comparé à 4 cycles d’EP, mais ne révélait aucune amélioration dans la survie sans progression ou la survie globale. En outre, le groupe témoin effectuait 4 cycles (au lieu de 3) de BEP, et les deux protocoles utilisaient une dose inférieure d’étoposide (360 mg/m²), ce qui a pu amplifier le bénéfice lié à l’intégration de la bléomycine dans le protocole BEP.22 La troisième étude utilisait un schéma d’équivalence pour comparer directement 4 cycles d’EP avec 3 cycles de BEP, en utilisant des doses optimales d’étoposide.27 Aucune différence n’était observée entre les 2 groupes dans le taux de réponse favorable (réponse complète + réponses partielles avec marqueurs tumoraux sériques négatifs), qui était le critère de jugement primaire de l’étude. De même, aucune différence n’était observée dans la survie sans progression et la survie globale. La neutropénie était plus fréquente avec 4 cycles d’EP, mais était contrebalancée par un taux supérieur de neuropathies et d’effets indésirables dermatologiques avec 3 cycles de BEP. Le débat se poursuit quant à l’éventuelle supériorité de l’un de ces deux schémas sur l’autre. L’avantage des 3 cycles du protocole BEP réside dans la durée plus courte du traitement et dans la dose inférieure de cisplatine ; les 4 cycles d’EP permettent quant à eux d’éviter les complications associées à la bléomycine, notamment la toxicité pulmonaire et le syndrome de Raynaud.

TG de pronostic intermédiaire et péjoratif. Les patients avec une TG métastatique, moins susceptibles d’obtenir une réponse complète à la chimiothérapie, peuvent être identifiés a priori à l’aide du système de stratification du risque de l’IGCCCG (International Germ Cell Cancer Collaborative Group).2 Le protocole standard pour ces patients consiste en 4 cycles de BEP.30-37 Les recherches visant à améliorer les résultats dans ces sous-groupes se sont axées sur l’intensification du protocole BEP (TABLEAU 3),30-38 incluant l’augmentation de la dose de cisplatine,35 la substitution de l’ifosfamide par la bléomycine,31,34,38 l’utilisation du BEP en alternance avec un second protocole,30 et l’intégration d’une chimiothérapie à forte dose avec autogreffe de cellules souches.33,37 Ces études n’ont pas démontré de supériorité sur les 4 cycles de BEP, et la toxicité était plus sévère avec les protocoles en expérimentation (Tableau 3).


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Tableau 3. Études randomisées de protocoles de chimiothérapie de première ligne chez des patients avec tumeur germinale métastatique de pronostic intermédiaire ou péjoratif


Protocoles chimiothérapeutiques de deuxième et troisième lignes

La plupart des patients avec un cancer du testicule qui obtiennent une réponse complète au traitement initial sont guéris ; des récidives surviennent dans moins de 10 % des cas.16,17,19-23,25-27 Les patients qui rechutent après une première chimiothérapie conservent néanmoins une possibilité de guérison avec des protocoles de deuxième et de troisième intention. Les stratégies efficaces consistent en doses standard des protocoles associant 3 produits, basés sur l’ifosfamide et le cisplatine, ou en alternative, en une chimiothérapie à forte dose avec autogreffe de cellules souches. Les taux de réponse durable avec des protocoles de rattrapage à doses conventionnelles, comme l’ifosfamide et le cisplatine plus vinblastine ou étoposide, varient de 7 % à 26 %.39-43 L’association paclitaxel, ifosfamide, et cisplatine a produit une réponse complète durable chez 29 patients sur 46 (63 %), avec un suivi médian de 69 mois.44 Les meilleurs résultats obtenus avec le paclitaxel, l’ifosfamide et le cisplatine suggèrent une supériorité sur l’ifosfamide et le cisplatine plus vinblastine ou étoposide, mais pourraient également refléter les critères de sélection. Ces protocoles n’ont été évalués que dans des études de phase 2 séparées, et n’ont pas été comparés de manière randomisée prospective.

