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Bisphénol A et Risque de Désordres Métaboliques
Frederick S. vom Saal, PhD;
John Peterson Myers, PhD
JAMA. 2008;300(11):1353-1355
Dans ce numéro de JAMA, LANG ET AL.1 rapportent les résultats de la première étude épidémiologique majeure pour examiner les problèmes de santé liés au composant chimique oestrogénique omniprésent bisphénol A (BPA). Ce composant est la base chimique (monomère) utilisée pour fabriquer des contenants en plastique de type polycarbonate pour les boissons et la nourriture, le revêtement résine intérieur des conserves, et les prothèses dentaires ; on le trouve également dans le papier « sans carbone » utilisé pour les reçus aussi bien que dans une gamme étendue dautres articles ménagers communs. Basé sur leur analyse de données de lEnquête 2003-2004 dExamen de Santé et de Nutrition National, Lang et al. rapportent une relation significative entre les concentrations dans lurine de BPA et une maladie cardiovasculaire, un diabète de type 2, et des anomalies denzymes du foie dans un échantillon représentatif de la population américaine adulte. Ce rapport, suggérant des liens entre le BPA et certaines maladies les plus significativement et économiquement onéreuses, est basé sur une étude transversale et par conséquent ne peuvent établir de causalité ; des études longitudinales de suivi devraient en conséquence être une priorité. Cependant de nombreuses études passées en revue par des pairs rapportent des effets secondaires du BPA sur des animaux expérimentaux 2 et des études de cellules identifient les mécanismes moléculaires qui influencent ces réponses.3 Ces découvertes expérimentales ajoutent une plausibilité biologique aux résultats apportés par Lang et al.1
En se basant sur cette information de contexte, létude de Lang et al.,1 pendant le préliminaire en ce qui concerne ces maladies chez lhomme, devrait stimuler les agences américaines pour suivre laction récente entreprise par les agences de régulation du Canada, qui avaient déclaré le BPA « toxique chimique » nécessitant une action agressive pour limiter les expositions humaine et environnementale.4 Alternativement, une action du Congrès pourrait suivre lensemble précédent avec le passage récent de la législation fédérale conçue pour limiter les expositions à une autre famille de composés, les phtalates, également utilisés dans le plastique. Comme le BPA,5 les phtalates sont détectables chez virtuellement tout le monde aux Etats-Unis.6 Cette loi rapproche la politique américaine du modèle européen, dans lequel lindustrie doit fournir des données sur la sécurité dun composé chimique avant quil puisse être utilisé dans les produits.
Après une observation inopinée de 1997, de nombreuses études sur des animaux de laboratoire2 ont identifié des effets semblables à ceux de drogues à faible dose du BPA à des niveaux inférieurs à la dose utilisée par la Food and Drug Administration (FDA) et lAgence de Protection de lEnvironnement pour estimer la dose de prise journalière humaine courante acceptable (DJA) considérée comme sûre pour lhomme. Ces études ont montré des effets secondaires du BPA sur le cerveau, le système de reproduction, et – plus pertinent pour les découvertes de Lang et al.1 – les processus métaboliques, y compris des altérations de lhémostase de linsuline et les enzymes hépatiques.2 Cependant, aucune étude antérieure examinant le BPA pour ses effets sur la fonction cardiovasculaire na été menée sur des animaux de laboratoire ou chez lhomme.
Les épidémiologistes sont informés par des études sur les animaux quidentifier les problèmes de santé potentiels humains lorsque les modèles animaux et les niveaux dexposition sont pertinents et les effets sont influencés par les mécanismes de réponse présents chez lhomme. Par exemple, lorsque des rats adultes étaient nourris avec 0,2-µg/kg par jour de BPA pendant 1 mois (une dose 250 fois inférieure à la DJA habituelle), le BPA diminuait significativement les activités des enzymes antioxydants et augmentaient la peroxydation lipidique, augmentant ainsi le stress oxydatif.7 Lorsquon a administré à des souris adultes une dose de BPA de 10- µg/kg par jour pendant 2 jours (une dose 5 fois inférieure à la DJA), le BPA stimulait les cellules pancréatiques β pour produire de linsuline. Après administration de 100- µg/kg par jour de BPA par injection ou alimentation pendant 4 jours, les souris développèrent une résistance à linsuline et une hyperinsulinémie postprandiale. Des études de suivi ont montré que la stimulation de la production et de la sécrétion chez la souris des cellules β de linsuline par loestradiol entre 0,1 et 1nM ou du BPA (23-230 pg/mL de BPA) est influencée par lactivation de la protéine kinase extracellulaire liée au signal chemin par liaison du BPA au récepteur doestrogène et que par ce mécanisme non classique de réponse oestrogénique, le BPA et loestradiol ont une puissance et une efficacité.8Le BPA et loestradiol sont aussi puissants lun que lautre à inhiber la libération dadinopectine dadipocytes humains à 1nM, impliquant ensuite le BPA à des niveaux dexposition dans la résistance à linsuline et le syndrome métabolique.9