La chimiothérapie de rattrapage à forte dose est utilisée avec succès chez les patients avec TG depuis la fin des années 1980, mais était initialement limitée par les taux élevés de mortalité associés au traitement.45 Les essais ultérieurs ont permis d’améliorer la praticabilité et l’efficacité du traitement, avec une toxicité réduite. L’utilisation des facteurs de croissance et le prélèvement des cellules souches du sang périphérique plutôt que de la moelle osseuse représentent 2 changements importants.46,47 Le traitement par chimiothérapie à forte dose inclut 2 ou 3 cycles d’étoposide et de carboplatine (avec ou sans cyclophosphamide ou ifosfamide). Les protocoles comprenant uniquement 1 cycle à forte dose sont moins efficaces.48 De nombreux schémas incluent 1 ou 2 cycles de chimiothérapie préparatoire pour favoriser la mobilisation des cellules souches, réduire le volume de la tumeur, et empêcher sa progression avant le traitement intensif.47,49 Plusieurs schémas thérapeutiques à forte dose ont été développés, mais n’ont pas fait l’objet de comparaisons directes. Dans une grande série rapportée récemment, 63 % des 184 patients ont obtenu une réponse complète durable au traitement à forte dose, avec un suivi médian de 4 ans.47

Les données permettant de guider le choix de la chimiothérapie à forte dose ou à dose conventionnelle pour le traitement de rattrapage initial sont limitées. Une étude prospective48 n’a trouvé aucune différence significative entre ces deux stratégies, dans la survie sans événement à 3 ans et dans la survie globale. Cependant, l’utilisation d’un seul cycle à forte dose dans cette étude limitait les conclusions, dans la mesure où 2 cycles sont généralement considérés comme nécessaires pour produire un bénéfice.50 En revanche, une analyse appariée rétrospective de 193 patients traités par chimiothérapie à forte dose ou à dose conventionnelle, dans le cadre d’un traitement de rattrapage initial, a estimé un bénéfice de 10 % dans la survie sans maladie à 2 ans et dans la survie globale avec la chimiothérapie à forte dose.51 En l’absence de données prospectives, des investigateurs ont développé des modèles pronostiques pour définir les patients susceptibles d’obtenir une réponse complète avec l’une ou l’autre stratégie.47,50,52-54 Bien que l’approche du traitement de rattrapage initial reste controversée, après l’utilisation de 2 schémas thérapeutiques ou plus, la chimiothérapie à forte dose est généralement la seule option curative.

Les solutions alternatives pour contrôler la maladie et pallier les symptômes incluent l’association gemcitabine plus oxaliplatine,55,56 gemcitabine plus paclitaxel,57,58 et cisplatine plus épirubicine.59 Les options en monochimiothérapie incluent l’étoposide oral, la doxorubicine, la gemcitabine, et le paclitaxel. Les essais cliniques et la résection chirurgicale des métastases60 constituent des options thérapeutiques supplémentaires.

Chirurgie après chimiothérapie

De nombreuses études ont démontré l’importance de l’exérèse des masses résiduelles après une chimiothérapie de première ligne ou de rattrapage pour les TG non-séminomateuses.61,62 À l’exception de circonstances définies,61,62 la normalisation des marqueurs tumoraux est une condition préalable à la chirurgie post-chimiothérapie, dans la mesure où leur taux élevé implique une maladie systémique résiduelle et suggère une forte probabilité de résection incomplète ou de récidive.63,64 Tous les sites (lésions ganglionnaires rétropéritonéales, hépatiques, et pulmonaires) doivent être réséqués dans la mesure du possible.65-68 L’incidence des TG viables (5 %-15 %) et des tératomes (25 %-60 %) à la chirurgie varie en fonction de la taille de la tumeur prétraitement, de l’histologie de la tumeur primitive, et du nombre de lignes de traitement précédentes.64,69,70 Des modèles ont été proposés pour prédire l’absence de ces éléments (fibrose seulement),63,71 mais ils ne sont pas largement appliqués en raison des taux de faux négatifs. La complétude de la chirurgie et l’histologie des masses réséquées sont des facteurs prédictifs majeurs de l’évolution à long terme.64,65,70,75

L’exérèse chirurgicale post-chimiothérapie des séminomes est techniquement plus complexe, et présente une morbidité supérieure en raison de la réaction desmoplastique fréquemment induite par le traitement.76 En outre, il y a une incidence inférieure de TG viables dans les pièces de résection, et le tératome n’est pas un problème chez les patients avec un séminome pur. La tomographie par émission de positons peut être utilisée pour guider les décisions chirurgicales dans ce contexte.77

Récidives tardives

En l’absence de seconde tumeur du testicule, la plupart des rechutes surviennent dans les 2 premières années suivant la fin du traitement ; les rechutes ultérieures sont appelées « récidives tardives », et ont une incidence estimée de 2 % à 6 %.78-89 Dans la plupart des rapports,79,82,88,90 la majorité des récidives tardives survient plus de 5 ans (médiane, 5-10 ans) après la fin du traitement. La récidive la plus tardive documentée est survenue à 32 ans.79 Une récente analyse groupée a suggéré des taux de rechute tardive plus élevés pour les non-séminomes (3,2 %) comparés aux séminomes (1,4 %).91 Une volumineuse adénopathie rétropéritonéale83,89,92 et un tératome dans la pièce de résection ganglionnaire rétropéritonéale post-chimiothérapie82,89,90 peuvent également présager un risque supérieur de récidive tardive.

Plusieurs caractéristiques de la rechute tardive diffèrent de la récidive précoce et de la présentation de la maladie initiale. Ils incluent la prédominance de la tumeur vitelline et l’élévation anormale de l’AFP comparé aux HCG.79,87 En outre, les récidives tardives sont associées à une résistance accrue à la chimiothérapie comparé à la récidive précoce et à la maladie initiale.79,90,92 Les critères associés à une évolution plus favorable incluent une maladie localisée relevant de la chirurgie,83 un tératome comme seul type histologique à la récidive tardive,79 l’absence d’antécédent de chimiothérapie,90,92 et un type histologique initial de séminome pur.92

Compte tenu de l’issue généralement défavorable du cancer testiculaire avec récidive tardive traité par chimiothérapie,79,82,83,86,88,90,92 la chirurgie représente le pilier de la prise en charge. Lorsque qu’une chimiothérapie est pratiquée d’emblée, il est recommandé d’utiliser des protocoles contenant du paclitaxel,88 suivis par la résection des masses résiduelles.79,88,89,93 Des analyses immunohistochimiques et moléculaires ont identifié des profils pour les tumeurs à récidive précoce et tardive, susceptibles de jouer un rôle dans leur comportement clinique divergent.90,94,95

Toxicités aiguës de la chimiothérapie

Les effets indésirables du traitement des tumeurs germinales se répartissent en événements précoces et tardifs. Les agents chimiothérapeutiques communément utilisés peuvent tous causer une dépression médullaire entraînant une neutropénie fébrile, des hémorragies, et une anémie. Le risque de neutropénie fébrile varie de 5 % à 25 % avec 3 ou 4 cycles de BEP ou d’EP.25,30,32,35 L’administration de facteurs de croissance32 et d’une prophylaxie par fluoroquinolones96,97 peuvent toutes deux réduire ce risque, mais aucune n’est utilisée en routine. La dépression médullaire et l’infection sont plus fréquentes et sévères avec des schémas à forte dose.98 Les effets indésirables plus spécifiques à chaque agent sont présentés dans le TABLEAU 4. Bien que certains effets indésirables soient réversibles, la néphrotoxicité, l’ototoxicité, la neuropathie et la stérilité peuvent persister chez 20 % à 40 % des patients.99-101