Les effets du BPA sur les cellules β confirment que le BPA agit comme un puissant oestrogène par cette voie de réponse-oestrogème découverte récemment, dont lune est aussi présent dans les tissus humains ?3 De façon importante, alors que de faibles doses de BPA et doestradiol stimulaient cette réponse des cellules β, des doses 100 fois plus élevées de BPA et doestradiol ne stimulaient pas la production dinsuline des cellules β dans le modèle souris8 ou la libération dadiponectine des adipocytes humains.9 Les courbes de réponse aux doses biphasiques ou non monotone dans cette étude et beaucoup dautres sur le BPA suivent une forme U inversée, ce qui représente une découverte commune pour les composés chimiques et les drogues actifs sur les sécrétions endocrines, pour lesquels des doses élevées inhibent (régulent vers le bas) le système de réponse à dose faible alors quil introduit un vaste tableau dautres effets contraires par des mécanismes de réponse différents.10 Malgré des dizaines dannées dobservations publiées par des endocrinologues rapportant des courbes de réponse aux doses, non-monotones pour des composés hormonaux actifs, la supposition principale édictée par la FDA, lAgence de Protection Environnementale, et lAutorité Européenne de la Sécurité des Aliments pour estimer la DJA pour les composés chimiques environnementaux est toujours basée sur un concept dabord articulé au 16è siècle : « Cest la dose qui fait le poison »11 ; i.e., les courbes de réponse à la dose sont considérées comme étant monotones pour les composés chimiques environnementaux.
La FDA et lAgence Européenne de la Sécurité des Aliments ont choisi dignorer les avertissements des panels dexperts12 et dautres agences gouvernementales,4,13 et ont continué à déclarer le BPA « sûr ».14,15 Les découvertes de Lang et al1 disant que le BPA est significativement lié aux marqueurs de sérum hépatique, comme des niveaux élevés de –glutamyltransférase, qui étaient prédictifs de maladie métabolique, de maladie cardiaque, et qui augmentaient la mortalité dans létude longitudinale de Framingham,16 défient la sécurité du BPA. Un facteur qui peut contribuer au refus des agences de régulation à entreprendre une action contre le BPA face à la preuve accablante du dommage due aux études animales rapportées dans des publications de pairs par des scientifiques académiques et gouvernementaux est une campagne agressive de désinformation utilisant des techniques (« doute manufacturé ») tout dabord développée par le plomb, le vinyle, et les industries du tabac à défier la fiabilité des découvertes publiées par des scientifiques indépendants.17,18
Par conséquent, il existe une discordance marquée entre la DJA du BPA couramment acceptée de 50µg/kg par jour et de nombreux effets indésirables chez les animaux se produisant à des niveaux très inférieurs à ce dosage dans des expérimentations récentes utilisant les outils de la biologie du 21è siècle.2 Un problème fondamental est que la DJA courante pour le BPA est basée sur des expériences menées au début des années 80 en utilisant des méthodes dépassées (seules des doses très élevées ont été testées) et des tests dinsensibilité. Des découvertes plus récentes de scientifiques indépendants ont été rejetées par la FDA, apparemment parce que ces chercheurs ne suivaient pas les directives de test dépassés pour les composés chimiques environnementaux, alors que des études utilisant les tests dépassés dinsensibilité (impliquant principalement des études financées par lindustrie chimique) ont plus de poids en arrivant à la conclusion que le BPA nest pas dangereux à des niveaux dexposition actuels.15
Si des adultes avec des niveaux élevés de BPA présentent un risque plus grand de maladies métaboliques, comme le suggèrent les découvertes de Lang et al,1 les études longitudinales de suivi chez les bébés, les enfants, et les adolescents, aussi bien que chez les femmes enceintes et les fœtus, présenteraient une priorité élevée pour 2 raisons. Premièrement, il existe un consensus du panel dexperts sponsorisé par les Instituts Nationaux de Santé12 dautres rapports dagences gouvernementales, y compris le Programme Américain National Toxicologique 13 et le Ministère de la Santé Canadien,4 qui dit que lexposition au BPA pendant le développement pose le risque le plus important pour les effets secondaires ; on pense que le fœtus et lenfant en bas âge sont plus susceptibles aux effets oestrogéniques du BPA du fait de la petite taille de leur corps et de leur capacité limitée à métaboliser le BPA.19 Deuxièmement, avec laugmentation exponentielle de lutilisation du BPA dans les objets durant les 30 dernières années, il y a eu une augmentation énorme sur lincidence de lobésité et le diabète de type 2 chez lenfant.20 De très faibles doses de BPA pendant la vie fœtale/néonatale chez les rongeurs augmentent le taux de croissance postnatale aussi bien que durant la puberté avancée, avec comme suite une perturbation de la fonction neuroendocrinienne.2 Un rôle causal du BPA dans ces tendances est plausible parce que le BPA peut altérer la programmation des gênes pendant les périodes critiques de différentiation cellulaire pendant le développement fœtal et néonatal. Ce processus, mentionné comme « programmation épigénétique », peut résulter en lexpression de maladies métaboliques et de cancers dans la vie future.21,22 Examiner les effets développementaux nécessitera un biomonitoring du BPA (et dautres composés chimiques impliquant une perturbation de la fonction endocrinienne) dans des études longitudinales qui lient des expositions pendant les périodes critiques du développement à une maladie en résultant. Cependant, de nouvelles preuves de dangerosité ne devraient pas être requises pour quune action de régulation débute le processus de réduction dexposition au BPA.4