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Tableau 4. Effets toxiques sélectionnés des divers médicaments chimiothérapeutiques utilisés dans le traitement des tumeurs germinales


Des toxicités aiguës induisant des complications cardiovasculaires et thrombo-emboliques ont été associées à la chimiothérapie des TG. L’angor et l’infarctus du myocarde ont tous deux été observés pendant ou peu après le traitement par cisplatine, et sont potentiellement dus à une atteinte directe des cellules endothéliales ou à un angiospasme qui peut être associé à un déficit en magnésium.102-105 Des phénomènes thrombo-emboliques incluant l’occlusion artérielle, la thrombose veineuse profonde, l’embolie pulmonaire, l’accident ischémique transitoire, l’accident vasculaire cérébral, et l’occlusion artérielle rétinienne, ont également été rapportés avec le traitement par cisplatine.102-114

Les effets secondaires aigus de la bléomycine incluent la toxicité pulmonaire et le syndrome de Raynaud. L’incidence de la toxicité pulmonaire est proportionnelle à la dose de bléomycine cumulée ; elle est observée chez 8,5 % des patients traités avec plus de 300 U, et entraîne le décès chez 1 % à 3 %.22,115,116 La dose de bléomycine cumulée administrée pendant 3 cycles de BEP est de 270 U comparé à 360 U avec 4 cycles. La toxicité pulmonaire peut se manifester par une bronchiolite oblitérante avec pneumonie en voie d’organisation, des réactions d’hypersensibilité avec éosinophilie, ou une pneumopathie interstitielle.117-119 Cette dernière, qui est la plus fréquente, comporte un risque de progression vers une fibrose pulmonaire et de décès,115,116 bien que la majorité des cas se résolve spontanément ou avec l’administration de corticoïdes.120

L’incidence rapportée du syndrome de Raynaud avec la bléomycine atteint 36 %121,122 ; il survient le plus souvent entre 4 et 12 mois après la fin de la chimiothérapie. Le syndrome de Raynaud est caractérisé par une vasoconstriction transitoire des artères digitales causant une pâleur de la peau ou une cyanose dues à l’ischémie, suivie par une rougeur cutanée et une douleur à la reperfusion (hyperémie). Les symptômes se résorbent dans la plupart des cas ; ils peuvent cependant persister chez jusqu’à 25 % des patients, 10 à 20 ans après le traitement.122,123 Ces manifestations sont supposées résulter de l’atteinte directe des cellules endothéliales induite par la bléomycine.

Toxicités chroniques du traitement

Les survivants d’un cancer du testicule nécessitent un suivi plus intensif que leurs semblables du même âge, en raison d’un risque élevé de comorbidités sévères et de mortalité précoce. Chez les patients ayant survécu au moins un an après leur diagnostic initial, plus de 40 % des décès sont dus à des causes non malignes, à un suivi médian de seulement 10 ans.124 Ces causes incluent les troubles gastro-intestinaux (lésions vasculaires digestives, affections hépatobiliaires, et ulcères), les maladies cardiovasculaires, les infections, et éventuellement les maladies respiratoires.124,125 En outre, ces patients sont plus susceptibles de présenter une stérilité et de l’anxiété que la population générale124-126 ; la néphrotoxicité aiguë, l’ototoxicité, le syndrome de Raynaud, et la neuropathie peuvent persister chez 20 % à 40 % des patients.99-101,127-131 La sarcoïdose est également plus fréquente chez les patients avec TG, bien que la question de savoir si elle est liée au traitement du cancer testiculaire ou à une association indéfinie entre les 2 maladies reste irrésolue.132,133

Toxicités cardiovasculaires

Plusieurs études ont démontré un risque majoré d’événements cardiovasculaires chez les patients avec TG traités par chimiothérapie, comparés à ceux n’ayant pas reçu de chimiothérapie ou à des témoins en bonne santé appariés sur l’âge.123,125,134-137 Dans une série avec un suivi à long terme, 10 % des patients TG ont développé soit un angor soit un infarctus du myocarde dans les 20 ans suivant l’administration du traitement.137 Lorsque d’autres maladies cardiovasculaires comme l’insuffisance cardiaque et l’accident vasculaire cérébral étaient incluses, l’incidence augmentait à plus de 18 %.137 La plupart des études montrent un risque relatif deux fois supérieur de ces diagnostics chez ces patients comparé à la population générale. L’association de la chimiothérapie et de la radiothérapie semble prédire le risque le plus élevé, en particulier avec la radiothérapie médiastinale.136,137 Pour l’infarctus du myocarde, la plus grande différence dans le risque entre les survivants d’un cancer du testicule et la population générale se situe avant l’âge de 45 ans, après quoi l’augmentation des événements cardiovasculaires dans la population générale réduit ce différentiel.137 La mortalité de causes cardiovasculaires est également majorée chez les patients TG.124,125,136-138

Les principaux mécanismes de la toxicité cardiovasculaire peuvent être séparés en effets vasculaires directs des agents chimiothérapeutiques et en effets indirects par l’induction de facteurs de risques cardiovasculaires. Les effets vasculaires directs impliquent une atteinte des cellules endothéliales, le mieux illustrée par le syndrome de Raynaud, qui peut persister 20 ans après le traitement.123 Le syndrome de Raynaud a été causalement associé à la bléomycine,22,122 mais peut être exacerbé par le cisplatine, la vinblastine, ou les deux.121,122 La microalbuminurie, un marqueur proposé de pathologie vasculaire systémique reflétant une dysfonction endothéliale généralisée,139 est également présente chez jusqu’à 22 % des survivants du cancer du testicule à long terme, traités par cisplatine.123 Ce taux est supérieur à celui trouvé dans la population générale ou chez les patients TG traités seulement par orchidectomie,140 soutenant l’hypothèse d’une atteinte vasculaire directe. D’autres marqueurs de l’activation des cellules endothéliales, de leur atteinte, ou des deux, incluant les concentrations du facteur de Willebrand et de l’inhibiteur des activateurs du plasminogène de type 1 (PAI-1), ainsi que l’épaisseur de la carotide, peuvent également augmenter avec le traitement par cisplatine,140,141 et sont associés à des risques élevés de coronaropathie et de morbidité cardiovasculaire.142-144

Comparé aux patients avec un cancer du testicule au stade précoce n’ayant pas reçu de chimiothérapie, ou à des témoins en bonne santé appariés sur l’âge, les patients avec une tumeur germinale traités par chimiothérapie présentent une majoration significative de facteurs de risques cardiaques comme l’hypertension, l’hyperlipidémie, l’indice de masse corporelle élevé, l’insuffisance rénale, et le syndrome métabolique.100,101,123,135,145-148 Le développement de certaines de ces comorbidités peut être partiellement associé à des variations hormonales, comme une déficience en testostérone,123 causées par l’association de l’orchidectomie et de la chimiothérapie. L’incidence de l’hyperlipidémie dans les diverses études varie de 32 % à 82 %100,123,135,145,146 ; son mécanisme reste cependant mal compris. Les patients peuvent développer une hyperlipidémie d’apparition récente ou présenter une aggravation d’anomalies lipidiques préexistantes.146 L’hypertension, le syndrome métabolique, et l’indice de masse corporelle élevé,100,101,123,135,145,147,148 qui sont tous des comorbidités fréquentes chez les patients avec TG après traitement par cisplatine, constituent individuellement un risque additionnel d’événements cardiovasculaires.