Le rapport de Lang et al1devrait stimuler des études plus approfondies et une réévaluation des suppositions de base sur les évaluations de risque qui ont conduit aux assurances que le BPA est sûr.15 Leurs découvertes intensifient aussi les motivations pour que la chimie verte (un nouveau domaine basé sur la collaboration entre biologistes et chimistes à développer des composés chimiques biologiquement inertes à utiliser dans des produits) trouve des remplaçants rentables des applications du BPA contribuant aux expositions étendues à lhomme.23 Etant donné que la production mondiale de BPA atteint maintenant 7 milliards de livres par an, 17 il sera bien plus aisé déliminer les expositions directes à son utilisation dans les récipients alimentaires et de boissons que de trouver des solutions à la contamination mondiale massive par ce composé chimique due à son rejet par enfouissement de déchets et le rejet dans lécosystème aquatique de myriades dautres produits contenant du BPA, BPA que le Canada a déjà déclaré comme étant un contaminant environnemental majeur.4
La bonne nouvelle est que laction du gouvernement à réduire les expositions peut offrir une intervention efficace pour améliorer la santé et réduire le poids de certains des problèmes de santé humains qui ont le plus de conséquences. Ainsi, même en attendant confirmation des découvertes de Lang et al1 les prochaines étapes logiques pour réduire le risque de santé publique consiste à diminuer lexposition au BPA et à développer des alternatives à son utilisation.
Informations sur les auteurs
| | Correspondance : Frederick S. vom Saal, PhD, Division of Biological Sciences, 105 Lefevre Hall, University of Missouri, Columbia, MO 65211 (vomsaalf{at}missouri.edu).
Liens financiers : le Dr vom Saal a rapporté travaillé dans le comité organisateur de lInstitut National de Santé (NIH en américain)-qui a sponsorisé la conférence sur le bisphénol A (BPA) tenue à Chapel Hill, Caroline du Nord, en 2006 ; il a participé comme témoin expert de la défense dans un procès en 2004 concernant les effets du bisphénol sur la santé ; il a travaillé comme consultant pour la préparation dun litige concernant le BPA ; il a travaillé comme président directeur général de LLC XenoAnalytical, qui utilise une variété de techniques analytiques pour mesurer lactivité oestrogénique et le BPA dans les tissus et les lixiviats de produits ; et il assure la maintenance dun site Internet (http://endocrinedisruptors.missouri.edu/vomsaal/vomsaal.html) qui contient un document avec des références et des extraits darticles publiés sur le BPA. Le Dr Myers a rapporté avoir travaillé dans le cadre du comité organisateur de la conférence sponsorisée par le NIH sur le BPA qui sest tenue à Chapel Inn, Caroline du Nord, en 2006 ; il a travaillé en tant que président directeur général/scientifique en chef dune organisation à but non lucratif, les Sciences de Santé Environnementale, qui rassemble et redistribue les informations sur lenvironnement et la santé de sources médiatiques partout dans le monde (EnvironmentalHealthNews.org ; y est incluse la couverture du BPA lorsquelle existe, et aucune contribution nest exigée pour ce service parce quil est soutenu financièrement par des fondations privées) ; la publication (avec 2 co-auteurs) « Notre futur volé », livre qui mentionne brièvement le BPA (le Dr Myers a reçu moins de 10 000$ en royalties pour cet ouvrage depuis sa publication) ; et la publication dun site Web compagnon ne générant aucun revenu (OurStolenFuture.org) qui résume la science émergeante au sujet de la perturbation endocrinienne, incluant les découvertes sur le BPA.
Les éditoriaux représentent les opinions des auteurs et du JAMA mais pas ceux de lAmerican Medical Association.
Affiliations des auteurs : Division of Biological Sciences, University of Missouri, Columbia (Dr vom Saal); Environmental Health Sciences, Charlottesville, Virginia (Dr Myers).
Voir aussi p 1303.
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ARTICLES EN RAPPORT
Cette semaine dans le JAMA-Français
JAMA. 2008;300:1273.
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Le statut dans la santé des adultes du taux de bisphénolurinaire
Iain A. Lang, Tamara S. Galloway, Alan Scarlett, William E. Henley, Michael Depledge, Robert B. Wallace, et David Melzer
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Résumé
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