Le syndrome métabolique, un groupement de 3 caractéristiques ou plus (obésité abdominale, hypertriglycéridémie, faible taux de HDL, hypertension, ou insulinorésistance), a récemment fait l’objet d’une attention particulière en tant que facteur de risque de morbi-mortalité cardiovasculaire.149-151 Il peut survenir chez 25 % à 40 % des survivants d’un cancer testiculaire,145,152 comparé à seulement 3 % à 4 % dans la population générale.153

D’autres facteurs de risque cardiovasculaire non associés à un précédent traitement du cancer du testicule, comme le tabagisme et les antécédents familiaux, pourraient majorer la probabilité d’événements cardiaques.137 Les études randomisées et les recommandations pour le dépistage et la prévention font défaut dans cette population. Cependant, les survivants de ce cancer doivent être sensibilisés à leur risque majoré de maladie cardiovasculaire, et encouragés à modifier leur style de vie en conséquence, notamment en adoptant un régime alimentaire sain, en proscrivant le tabagisme, et en pratiquant régulièrement de l’exercice. Une histoire détaillée des facteurs de risques cardiaques doit être recueillie, et un questionnaire doit être réalisé annuellement sur les symptômes et les événements présentés par le patient. En accord avec d’autres auteurs,154 nous recommandons également une évaluation annuelle de la pression artérielle, de la glycémie, et de la fonction rénale, avec intervention ou orientation vers le spécialiste concerné si des anomalies sont détectées. En outre, l’indice de masse corporelle doit être mesuré annuellement, et les profils lipidiques évalués au minimum tous les 5 ans (plus souvent si un autre facteur de risque est présent). Nous recommandons un traitement précoce de ces troubles, notamment chez les patients présentant des valeurs limites (c’est-à-dire pression artérielle systolique, 130-139 mm Hg) qui, dans d’autres contextes, peuvent faire l’objet d’une approche observationnelle.155

Il n’existe pas de données traitant l’utilisation de l’épreuve d’effort dans cette population. En conséquence, nous suggérons que les décisions concernant l’épreuve d’effort soient prises au cas par cas, après évaluation minutieuse des facteurs de risque, consultation de cardiologie, et discussion approfondie avec le patient. Le dosage des taux de testostérone doit être envisagé chez les patients avec un syndrome métabolique ou des plaintes de symptômes hypogonadiques, et un traitement de substitution administré. De nouvelles études évaluant le dépistage et les stratégies préventives dans cette population sont nécessaires, et des recommandations pratiques formalisées doivent être élaborées.

Fertilité chez les survivants de TG

La stérilité est un problème majeur chez les survivants d’un cancer du testicule, en raison de leur jeune âge au moment du diagnostic, du taux de guérison élevé, et de l’espérance de vie prolongée après le traitement. Définie par l’incapacité de concevoir un enfant dans une période de 12 mois de tentatives actives, la stérilité est observée chez 10 % à 35 % des hommes156-158 au moment de leur diagnostic de cancer du testicule, avec des spermogrammes anormaux chez plus de 50 %.159-162 Le risque de cancer testiculaire peut être jusqu’à 20 fois supérieur chez les hommes stériles présentant un spermogramme anormal, comparé à des témoins appariés sur l’âge.163 Le lien entre ces 2 diagnostics n’est que partiellement expliqué par des facteurs de risques communs comme la cryptorchidie. Les autres raisons de stérilité prétraitement chez les patients avec un cancer du testicule incluent la production d’hormones par la tumeur, la présence d’anticorps anti-sperme,164-166 la malignité du testicule controlatéral ou le carcinome in situ,167 ou le stress psychologique associé au diagnostic.

Bien que l’orchidectomie unilatérale ne semble pas causer la stérilité156 (en raison de la spermatogenèse suffisante dans le testicule restant), le curage ganglionnaire rétropéritonéal primaire ou post-chimiothérapie semble altérer la fertilité en raison du potentiel d’interruption des fibres nerveuses sympathiques rétropéritonéales entraînant une éjaculation rétrograde.168-171 Le développement de techniques de préservation des nerfs a considérablement réduit l’incidence de cette complication chirurgicale comparé au curage bilatéral complet traditionnel,168,172 et leur utilisation est recommandée le cas échéant.72,170,171,173,174

Près de 100 % des patients deviennent azoospermiques pendant et immédiatement après la chimiothérapie par cisplatine.160,162 Des élévations de gonadotrophine A et de gonadotrophine B, ainsi que des diminutions en testostérone peuvent survenir simultanément chez certains patients,100,101,175,176 et les augmentations persistantes de gonadotrophine A après traitement peuvent être associées à une stérilité chronique.175,177 Malgré ces effets, environ 50 % des patients retrouvent une numération des spermatozoïdes normale dans les 2 ans suivant le traitement, et cette proportion peut atteindre 80 % dans les 5 ans.160 L’oligospermie ou l’azoospermie prétraitement prédit une probabilité inférieure de récupération de la numération des spermatozoïdes après la chimiothérapie.160,178 Des doses supérieures de cisplatine (plus de 4 cycles) sont associées à des taux réduits de paternité (38 % vs 62 %)156 et de rétablissement d’une normospermie160,179 et de la fonction leydigienne.180 La préservation d’une éjaculation antérograde après le traitement augmente les chances de succès.156

Les taux de paternité ont augmenté au cours des 20 dernières années en raison de l’amélioration de la technique de curage ganglionnaire rétropéritonéal, de la réduction de l’intensité du traitement, de l’utilisation de la cryoconservation du sperme, et des nouvelles techniques de reproduction assistée.181-184 Jusqu’à 50 % des survivants d’un cancer du testicule qui ne pouvaient pas concevoir d’enfant naturellement peuvent aujourd’hui le faire par des techniques de reproduction assistée.156,158 Le taux global actuel de paternité réussie est estimé entre 50 % et 85 %.156-158,175 La mise en banque de sperme avant l’initiation de la chimiothérapie ou le curage ganglionnaire rétropéritonéal est recommandée, dans la mesure où la stérilité et le désir d’engendrer des enfants après traitement ne peuvent pas être prédits de manière certaine.185 En outre, la paternité, ainsi que la récupération des taux de testostérone et de la fertilité sont des facteurs prédictifs majeurs de qualité de vie chez les survivants de ce cancer.175,186 Les patients doivent également être informés du risque de malformation congénitale en cas de conception pendant ou dans les 6 mois suivant la chimiothérapie.187,188 La contraception est fortement encouragée pendant cette période.

Malignités secondaires

Les survivants des cancers du testicule présentent un risque majoré de développer des malignités secondaires après une chimiothérapie, une radiothérapie, ou une association de ces 2 modalités.125,189-193 Dans une grande série comprenant plus de 40 000 patients avec TG issus de 6 pays, avec un suivi médian de 11,3 ans et plus de 2 000 patients suivis pendant un minimum de 30 ans, près de 2 300 patients (5,6 %) ont développé une tumeur solide secondaire.194 Comparé à la population générale, le risque était environ 2 fois supérieur avec la chimiothérapie ou la radiothérapie seule, et 3 fois supérieur avec l’utilisation des deux modalités.194 Le risque absolu était majoré avec le suivi plus long et l’âge plus jeune lors du traitement initial.194 Les risques relatifs les plus élevés concernaient les tumeurs de la plèvre, du pancréas, de l’estomac, de la vessie, et du tissu conjonctif, les cancers de la vessie et de l’estomac représentant le plus grand nombre de cas excédentaires.194 Une autre série récente a estimé que le risque de malignité secondaire associé à la chimiothérapie ou à la radiothérapie était presque équivalent à celui du tabagisme.195

Le syndrome myélodysplasique et la leucémie secondaire sont également associés aux protocoles chimiothérapeutiques pour le cancer du testicule.192,193,196-199 Un nombre disproportionné de ces diagnostics a été associé en particulier à l’étoposide, de manière potentiellement dose-dépendante.196,199 Le risque relatif de leucémie dans les 10 premières années suivant le traitement d’un cancer testiculaire varie de 3 % à 7 % dans les diverses études,196,197 mais se rapproche de celui de la population générale après 10 à 20 ans.192,196,197,200 Une récente étude a démontré que les taux de survie pour les patients avec TG et malignités secondaires sont similaires à ceux des patients avec des malignités appariées et aucun antécédent de cancer.201

Outre les malignités secondaires, les survivants d’un cancer du testicule présentent également un risque d’environ 2 % de développer une seconde tumeur germinale dans le testicule controlatéral.202 Les patients doivent être informés de ce risque ; un auto-examen régulier et un examen annuel par un médecin sont recommandés pour en dépister la survenue éventuelle.


CONCLUSIONS

Avec des taux de guérison globaux de plus de 95 % (80 % pour la maladie métastatique), les TG testiculaires sont considérées comme le modèle même du cancer curable. Ces résultats favorables ont été obtenus grâce à un système de stratification des risques précis et à des études cliniques successives bien conçues sur des chimiothérapies adaptées aux risques. Les patients réfractaires à la chimiothérapie initiale peuvent néanmoins être guéris avec un traitement de rattrapage de deuxième ou troisième ligne, incluant soit des protocoles à base d’ifosfamide soit une chimiothérapie à forte dose avec autogreffe de cellules souches.

Les médecins doivent être sensibilisés aux risques à long terme présentés par les survivants d’un cancer du testicule, incluant la stérilité, la récidive tardive, les malignités secondaires, le cancer du testicule controlatéral, et les comorbidités chroniques comme l’hypertension, l’hyperlipidémie, les cardiopathies, et le syndrome métabolique. Les futures études pourront tenter de définir et de minimiser les toxicités tardives liées au traitement, et d’améliorer la compréhension des aspects génétiques et biologiques des tumeurs germinales, afin d’optimiser les options thérapeutiques actuelles.


Informations sur les auteurs

Correspondance : Robert J. Motzer, MD, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, 1275 York Ave, New York, NY 10065 (motzerr{at}mskcc.org).

Contributions des auteurs : Le Dr Motzer a eu un accès complet à toutes les données de l’étude et accepte la responsabilité de l’intégrité des données et de l’exactitude de l’analyse des données.

Conception et schéma de l’étude : Feldman, Bosl, Motzer.

Recueil des données : Feldman, Motzer.

Analyse et interprétation des données : Feldman, Bosl, Sheinfeld, Motzer.

Rédaction du manuscrit : Feldman, Bosl, Motzer.

Revue critique du manuscrit : Feldman, Bosl, Sheinfeld, Motzer.

Aide administrative, technique ou matérielle : Feldman, Bosl, Motzer.

Supervision de l’étude : Bosl, Sheinfeld, Motzer.

Liens financiers : Aucun déclaré.

Financement/Soutien : Soutenu en partie par la Craig DTifford Foundation Inc, Stamford, Connecticut.

Rôle du sponsor : La Fondation Craig D. Tifford n’a joué aucun rôle dans la conception et la conduite de l’étude, dans la collection, l’analyse, ou l’interprétation des données, ou dans la préparation, la revue ou l’approbation du manuscrit.

Autres contributions : Nous remercions Carol Pearce, BA, MFA, auteur/rédacteur, l’unité éditoriale, le département de médecine, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, de leur examen du manuscrit et Richard Steingart, MD, service de cardiologie, département de médecine, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, le département de médecine, université médicale de Weill de l’Université Cornell, pour leur revue des recommandations de dépistage et de prévention des maladies cardio-vasculaires. Ni l’un ni l’autre n’ont reçu de compensation pour leur revue.

Affiliations des auteurs : Genitourinary Oncology Service, Division of Solid Tumor Oncology, Department of Medicine (Drs Feldman, Bosl, et Motzer) et Urology Service, Department of Surgery (Dr Sheinfeld), Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, et Department of Medicine (Drs Bosl et Motzer) and Department of Surgery (Dr Sheinfeld) Weill Medical College of Cornell University, New York, New York.

Voir aussi Page du Patient.

FMC disponible en ligne à www.jamaarchivescme.com et questions p 706.


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